Publié il y a 7 mois - Mise à jour le 07.03.2024 - Norman Jardin - 5 min  - vu 1989 fois

FAIT DU JOUR Le festival « Son libre » à Collias : les inquiets, les rassurants et les prudents

Le festival « Son libre » a attiré 6 500 personnes en 2023

- Photo : Facebook "Son libre"

Alors que la huitième édition du festival « Son libre » pourrait se dérouler à Collias au mois de mai, certains Poulxois se mobilisent pour éviter les nuisances sonores de l’année dernière. Si l’organisateur assure que, cette fois, il n’y aura pas de gêne, du côté des institutions, qui n’ont pas encore autorisé la manifestation, on évoque le sujet avec prudence.

« La musique adoucit les mœurs », paraît-il. Mais pour certains habitants de Poulx, elle est synonyme d’enfer. Au cœur de leurs préoccupations, le festival « Son Libre » qui se déroule chaque année sur la commune voisine de Collias, et qui rassemble des milliers d’amateurs de techno. La puissance des enceintes incommode les Poulxois, comme pour Jean-Sébastien pour qui l’édition 2023 reste un douloureux souvenir : « On a pensé à une fête dans le quartier, mais ça a duré toute la nuit. Je suis allé à la pharmacie pour prendre un traitement, j’ai acheté des boules Quiès mais ça a continué tout le week-end non-stop. »

« J’ai porté plainte contre les organisateurs et la préfète du Gard »

Toujours à Poulx, Bertrand, ne décolère pas : « J’étais enfermé dans ma chambre et malgré les boules Quiès et le double vitrage, on entendait le bruit. L’an dernier, le festival a été un vrai carcan. » Le Poulxois s’est même rendu à la gendarmerie de Marguerittes : « J’ai porté plainte contre les organisateurs et la préfète du Gard (qui était Marie-Françoise Lecaillon au mois de mai 2023, NDLR) pour avoir validé cette manifestation. Un an plus tard, je n’ai aucun retour. »

Une affiche dans un commerce de Poulx • Photo : Norman Jardin

Une gêne collective qui est confirmée par la municipalité de Poulx : « Les nuisances sonores ont été très fortes l’année dernière. On n’a eu beaucoup d’appels en mairie. Nous ne sommes pas restés les bras ballants puisque nous avons multiplié les réunions de travail. Il se dit que 2024 serait la dernière année du festival sur le site de Collias », confie Joël Sauges, l’adjoint à l’Urbanisme. Ces derniers mois, le calme est revenu du côté des Gorges du Gardon mais les deux Poulxois ont eu, dernièrement, « une mauvaise surprise »...

« On voudrait avoir le droit de dormir, de se reposer et vivre »

C’est sur Internet qu’ils ont appris le retour du festival « Son libre » du 9 au 12 mai prochains. Alors, Bertrand et Jean-Sébastien ont lancé une pétition sur Internet « Empêchez définitivement l'organisation du Festival Son Libre dans le Gard », qui a récolté 200 signatures. En 2023, une autre pétition « Stop au festival son libre » avait été signée par plus de 500 personnes et partagée par la mairie de Cabrières. Jean-Sébastien abonde : « Je suis pour ce festival car il est légal. Mais on voudrait avoir le droit de dormir, de se reposer et vivre. On demande qu’il soit régi par les mêmes règles que tout le monde. Les fêtes votives s’arrêtent à 2h, la feria de Nîmes à 4h et on souhaite que le festival fasse une pause, même tardive, mais au moins que l’on puisse souffler. Si je fais des grillades avec un peu de musique, à 23h les gendarmes débarquent, alors que le festival ne s’arrête pas de toute la nuit. »

Quant à Bertrand, il a collé des affiches dans les commerces du secteur et il a distribué 600 tracts dans les boîtes aux lettres pour sensibiliser les riverains. Il n’y a pas que les nuisances sonores qui inquiètent les Poulxois : « Le festival a lieu en plein Natura 2000 (un site naturel, NDLR). On est en période de sécheresse et il y a des groupes électrogènes, il y a des gens qui fument. Ça va mobiliser des forces de l’ordres, des pompiers et des gendarmes pour surveiller le festival. »

« J’ai fait part de mes inquiétudes par rapport aux risques d’incendie et du fait que le lieu n’est pas approprié »

À Collias, le maire Jonathan Pire tient aussi à apporter quelques précisions : « Je ne suis pas au courant si le festival va avoir lieu. Il faut respecter la procédure, c’est-à-dire la délivrance des autorisations par les services de la préfecture. À ma connaissance, ce n’est pas le cas aujourd’hui. » Le premier édile ajoute : « Je comprends l’inquiétude des riverains, mais c’est une situation dont j’ai hérité puisque j’ai été élu en 2020 et que le festival a dix ans. Je ne prends position qu’en fonction des avis qui sont émis par la préfecture, le SDIS, la gendarmerie, la DDTM, l’ONF et le syndicat mixte des Gorges du Gardon. J’ai fait part de mes inquiétudes par rapport aux risques d’incendie et du fait que le lieu n’est pas approprié. J’ai demandé des actualisations effectives par rapport aux émergences concernant les nuisances sonores et au syndicat mixte et l’ONF, à ce que soit faite une étude d’impact environnemental. »

« Le festival relève de l’autorisation donnée par le maire de Collias »

De son côté, la préfecture du Gard indique : « Le festival relève de l’autorisation donnée par le maire de Collias. Néanmoins, en raison du nombre de personnes attendues chaque année, l’organisateur doit toujours produire un dossier de sécurité, qu’il soumet à la préfecture. En l’état nous l’avons reçu. Les services de la préfecture vont l’étudier et émettre un avis assorti de préconisations qui permettront d’éclairer le maire pour sa prise de décision. » L’État rappelle : « Les organisateurs font tout pour être dans les règles, à la différence d’implantations sauvages. L’organisateur s’est toujours rapproché de la mairie de Collias et des services de l’État pour gérer au mieux son festival qui est hors du périmètre de la zone Natura 2000. »

Rudolph André , l'un des organisateurs du festival "Son libre" • Photo : Stéphanie Marin

Pour l’organisation du festival, les nuisances de l’édition 2023 ne se renouvelleront pas. « C’est la première fois qu’il y a des gens que se plaignent. L'année dernière, on a désincliné la scène pour des raisons esthétiques. On ne pensait pas que ça influerait sur la portée du son et que ça impacterait la commune de Poulx. C’est une erreur de notre part, mais on n’est pas là pour embêter les gens. Cette année, on va mettre des sonomètres dans les villages aux alentours pour faire des mesures et on va faire très attention à l’inclinaison des enceintes », explique Rudolph André, directeur artistique chez EFFKT.

« C’est impossible de l’annuler maintenant »

La manifestation n’est pas encore officiellement validée mais pour Rudolph André il est trop tard pour faire machine arrière : « Si on veut nous interdire, il faut nous le dire avant et ne pas attendre que l’on lance la programmation. C’est impossible de l’annuler maintenant. C’est tout un processus qui dure un an. À la fin, c’est une décision qui est un peu collégiale. On a encore une réunion avec la préfecture prochainement. »

Ce dossier est abordé avec beaucoup de prudence par les différentes parties prenantes. Jean-Sébastien résume la situation avec une célèbre formule, « La liberté des uns s’arrête où commence celle des autres ». Il faudra pourtant trouver une solution permettant aux fans de techno de profiter du festival « Son libre » et, dans le même temps, aux habitants des communes du secteur de ne pas être importunés. Les organisateurs ont déjà publié la programmation de l’édition 2024 et promettent : « Pour les 10 ans préparez-vous à vivre une édition mémorable » ! Nul doute que du côté de Poulx, on ne l’entend pas de cette oreille.

Norman Jardin

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