Publié il y a 6 mois - Mise à jour le 23.10.2023 - Yannick Pons - 5 min  - vu 1387 fois

FAIT DU JOUR La culture du riz au chevet de la Camargue

Le Mas Neuf de la Motte Saint-Gilles rizière

Le Mas Neuf de la Motte (Saint-Gilles)

- Poujol

La coopérative agricole productrice et collectrice de riz Arterris et son partenaire Vivien Paille, catalysent le développement de la filière du riz en Camargue par le biais de contrats à long terme. L'entreprise est vertueuse du fait que la culture du riz favorise l'apport significatif d'eau douce dans les terres.

La coopérative agricole productrice et collectrice de riz Arterris et son partenaire historique Vivien Paille, racheté par le groupe Avril (Lesieur, Puget), spécialiste de la transformation et du conditionnement de riz renforcent les liens et accélèrent le développement de la filière riz, afin de créer une relation durable avec les différents acteurs qui la composent. L'expansion de la culture du riz dans la mangrove provençale se révélerait une défense efficace contre la progression de la salinité qui met en danger la faune et la flore.

Récoltes prometteuses

Aujourd’hui, le groupement d’agriculteurs souhaite intégrer d’autres producteurs de riz, dans le but de renforcer l’offre de riz de Camargue IGP (Indication géographique protégée). « Les Français ignorent que l’on récolte du riz en Camargue, et pourtant, nous sommes les seuls en France continentale à le faire ! », précise Jacques Groison, le directeur général adjoint d’Arterris, qui veut assurer des contrats d’achat de production de riz sur plusieurs années aux producteurs, en sécurisant la filière en aval par Vivien Paille, marque française des produits essentiels de l’épicerie salée tels les légumes secs, les céréales et le riz.

Arterris

Groupe coopératif d’agriculteurs dans le sud de la France. Premier producteur de riz en Camargue. 15 000 agriculteurs associés. 350 000 hectares de cultures. 1,2 milliard d’euros de CA en 2022.

Les récoltes en cours s’annoncent prometteuses. La combinaison d’un été très chaud qui perdure et l’absence d’épisodes cévenols ont été favorables à la culture du riz cette année. Ainsi, la qualité et les rendements s’annoncent plus importants. Philippe Dupuy et sa compagne (Mas de Rémoule), représentent la quatrième génération de riziculteurs depuis 1950 sur leur exploitation située à Arles, sur laquelle ils cultivent différentes variétés de riz IGP camarguais. Le producteur vise une récolte de 198 tonnes de riz sur une surface de 65 hectares. « Je m’impose depuis plusieurs années de faire tourner mes terres en cultivant une ou deux années de riz puis une autre année des cultures différentes comme le blé et ainsi de suite, afin d’obtenir des sols plus propres », explique Philippe Dupuy.

Le riz au chevet de la Camargue

Le territoire subit de plus en plus l'impact du changement climatique à travers les remontées de sel. Accroître la production de riz joue un rôle clé dans la diminution de la salinité des terres afin d’assurer la pérennité des autres cultures, mais aussi la survie de ce territoire exceptionnel, dont la fragilité n’est plus à démontrer. Ainsi les riziculteurs camarguais pourraient bien faire partie de l’équation qui résoudrait, avec l’aide de l’eau du Rhône, les enjeux de la salinité dans le delta. Cette union entre la coopérative camarguaise et le distributeur Vivien Paille offrira aux riziculteurs des contrats pluriannuels autour de prix fixes leur permettant de vivre dignement de leur travail.

Vivien Paille

Marque française du groupe Avril (Lesieur, Puget), spécialiste du riz, des céréales et des légumes secs. L’entreprise a intégré le groupe Avril en Juillet 2022

Une sécurité majeure en ces temps de spéculation et d'instabilité sur les marchés de matières premières. Le prix du riz est à la hausse ces dernières années. Il s’achète aujourd’hui 450 euros la tonne avant transformation, et la demande est croissante notamment sur le riz long, bio, parfumé, IGP de Camargue dont la production affiche un rendement inférieur de 25% par rapport au riz classique.

Arterris muscle la filière Camarguaise

Avec deux sites, l’un à Arles et l’autre Saint-Gilles, Arterris est l’acteur principal en Camargue pour ce qui concerne le riz. La coopérative d’agriculteurs compte aujourd’hui une cinquantaine de riziculteurs sur le territoire camarguais, qui produisent entre 15 000 et 20 000 tonnes de riz IGP par an. L’acteur souhaite inciter davantage de producteurs à s’engager dans une filière entièrement intégrée. La riziculture offre de nombreux débouchés. « Il y a des opportunités de marché pour renforcer la production française mais nous avons besoin d’aligner les capacités et les méthodes de production à ces besoins, affirme Jacques Groison, directeur général adjoint d’Arterris. Ceci ne peut se faire que dans le cadre d’une relation durable et de confiance entre les différents maillons de la chaîne. »

Jacques Groison,Yannick Hus, Philippe Dupuy et Bertrand Mazel, président du syndicat des riziculteurs de Camargue
Jacques Groison,Yannick Hus, Philippe Dupuy et Bertrand Mazel, président du syndicat des riziculteurs de Camargue • Yannick Pons

Perspective de revenus stables

Afin d’inciter davantage de producteurs à la rejoindre, Arterris mise sur l’innovation positive. Un contrat pluriannuel qui offre la possibilité aux producteurs de bien vivre de leur métier. Les semences sont en mai, la récolte au mois d’octobre et le séchage en silos durant le mois de novembre. Ainsi, le choix d’achat de Vivien Paille s’effectue en février, et sera fixé sur deux ans. L’engagement des deux parties permettra de réduire les risques, notamment celui des fluctuations de prix.

Les riziculteurs seront ainsi assurés d’un prix de vente fixe pendant deux ans. C’est le cas de Philippe Dupuy, qui possède un contrat biannuel lui permettant de vendre la totalité de sa récolte en riz et en blé à Arterris au même tarif que l’année précédente. Cette garantie permettra notamment au riziculteur de se projeter plus sereinement et d’investir dans des équipements pour ses cultures. La coopérative accompagne également les producteurs dans leurs plans d’assolement en proposant une grande partie des débouchés en grande culture et potentiellement en productions de légumes. Et ce, grâce à l’intégration en aval de Vivien Paille.

Union vertueuse, enjeu vital

Vivien Paille, spécialiste de la transformation et du conditionnement de riz et partenaire historique d’Arterris, souhaite de son côté renforcer l’adhésion sur l’aval de la filière, en particulier de la part de la GMS afin qu’elle valorise davantage les circuits courts dans ses rayons : « Acteur depuis un quart de siècle en Camargue au côté des riziculteurs, nous souhaitons continuer à agir pour le développement de filières locales en intégrant tous les acteurs de la chaîne, afin de satisfaire au mieux les demandes du marché. Bien produire c’est aussi agir pour une agriculture respectueuse de la planète », indique Yannick Hus, directeur des achats de Vivien Paille. Pour les deux acteurs, il est aujourd’hui indispensable, face à la concurrence internationale et aux enjeux environnementaux, de renforcer la filière française du riz et d’engager davantage les différents maillons de la chaîne sur le long terme en sécurisant les revenus des producteurs agricoles. La porte est ainsi ouverte aux jeunes exploitants qui souhaitent s'installer. Ils disposeront d'une assise financière par l'assurance de vendre leurs récoltes au bon prix.

L'enjeu est vital car le riz de Camargue est cultivé dans un milieu naturel unique, à l'endroit où les eaux douces du Rhône rencontrent les eaux salées de la Méditerranée. Cette configuration géographique singulière engendre un équilibre délicat dans un endroit où La riziculture permet d'apporter de l'eau douce sur le territoire, contribuant ainsi au dessalement des sols, maintenant l'équilibre fragile du delta. La situation des vignobles, des bois ( Bois des Rièges) ou même sur l’étang du Vaccarès (110g de sel par litre à certains endroits), est préoccupante pour la faune et la flore. L'eau douce amenée par le Rhône dans les rizières est essentielle à la survie des cultures et prévient la remontée de sel du sous-sol. L'expansion de la culture du riz se révélerait une défense efficace contre la progression annuelle de la salinité en Camargue.

Yannick Pons

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