Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 04.04.2021 - tony-duret - 2 min  - vu 13486 fois

AU PALAIS L’accusé : « Le cannabis, c’est comme quand je tue le cochon : j’en donne aux copains »

La salle d'audience du tribunal correctionnel de Nîmes. Photo Tony Duret / Objectif Gard

Depuis trois ans, un couple de Saint-Quentin-la-Poterie avait monté un commerce de cannabis qui consistait, selon eux, en de la « dépanne ». Une qualification souvent évoquée dans les affaires de stupéfiants, mais contestée par la justice qui y voit plutôt un véritable trafic de drogue.

Il y avait une connotation champêtre, dépaysante, presque sympathique à l’audience de comparution immédiate qui s’est tenue jeudi matin au tribunal correctionnel de Nîmes. Pourtant, à la campagne comme à la ville, la drogue fait les mêmes ravages. Un point que ne partage pas le principal accusé, Frédéric, un grand gaillard de 61 ans avec de faux airs de Professeur Raoult. « C’est du cannabis thérapeutique que je fais. Je prépare des tisanes pour des gens qui ont la sclérose en plaques », indique-t-il au tribunal. « Sauf que c’est une pratique totalement illégale », recadre aussitôt le président, Brice Barbier. Le sexagénaire, herboriste en herbe et pharmacien amateur, ne semble pas convaincu.

Il n’est pas plus emballé par la lecture des faits du juge qui rappelle que la perquisition à son domicile a permis de mettre la main sur 10kg de cannabis, 45 000€ en petites coupures et deux fusils de chasse. Le couple s’est fait prendre quand il a fait expédier, par la nièce de madame, un colis d’un kilo de cannabis par La Poste. L’odeur qui se dégageait du paquet était tellement forte que les employés, manifestement connaisseurs, l’ont trouvée suffisamment suspecte pour alerter les gendarmes.

« Le cannabis, c’est comme quand je tue le cochon : j’en donne aux copains »

Encore une fois, Frédéric n’adhère pas du tout à l’étiquette de dealer qu’on cherche à lui coller. Il a une vision plus bucolique de son commerce : « Je vis dans ma campagne et je ne fume que l’herbe de ma production. Si j’ai mal au foie, je fume. Si j’ai mal au genou, je fume. Je ne sais pas exactement combien je fume, peut-être 20 joints par jour. Mais je ne mets jamais de tabac », précise-t-il avant d’ajouter : « Ce n’est pas une organisation. C’est comme quand je tue le cochon : j’en donne un bout aux copains ».

Au sein du couple, chacun avait son rôle à jouer. Sandrine, sa compagne au casier vierge, s’occupait de la culture et participait à la récolte. Frédéric, 12 condamnations, gérait le conditionnement. « C’est une petite entreprise familiale, un mode de vie », constate le substitut du procureur, Jonathan Heurguier qui requiert 30 mois de prison avec maintien en détention et 7 500€ d’amende contre Frédéric. Réquisitoire allégé pour sa partenaire à la main verte : 12 mois dont 8 avec sursis et 2 500€ d’amende.

Woodstock-la-Poterie

Pour la défense de madame, maître Lauriane Dillenseger considère que l’on est « plus proche de Woodstock que d’un réel trafic de stupéfiants à la ZUP ». Isabelle Viremouneix, qui défend Frédéric, parle quant à elle d’un « trafic campagnard » et juge les réquisitions « complètement inadaptées à la personnalité » de son client.

Ce dernier est finalement condamné à 24 mois de prison dont 12 avec sursis. Il est maintenu en détention pour la partie ferme de la peine. Frédéric devra payer une amende de 3 500€. Ses armes ainsi que les 45 000€ retrouvés chez lui seront confisqués. Isabelle repart libre avec 10 mois de prison avec sursis au-dessus de la tête et une amende de 1 500€. L’entreprise familiale ferme ses portes.

Tony Duret

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