Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 30.06.2020 - marie-meunier - 4 min  - vu 1120 fois

LE 19H À Saint-Quentin-la-Poterie, une comportementaliste équin vient en aide aux chevaux traumatisés

Virginie Bernhard est dresseuse et comportementaliste équin depuis 25 ans. Elle s'est occupée ce week-end de Sirius, le joli cheval champagne de Stéphanie Claverie, habitant Saint-Quentin-la-Poterie. (Marie Meunier / Objectif Gard)

"Et si, au lieu de leur imposer de nouvelles méthodes de dressage, nous laissions parler nos chevaux pour les écouter ?" Comportementaliste équin depuis 25 ans, c'est la question que se pose Virginie Bernhard, dresseuse installée dans les Alpes suisses. Ce week-end, elle s'est rendue à Saint-Quentin-la-Poterie voir les trois chevaux de Stéphanie Claverie, qu'elle a récupérés "in extremis boucherie" avec de nombreux traumatismes.

En mars dernier, Stéphanie Claverie avait lancé une cagnotte pour offrir à ses trois chevaux au passé lourd un havre de paix pour couler des jours plus paisibles. L'opération a réussi et ses trois compagnons jouissent désormais d'une belle parcelle en herbe de 2 hectares et demi. "Mon but maintenant, c'est de pouvoir leur offrir un confort psychologique et les aider à les sortir de leurs traumatismes. Et ainsi pouvoir leur offrir des soins de base de parage (*), des dents, vétérinaires et de ne pas le faire de façon violente et contrainte mais de manière douce", explique la propriétaire des équidés.

Et il y a vraiment urgence pour Sirius, un beau cheval couleur champagne qu'elle a trouvé sur un "marché aux bestiaux", prêt à partir pour le couteau du boucher. L'un de ses sabots est en très mauvais état, presque fendu en deux sur le devant. Le cheval en souffre et boîte. Mais impossible de le soigner puisqu'il ne se laisse pas attraper. "Il y a quelques mois, il s'était ouvert le nez, il saignait beaucoup. Ce jour-là, je lui ai mis son licol. Le temps que j'aille chercher mes produits de soin, il a tiré la longe des mains. Ça a été fini. C'est comme si j'avais appuyé sur un bouton qui a redéclenché ce traumatisme", relate Stéphanie Claverie.

"Nettoyer et enlever les traumatismes"

Toute la confiance qu'elle avait durement gagné avec son cheval a été fortement entamée. C'est pourquoi, elle espère beaucoup de la venue de Virginie Bernhard pour lui donner les clés pour comprendre son cheval. "Je suis là pour nettoyer et enlever les traumatismes des chevaux afin de leur redonner un équilibre psychique et si possible aussi physique. Il ne faut pas être formatée pour faire ce genre de travail mais le faire au cas par cas", introduit la comportementaliste.

"Je suis là pour nettoyer et enlever les traumatismes des chevaux afin de leur redonner un équilibre psychique et si possible aussi physique", explique Virginie Bernhard (à gauche). (Photo : Marie Meunier / Objectif Gard)

Pour cela, elle a élaboré une méthode qui évolue depuis 25 ans. Pour Sirius, elle raconte : "Je l'ai laissé fuir, raconter son histoire disant qu'il ne voulait pas être touché, qu'il avait peur, qu'il ne voulait pas être bloqué. Quand il a compris que je ne cherchais pas à le pousser dans sa fuite, il a commencé à m'interroger sur moi qu'est-ce que je voulais. Et je lui ai donné des petites clés, très claires et très simples pour essayer de dégrossir cet alphabet qui était complètement emmêlé pour lui avec l'humain. Quand il a commencé à comprendre, il a vu que j'étais là pour l'aider."

Des chevaux sauvages aux destriers de concours

À chaque fois que le cheval "prend sur lui" et "regarde en direction" de Virginie Bernhard au lieu de fuir, celle-ci recule pour réduire la pression qu'elle exerce sur l'animal. Ainsi un code va s'instaurer. "À chaque fois que je vais faire un pas, je vais donner un message au cheval. Ils sont d'une subtilité incroyable et nous, on est de grossiers personnages par rapport à eux parce qu'on parle trop, on agit trop. Ils sont confus avec ces informations parfois incohérentes. Donc si j'ai un conseil à donner, c'est ralentir et réfléchir avant d'agir. Que l'on aille à un Grand prix ou simplement dans son box."

Malgré tout, le travail est long et la confiance difficile à regagner quand elle a été brisée plusieurs fois. Selon Virginie Bernhard, il est d'ailleurs plus facile de travailler sur des chevaux sauvages, totalement vierges de contact humain que sur des équidés qui ont été malmenés, voire maltraités.

Pendant sa grande carrière, la dresseuse est allée à la rencontre de tout type de chevaux : polo, attelage, western... dans de nombreux pays (Nouvelle-Calédonie, Australie, Nouvelle-Zélande, États-Unis, Mongolie, Kenya...) "J'ai passé beaucoup de temps auprès des chevaux sauvages à faire des études éthologiques", précise-t-elle. Désormais, elle travaille surtout dans la discipline du saut d'obstacles. Elle a d'ailleurs eu l'honneur de s'occuper des montures du Français Patrice Delaveau, membre de l'équipe de France de saut d'obstacles, ou encore du cavalier suisse Markus Fuchs, médaillé d'or en finale de Coupe du Monde de saut d'obstacles en 2001 et médaillé d'argent aux Jeux Olympiques par équipe en 2000.

"Peu de gens parlent chevaux. Certains font parler les chevaux, c'est pas pareil", constate la dresseuse. On entend parfois la formule : le cheval est la plus belle conquête de l'Homme. Allié dans la guerre, dans l'agriculture, dans le transport et maintenant dans le sport et le loisir... il s'est toujours plié aux besoins de l'humain. Dans son approche, Virginie Bernhard veut laisser davantage "le choix" à ces animaux et faire en sorte que le contact avec l'Homme soit le plus agréable possible et surtout pas subi. C'est encore plus vrai pour les chevaux traumatisés comme ceux de Stéphanie, qui désormais a toutes les cartes en main pour aborder de la meilleure manière ses petits protégés.

Marie Meunier

* Opération consistant à entretenir les sabots du cheval en les râpant, en les coupant afin de leur donner leur forme arrondie initiale. Sans parage, la corne des sabots pousse tel un ongle et peut se casser voire endommager le pied du cheval.

Virginie Bernhard sera à nouveau dans les environs en juillet ou août où elle animera un stage à Caumont-sur-Durance (Vaucluse). Vous pouvez la suivre sur sa page Facebook Lecture comportementale du cheval.

Découvrez ci-dessous notre reportage vidéo :

Marie Meunier

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