Le dossier traine, mais la nécessité urge. Dans les tuyaux et petits papiers depuis des mois, la question d'un tribunal judiciaire pour enfants de plein exercice à Alès a refait surface sous l'impulsion du cri d'alerte du bâtonnier Guillaume Garcia, d'abord sur les réseaux sociaux, puis devant l'établissement judiciaire alésien, avec d'autres avocats du barreau : "C'est une urgence, la première mesure à prendre. On peut créer des places de prison et multiplier le nombre de policiers, si la justice n'a pas les moyens de faire son travail, pour punir et réinsérer, ça ne suffit pas", alerte le bâtonnier.
Une création loin d'être neutre, tant dans la nécessité que le fonctionnement
Cette création doit passer par un décret du ministre de la Justice Gérald Darmanin et une nomination par le président de la République d'un juge des enfants. Le parquet nécessiterait, a minima deux magistrats "un avec l'office du juge d'enfant et un en charge de toute cette délinquance mineure", un greffier, un substitut et des locaux.
Une mise en place complexe mais nécessaire pour "prendre le problème à la racine avant de tomber sur des faits de plus en plus graves et sordides, justifie Guillaume Garcia. Les jeunes font d'abord les petites mains sur les points de deal, mais tombent très rapidement dans la criminalité. Lorsqu'un mineur commet son premier délit, des mesures éducatives et des sanctions potentielles doivent éviter une récidive et éviter la descente aux enfers, jusqu'au règlement de comptes".
Le tribunal d'Alès, dont le ressort approche les 200.000 personnes, a ainsi enregistré une hausse d'activité de 128% depuis 2022, l'activité 2025 ayant dépassé celle 2024, en seulement trois trimestres.
"Ne pas pouvoir jouir de la justice, c'est être un sous-citoyen"
Un tribunal spécifique sur Alès permettrait alors un suivi, que peine à assurer la cour de Nîmes, déjà surchargée et éloignée de la juridiction alésienne : "Depuis Générargues ou Génolhac, il faut deux heures de route pour se rendre à Nîmes, c'est impossible de faire valoir ses droits correctement dans ces circonstances. Ne pas pouvoir jouir de la justice, c'est être un sous-citoyen", dénonce le bâtonnier.
Régulièrement en contact avec le Garde des Sceaux à ce sujet, le maire Christophe Rivenq, comme le président du tribunal Simon Lanes, soutient l'initiative et y travaille : "Cela est nécessaire pour lutter contre cette délinquance du quotidien qui nous pourrit la vie, en plus de décharger le tribunal de Nîmes. Darmanin s’est engagé, il fera tout pour apporter une réponse urgente."
Dans une question écrite au ministère de la Justice, le député de la 5ᵉ circonscription gardoise, dont dépend Alès, estime lui aussi que "le volume des affaires de mineurs et la réalité sociale du territoire justifieraient cette création", d'autant plus que "la situation engendre des difficultés notables d'accès à la justice pour des familles, éclate les procédures et allonge les délais de traitement", sans oublier la monopolisation des forces de l'ordre pendant les transports direction Nîmes.