L’émotion l’a parfois assaillie mais, fidèle à elle-même, Marie-Françoise Lecaillon a su garder le cap pour aller au bout d’un long discours conçu comme un tableau pointilliste, « par petites touches », pour clore le chapitre gardois de sa longue carrière, et par la même occasion sa carrière tout court. « C’est ici que s’achève ma vie professionnelle », glissera-t-elle, se rappelant de ce jour de janvier 1983, quand elle commençait comme attachée de préfecture en Seine-Saint-Denis, début de ses « quarante années au service de l’État. »
C’est donc dans le Gard que cette carrière s’achève, un département qui aura donc « toujours une place particulière » dans le coeur d’une préfète qui aura marqué le département à plusieurs titres. D’abord, ce fut « la première femme préfète du Gard », soulignera Nathalie Nury pour le Département, préfète ayant pris ses fonctions un 8 mars, en 2021. La conseillère régionale Julie Delalonde retiendra son « accessibilité, (sa) simplicité, (son) engagement et (son) humanisme. » Le sénateur Denis Bouad saluera son « empathie et son attention pour les maires ruraux », quand son homologue Laurent Burgoa verra en Marie-Françoise Lecaillon « une excellente capitaine d’équipe. » « Vous êtes sur le podium des préfets du Gard qui ont fait le plus de déplacements sur le terrain », reprendra-t-il, avant de l’inviter à revenir entre Rhône et Vidourle, la médaille du Sénat qu’il avait prévu de lui remettre étant « restée bloquée entre Paris et Nîmes. »
Le secrétaire général de la préfecture Frédéric Loiseau saluera quant à lui son « extrême rigueur, cette connaissance des dossiers qui a peu d’équivalent, quand on vous parlait d’un sujet, il valait mieux le connaître. » Sous son autorité, « nous avons tous progressé car nous étions challengés en permanence », rajoutera-t-il, avant de lui remettre la médaille de la préfecture ainsi qu’un presse-papiers.
Ce département particulier, majestueux autant que réboussier, Marie-Françoise Lecaillon n’avait fait que le traverser avant d’y être nommée. « J’ai vite aimé ses paysages diversifiés, c’est presque une petite France », rejoue-t-elle. Férue d’histoire, elle dévore celle de ce coin de France où la romanité, les camisards, l’industrie noircissent des pages, se met à jour sur les grands enjeux locaux (« pour m’imprégner ma démarche a été d’écouter et d’observer »), et se pique notamment d’agriculture, même si les rencontres avec les agriculteurs ont été « parfois un peu rugueuses mais le plus souvent constructives. »
De ce département elle retiendra aussi son imprévisibilité, entre épisodes cévenols ou méditerranéens, c’est selon, feux de forêts ou gros faits divers. « Mon premier week-end, je l’ai passé aux Plantiers », rappelle-t-elle, à l’occasion de la tuerie de sinistre mémoire. « Dans ce département il vaut mieux être à jour quand vous quittez votre bureau le soir car vous ne savez jamais ce qui va arriver dans la nuit ou le lendemain », résume-t-elle, comme un conseil pour son successeur Jérôme Bonet, dont ce sera le premier poste en tant que préfet. « J’ai acquis une certitude, plus nous faisons appel à la compétence territoriale plus nous trouvons des situations adaptées, je ne doute pas que mon successeur poursuive ce chemin », rajoutera-t-elle plus loin.
« Il y a un temps pour tout, est venu pour moi celui de partir », poursuivra Marie-Françoise Lecaillon, non sans dire son « respect » aux acteurs du territoire, notamment les maires, chefs d’entreprises et présidents d’associations, sa « gratitude » envers les forces de l’ordre et de sécurité, les fonctionnaires de l’État et ceux de l’ombre. Désormais, elle va « goûter pleinement à (sa) liberté retrouvée. » La passation avec Jérôme Bonet est prévue pour le 21 août.