Elle n'est devenue SARL qu'à la fin des années 80, mais c'est en 1981 que Verfeuille en Cévennes est née une première fois, de l'union de quatre producteurs de châtaignes en déshérence, un peu comme la châtaigneraie cévenole d'alors. "Au début des années 80, le marché était au plus bas, se remémore Daniel Mathieu, gérant de la société, et surtout à son origine avec Alain, Denis et Jean-Pierre. On a eu l'idée de se dire : essayons la transformation pour faire de la valorisation."
"Tout partait en fruits frais sur le marché des industriels et alimentait les gros faiseurs d'Ardèche, à des prix très bas", poursuit Daniel Mathieu. La possibilité de transformer la production cévenole est envisagée aussi parce que les espèces historiquement exploitées s'y prêtent bien. "Traditionnellement, les châtaignes étaient séchées. Il y avait donc une sélection variétale, afin de produire tous les ans des variétés plutôt sucrées, qui se sèchent et s'épluchent facilement. Elles se prêtaient donc très bien à la transformation."
"On était partis sur 30-40 tonnes, se souvient Daniel Mathieu. Et la demande a tout de suite été là, pour Verfeuille et pour d'autres agriculteurs. On a pu leur acheter ou transformer leur production, qu'ils valorisent sous leur marque. Aujourd'hui, on traite entre 300 et 350 tonnes." Principalement sur le site ouvert l'an dernier de Branoux-les-Taillades, "à 95 % pour les apporteurs", quand celui de Génolhac reste dédié au façonnage pour des producteurs, parfois plus lointains que les Cévennes, Hérault et Var, notamment.
"80 % des apporteurs proviennent des vallées Longue et Française. On fait du bio depuis le début, à 60 % désormais. Et on est en AOP Châtaigne des Cévennes. D'ailleurs, jusqu'à maintenant, on n'avait pas assez de production AOP. Mais cette année, beaucoup de producteurs bio s'y sont mis." La seule véritable inquiétude pour Daniel Mathieu, en plus du vieillissement des vergers, provient des maladies, à commencer par l'ancre, "pour laquelle on n'a pas de traitement et qui tue un arbre en un ou deux ans".
Des maladies que Daniel Mathieu voit s'aggraver sous l'effet du réchauffement climatique. "On a encore du verger traditionnel récupérable, se rassure-t-il. On peut aussi regreffer les bouscasses. Mais c'est quand même un métier qu'il faut apprendre, qui doit se reprofessionnaliser. Il faut savoir greffer, reconnaître les variétés, etc. Il faut recapitaliser financièrement et techniquement."
"L'AOP, aujourd'hui, nous démarque des usines de transformation d'Ardèche, par exemple, nuance le gérant de Verfeuille. Et on essaie de décliner la châtaigne dans une gamme la plus large possible. Il faut que ce soit autre chose qu'un marronnier, s'amuse-t-il. C'est à la fois un fruit et un légume et les consommateurs sont partout. À nous d'élargir les marchés !" Pour l'instant, Verfeuille se retrouve facilement en grandes et moyennes surfaces, de Perpignan à Marseille et jusqu'à Rodez au nord. "Pour le bio, la vente passe beaucoup par des plateformes." La société produit aussi 50 000 litres de bière en vrac, 33 et 75 cl. De quoi accompagner un cornet de châtaignes grillées...