"Salut à toi jeune médecin, ou moins jeune. Ici à Beauvoisin, on a un cabinet hyper fonctionnel, alors on cherche du renfort, minimum un à deux médecins, éventuellement trois si un groupe de copains veut s'installer", peut-on entendre dans la vidéo du docteur Sébastien Convent, publiée sur son Facebook personnel il y a quelques jours. On pourrait croire que tout va au mieux sur le plan médical pour la commune de Petite Camargue, mais la réalité est différente.

Dans quelques mois, les trois médecins de Beauvoisin s'en iront vers d'autres horizons. La faute à qui ? À pas de chance, puisque Sébastien Convent, également médecin à l'EHPAD de la commune, partira pour un changement de vie, qu'il a en tête depuis quelques temps. "J'ai passé une vingtaine d'années très belles sur le secteur. Je suis heureux et comblé par mon travail mais j'ai décidé de changer de vie", nous confie-t-il. Ses deux jeunes associées partiront aussi. En juin pour la première, pour suivre son compagnon, et le second rejoindra un autre cabinet sur la commune d'Aubord.

Pourtant, ce n'est pas faute de chercher un ou plusieurs remplaçants pour combler le vide qui sera laissé dans quelques mois. Malgré la campagne de communication assez séduisante sur les réseaux sociaux, personne ne se manifeste. "J'aurais aimé partir en laissant un cabinet fonctionnel, je me retrouve dans une situation inconfortable", regrette Dr Convent. La pénurie ne touche pas seulement la commune, mais d'autres aussi à proximité : "Il y a des soucis aussi à Saint-Gilles, ils ne seront bientôt plus que deux médecins à Vauvert aussi".

Il y a cinq ans, deux cabinets médicaux existaient à Beauvoisin. À la fermeture d'un des deux, Sébastien Convent affirme s'être mobilisé en alertant la mairie à travers une réunion. Pour lui, la solution serait de créer comme c'est le cas un peu partout dans le Gard une Maison de Santé Pluridisciplinaire (MSP). "J'ai essayé d'en créer une il y a plus de cinq ans mais ça n'a pas été possible". Il s'agit de structures regroupant divers professionnels de santé (médecins, infirmières, kinésithérapeutes...), dans des communes pouvant être en faible densité de praticiens. "On a du mal à attirer de jeunes médecins, parce qu'ils sont intéressés surtout par ces MSP", constate le docteur.

Explosion démographique

Deuxième commune la plus peuplée de la CCPC derrière Vauvert, Beauvoisin a quasiment doublé son nombre d'habitants en une vingtaine d'années, passant à environ 6000 âmes en 2025. Le nombre de médecins a quant à lui diminué, et n'a pas suivi la croissance assez exponentielle. "On a eu jusqu'à cinq médecins sur la commune, certains sont partis à la retraite, sans trouver de remplaçant. Pendant une petite année, le docteur Convent s'était même retrouvé tout seul par le passé", affirme Guilhem Vrécord-Mitel, président de l'association CUB (Citoyen Unis pour Beauvoisin).

Forcément, les inquiétudes sont alimentées par les discussions entre les habitants. Au Café du Commerce, poumon de la vie sociale de Beauvoisin, le patron Gérald Sagnier ne les cache pas : "J'entends tous les jours le désarroi des Beauvoisinois de ne pas arriver à trouver un docteur en 2025, je trouve ça quand même hallucinant. On en discute avec certains clients, ils ne savent pas comment ils vont faire. Il y en avait déjà pas mal qui allaient ailleurs", commente-t-il.

L'attractivité du département est peut-être un des éléments qui freinent les médecins à s'installer, malgré la présence du soleil : "On a du mal à stabiliser le nombre de médecins, et nous sommes plus de 6000 aujourd'hui. On a des besoins médicaux, un EHPAD...", s'inquiète le président de CUB. À contrario, Beauvoisin pourrait basculer progressivement dans une ville dortoir, ce qui serait un véritable désastre pour la pharmacie du coin, dont la perte de chiffre d'affaires pourrait être estimée à 200 000 euros.  

"Je n'ai pas de baguette magique"

Contactée, la maire de Beauvoisin Mylène Cayzac se dit "très surprise" de voir sa commune dans cette situation. "On est en train de discuter avec le docteur Convent, pour voir si quelqu'un va reprendre son poste. Il manque des médecins de partout, on ne peut pas en fabriquer et malheureusement je n'ai pas de baguette magique", commente-t-elle, assez désemparée.

La création d'une Maison de Santé Pluridisciplinaire (MSP) n'est pas à l'ordre du jour pour le mandat actuel. La raison ? Un manque cruel de foncier : "À l'avenir oui ce sera un sujet, mais aujourd'hui nous sommes en train de réviser notre PLU, qui devrait être terminé en 2026", répond Mylène Cayzac, qui ne sera pas candidate à sa réélection.

Pour combler à minima tous les besoins de la commune, il faudrait au moins quatre médecins, et jusqu'à six pour que chacun puisse trouver un rendez-vous plutôt rapidement. Le compte est très loin d'être bon pour l'instant...