Publié il y a 5 mois - Mise à jour le 04.11.2023 - Sacha Virga - 4 min  - vu 450 fois

FAIT DU SOIR Une poignante pièce de théâtre en hommage à la vie de Jean Carrière

Le Prix d'un Goncourt

Le vieux vélo de Jean Carrière, utilisé dans la pièce de théâtre

- Sacha Virga

Nommé au prestigieux Prix Goncourt en 1972 pour son roman L'Épervier de Maheux, Jean Carrière aura été un grand homme de littérature. Le Nîmois, décédé en 2005, reçoit un vibrant hommage dans une pièce théâtrale nommée Le Prix d'un Goncourt.

Pour beaucoup de fidèles amateurs de littérature, Jean Carrière était une personnalité éminente. Né le 6 août 1928 à Nîmes et décédé dans cette même ville dans la nuit du 7 au 8 mai 2005, l'auteur a publié dans sa carrière une vingtaine de romans, un d'entre eux a obtenu le très réputé Prix Goncourt : L'Épervier de Maheux en 1972. Pour lui rendre hommage, le comédien, auteur et metteur en scène Philippe Chuyen a adapté un de ses romans (Le Prix d'un Goncourt) en pièce de théâtre. Il s'agit-là d'un récit autobiographique racontant la vie de l'artiste dans ses moindres détails, suscitant de nombreuses émotions fortes. 

Tout commence par le plus grand des hasards en 2005, le jour des obsèques de Jean Carrière : "Dans le registre des condoléances, je tombe sur une enveloppe d'un homme qui m'écrit : "Je me suis senti comme d'un devoir de venir aux obsèques de votre père. Avec son autorisation depuis six mois, je l'incarne sur scène dans une pièce de théâtre qui s'appelle "Carrière célèbre Giono"", explique Émmanuel Carrière, un des trois fils du défunt écrivain. Après cette surprise qui lui fut agréable, il se rend à une des représentations de ce spectacle à Manosque, qui s'est joué près de 200 fois au total. 

Il faut savoir que Manosque n'est pas une ville anodine pour Jean Carrière. L'écrivain y a vécu quatre ans, étant le secrétaire particulier de Jean Giono. Il était à l'époque chroniqueur littéraire et musical pour l'ORTF et organisait des entretiens avec Giono qui ont été parus et réédités plus récemment : "On avait demandé à mon père d'éditer le texte de ces entretiens et d'en faire une préface. C'est sur cette base que Philippe Chuyen avait construit sa pièce de théâtre", dévoile Émmanuel Carrière. Un premier travail qui a donné envie à Philippe Chuyen de lire les autres oeuvres de Jean Carrière, promettant à l'adjoint à la ville de Nîmes de monter un nouveau spectacle sur la vie de l'artiste. 

Jusqu'au jour où...

Pendant le confinement, Émmanuel Carrière reçoit un appel. Il s'agit de Philippe Chuyen, une quinzaine d'années après, qui lui explique qu'il vient de terminer une adaptation théâtrale du texte de Jean Carrière, "Le prix d'un Goncourt". "Il m'a ensuite demandé d'y jeter un oeil, de regarder s'il y avait des passages à enlever ou d'autres à rajouter", affirme Émmanuel Carrière. Les deux hommes se sont ensuite rencontrés pour la première fois, puisque tous les précédents échanges ne se sont pas fait en face-à-face. "Philippe m'explique qu'il a besoin d'un musicien pour l'accompagner sur scène. Cela tombait à pic, j'étais ami avec Raphaël Lemonnier, un grand pianiste nîmois. Je lui ai donc proposé de collaborer avec lui", sourit Émmanuel.

C'est ainsi que six mois après, Raphaël Lemonnier et Philippe Chuyen ont travaillé ensemble sur la mise en scène de la pièce. Un duo qui s'entend remarquablement bien, en témoigne l'anecdote amusante suivante : "Pendant un trajet en voiture, je reçois un appel de Raphaël qui m'explique être épaté du travail de Philippe. Et très vite après, c'est Philippe qui me dit la même chose de Raphaël !", s'amuse Émmanuel Carrière. Pour étoffer le spectacle, Philippe Chuyen avait besoin d'un vélo, sur lequel il pourrait jouer et se promener. Par chance, Émmanuel avait gardé dans sa maison de campagne le vieux vélo de son père, qu'il a donc prêté.

Le Prix d'un Goncourt
Le roman Le Prix d'un Goncourt a été adapté en pièce de théâtre • Sacha Virga
 

Une première au théâtre Christian Liger

Après des mois de dur labeur, la pièce a été jouée pour la première fois l'année dernière, dans le cadre du 50e anniversaire du prix Goncourt de Jean Carrière, au théâtre Christian Liger à Nîmes. Un succès retentissant, qui a amené d'autres représentations : au Grau-du-Roi, au festival d'Avignon cet été, et déjà d'autres dates, à Saint-Gilles le 10 novembre prochain et à l'Ombrière d'Uzès en 2024. "Lorsque j'ai parlé du spectacle à Eddy Valadier, maire de Saint-Gilles ainsi qu'à Fabrice Verdier et Jean-Luc Chapon à Uzès, ils m'ont tout de suite dit oui pour l'accueillir", s'exprime Émmanuel Carrière.

Une pièce tragi-comique assez grand public, adaptée aux lycéens, mélangeant les sujets profonds et douloureux de la vie de Jean Carrière, tout en apportant une part de sourires à certains moments. Saluée par la critique et les nombreux proches de la famille Carrière, Émmanuel fut victime de sentiments partagés : "Ça a été très très dur. J'étais content de voir jouer ce spectacle, mais il va loin dans l'intimité de ce que j'ai vécu de l'intérieur. Il m'a rappelé des souvenirs douloureux, des choses qui n'étaient pas faciles à vivre", se confie-t-il. 

La puissance de la pièce a fait d'ailleurs ressurgir des émotions chez de nombreuses personnes connaissant Jean Carrière, reparties en pleurs après les représentations. Émmanuel met en avant la justesse de la reproduction théâtrale, ayant l'impression que Philippe était un vieux ami à son père, alors qu'ils n'ont eu que quelques mois à peine pour se connaître. "Ils ont fait un super boulot, c'est le plus bel hommage qu'ils aient pu faire à son sujet", s'émeut-il. L'élu municipal souligne également les conférences de Patrick Cabanel, historien de formation, ayant publié le livre Enquête sur un roman - L'Épervier de Maheux.

Sacha Virga

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