Publié il y a 5 h - Mise à jour le 15.07.2025 - Romain Fiore - 3 min  - vu 288 fois

FAIT DU SOIR À Sauve, les salariés de l’usine Éminence refusent de se laisser délocaliser en silence

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Les employées de l'usine Eminence à Sauve ont manifesté le poing levé devant l'usine avec Aurélie Trouvé, la députée LFI. 

- Romain Fiore

Ce mardi 15 juillet, une quarantaine de salariés de l’usine Éminence à Sauve se sont rassemblés devant leur lieu de travail. Soutenus par des élus locaux et la députée LFI Aurélie Trouvé, ils ont exprimé leur colère et leur inquiétude face à la baisse d’activité de leur site historique, menacé à moyen terme.

Depuis février, l’usine Éminence de Sauve fonctionne à 50 % de son activité, conséquence d’un carnet de commandes volontairement asséché, selon les salariées. La raison ? Une stratégie du groupe Éminence – propriété de Delta Galil, multinationale israélienne – qui privilégie désormais la production de ses sous-vêtements et polos au Bangladesh, au Maroc ou encore à Madagascar.

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Des salariés, mais aussi des représentants syndicaux (FO) et des adhérents de partie politique (LFI) sont venus en soutien aux employées de l'usine Eminence.  • Romain Fiore

« Le propriétaire a décidé de nous mettre en activité partielle, alors qu’il continue à produire nos modèles au Bangladesh. Nous portons un savoir-faire français, une tradition textile qui fait vivre le village, mais qui ne serait plus assez “rentable” pour les actionnaires », dénonce Sandy Ambert, représentante FO et assistante administrative chez Éminence.

Un combat pour le territoire cévenol

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La députée LFI, Aurélie Trouvé souhaite interpeller le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau sur l'appel d'offre d'un contrat des polos des gendarmes français qui vont être délocalisé. " On va faire porter aux gendarmes français, aux frais du contribuable, des polos fabriqués au Bangladesh, et ce n'est pas normal." • Romain Fiore

L’enjeu dépasse la seule commune de Sauve. La députée Aurélie Trouvé, présidente de la commission des affaires économiques à l’Assemblée nationale, était présente ce mardi. Originaire de Nîmes, elle a dénoncé une « politique industrielle de sabotage » :

« On va faire porter aux gendarmes français, aux frais du contribuable, des polos fabriqués au Bangladesh. Et dans le même temps, on sacrifie ici 60 emplois, 60 familles, un savoir-faire ancestral du textile cévenol. C’est symbolique de l’état de l’industrie française. »

Le site, qui comptait encore 60 salariés au début de l’année, n’en regroupe plus que 40. Une quinzaine d’employées ont dû partir travailler à Aimargues, au siège logistique du groupe, faute de pouvoir supporter une perte de salaire de 200 euros par mois. « Mais là-bas, ce n’est plus de la confection, c’est de la logistique et de l’expédition. C’est tout notre métier, notre passion, qui part à l’étranger », souffle une ouvrière.

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Les employés et les représentants politiques et syndicaux étaient devant l'usine.  • Romain Fiore

Une première victoire… et des doutes persistants

Face à la pression syndicale et politique, la direction d’Éminence a consenti à un premier geste : le retour au temps plein est prévu pour la dernière semaine d’août. Mais l’incertitude demeure. « On revient à 100 %, mais pour combien de temps ? Quinze jours ? Un mois ? On n’a aucune garantie », poursuit Sandy Ambert.

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Sandy Ambert, Représentante syndicat chez FO et salariée de l'usine Eminence a pris la parole pour représenter ses collègues.  • Romain Fiore

La députée Aurélie Trouvé compte interpeller directement le ministre de l’Intérieur sur les conditions du marché public passé avec Éminence pour les polos de la gendarmerie.

« Si ce marché avait été conditionné à une fabrication locale, l’usine de Sauve aurait pu être sauvée. Il est urgent d’exiger que les aides publiques et les commandes de l’État soient conditionnées au made in France. »

Une lutte ouvrière qui résonne au-delà

Ce mardi, les salariés n’étaient pas seuls. Des habitants, des élus locaux et des représentants d’autres sites industriels, comme ceux de Perrier ou de la verrerie de Vergèze, étaient également présents pour afficher leur solidarité. « On se bat aussi pour l’économie de tout un bassin de vie. Un emploi supprimé ici, ce sont plusieurs activités locales qui sont touchées », résume une manifestante.

Dans un territoire rural où les industries se font rares, la fermeture d’un site comme celui de Sauve représenterait une perte irréparable. « Il n’y a pas d’alternative ici. Et ce n’est pas en allant faire de la logistique à 40 km qu’on remplace le métier de toute une vie. »

“On se bat pour notre dignité”

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Une banderole de la France Insoumise devant l'usine Eminence à Sauve. • Romain Fiore

Les manifestants, qui ne veulent pas lâcher, n'ont pas hésité à afficher des banderoles sur le site de l'usine et « on se bat pour notre dignité, nos emplois, notre village, et pour l’avenir de l’industrie textile en France. Ce qu’on défend, c’est le droit de vivre dignement de notre travail, ici, à Sauve. »

Malgré la chaleur, les banderoles sont restées levées toute l'après-midi. Et si l’inquiétude domine, la mobilisation a redonné de la voix à une lutte locale qui en dit long sur les fractures industrielles du pays.

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Des slogans en soutien aux salariés d'Eminence de Sauve.  • Romain Fiore
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Les salariés d'Eminence de Sauve, mais aussi les employés de la Verrerie et de Perrier de Vergèze étaient présents.  • Romain Fiore
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Sandy Ambert, représentante syndicat chez FO et assistante administrative des ventes chez Eminence • Romain Fiore

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