FAIT DU JOUR Trouver l'équilibre avec le télétravail
Utilisé massivement au début du confinement, le télétravail est désormais délaissé ou utilisé avec parcimonie par les entreprises gardoises. Alors que l’exécutif invite les employeurs à mettre en place le télétravail partiel, qu’en pensent les acteurs locaux ?
« Deux à trois jours de télétravail par semaine » dans les entreprises où cela est possible. C’est ce à quoi encourageait Emmanuel Macron, le président de la République française, lors de son intervention télévisée du 14 octobre dernier, et de l’annonce des mesures mises en place pour endiguer l’épidémie de la covid-19.
« Il fallait qu’on le cadre juridiquement »
Mais dans les faits cela ne semble pas être si simple à mettre en place. Avec la crise sanitaire et le confinement (17 mars au 11 mai 2020), le télétravail avait séduit des salariés et des employeurs, mais aujourd'hui il ne fait plus recette. Dans les locaux nîmois de l'entreprise Saint-Mamet, on est passé de 100% du personnel en télétravail pendant le confinement à 50% au mois de juin pour être aujourd’hui temporairement abandonné. « Nous sommes en train de négocier un accord qui devrait aboutir en début 2021, car finalement le télétravail a bien fonctionné mais il fallait qu’on le cadre juridiquement », souligne Sophie Streiff la directrice des ressources humaines de la marque française de fruits en boite.
Pour la direction des ressources humaines, le télétravail présente des avantages et des inconvénients : « On peut prendre du recul sur les dossiers mais en revanche on n’a jamais les équipes complètes sur le site donc en termes de dynamisme, de cohésion d’équipe et d’engagement s’est compliqué. » Chez les salariés on est aussi partagé. Camille habite près de Montpellier et elle fait le déplacement en train du lundi au vendredi et le télétravail a changé sa vie : « Je n’avais plus les trajets à faire et je ça me faisait gagner beaucoup de temps. Ça m’a permis de manger avec mes enfants (5 et 2 ans) à midi ».
« Il faudrait un mix des deux... »
Travailler à domicile est confortable mais il faut aussi concilier vie professionnelle et vie personnelle : « Les enfants ne comprennent pas que je suis à la maison et que je ne joue pas avec eux. On se demande si on est aussi efficace qu’au bureau », s’interroge la jeune femme qui aimerait voir la mise en place du télétravail partiel. « Il faudrait un mix des deux. Un peu à la maison et au peu en entreprise, c’est mon idéal de vie. »
Dans l’industrie, et plus particulièrement dans l’industrie nucléaire, on télétravaille aussi. « Pendant le confinement nous sommes passés massivement au télétravail pour ceux qui ne sont pas postés, soit environ 45 % des salariés », explique Régis Faure, directeur adjoint de la Communication de l’usine Orano Melox, qui fabrique du combustible pour centrales nucléaires à Marcoule, près de Bagnols/Cèze.
L’usine compte 800 salariés et 500 sous-traitants, et la majorité d’entre eux est postée, comprendre qu’elle doit être physiquement présente à l’usine. « Ils sont sur des postes de production et sur un réseau totalement isolé. Il n’y a pas de possibilité de piloter l’usine à distance », explique Régis Faure. Pour eux, comme pour les salariés chargés de la sécurité et de la sûreté, pas de télétravail. Alors la plus grande vigilance est de mise sur site. « Il n’y a pas de cluster dans l’usine. Le brassage se fait dans nos vies privées », affirme Régis Faure.
D’ailleurs, le masque est obligatoire même sur le parking du site, et au réfectoire, les tables ont été disposées en quinconce. Car même si le télétravail a connu un essor pendant le confinement chez Melox, il est loin d'être majoritaire : « C’est un jour maximum par semaine. Il faut prévenir à l’avance et que le manager soit d’accord. Nous avons considéré qu’il fallait faire revenir les gens sur place pour recréer du lien social et managérial », précise Régis Faure, tout en ajoutant que des négociations sont actuellement en cours avec les syndicats pour faire évoluer les accords de groupe, contraignants sur le télétravail.
« Le télétravail a renforcé la fragilité informatique »
Le télétravail reste apprécié « notamment car ça fait des journées sans masque ni distance sociale », ajoute Régis Faure. C’est loin d’être anecdotique compte tenu des règles sanitaires drastiques. Ça l’est en tout cas moins que la participation financière d’Orano au prix de la connexion Internet des salariés en télétravail en fonction du nombre des jours télétravaillés, qui se monte à quelques euros par personne.
Reste que tout est en place : pendant le confinement, tous ceux qui pouvaient pratiquer le télétravail ont été équipés d’un ordinateur et d’un accès sécurisé. Car la sécurité informatique est un vrai sujet dans un secteur sensible comme le nucléaire. « Le télétravail a renforcé la fragilité informatique de toutes les entreprises, avec les connexions à distance, l’alternance entre les ordinateurs personnels et professionnels », note Régis Faure. Alors chez Orano, une charte informatique a été éditée et des sécurités installées sur les ordinateurs pour prévenir ces comportements potentiellement dangereux. « C’est une hygiène », résume Régis Faure. Et aussi un geste barrière, serait-on tentés d’ajouter.
Thierry Allard et Norman Jardin
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