Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 04.07.2021 - corentin-migoule - 4 min  - vu 1280 fois

FAIT DU SOIR Zoom sur "La grande bobine", ce projet coup de cœur du public d'Alès Audace

Quatre des six cofondatrices de La grande bobine posent avec les chèques remis à l'issue du concours Alès Audace. (Photo Corentin Migoule)

Arrivées à la 5e place du concours général d'Alès Audace, les filles de "La grande bobine" ont surtout marqué les esprits en décrochant le prix du public. Un vrai coup de projecteur sur ce projet ambitieux qui vise l'élaboration d'un institut territorial des transformations publiques.

Elles s'appellent Loriane, Sophie, Emma, Laura, Maud et Marion. Âgées de 27 à 36 ans, ces jeunes femmes ont frappé un grand coup en remportant deux prix lors du désormais réputé concours économique Alès Audace. Une cinquième place dans le concours général synonyme d'une dotation de 9 000 euros, assortie d'un sacre dans la catégorie "Prix du public" qui, si elle offre une dotation inférieure (3 000 euros), occasionne une vraie mise en lumière.

"L'approbation du public est très importante pour nous car on ne change pas le monde sans le monde", apprécie Loriane Roques, à l'origine du projet. Changer le monde, c'est bien là l'intention de ces six copines souhaitant créer le premier institut territorial des transformations publiques du département, "une référence locale en matière d'accompagnement des politiques publiques". "Notre but c'est d'impulser des changements profonds en ne faisant pas uniquement du politiquement correct", prévient Laura Bouchet, recrutée en qualité de juriste pour "sécuriser les projets" sur un plan financier et juridique. Et la trentenaire d'ajouter : "D'avoir décroché un prix avec cette posture là, c'est aussi audacieux de la part du jury qui représente les pouvoirs publics et aurait pu se montrer réticent."

"On l'a pris comme un challenge"

Soigner la fracture sociétale en nous reliant les uns aux autres, développer une forme de justice sociale et plaider pour l'égalité des chances sont autant d'objectifs poursuivis par la bande de La grande bobine qui fonctionne sur le modèle d'une société coopérative et participative (SCOP). "Ça signifie qu'on est toutes salariées, payées au même niveau et que notre voix compte à la même hauteur que celles des autres", explique Laura Bouchet. Quant au nom du projet, "on ne s'est pas cassée la tête", souffle la juriste de l'équipe. "Sophie et Emma avaient une agence de design social qui s'appelait La bobine. On a juste capitalisé dessus (rires).

"Le concours Alès Audace, on l'a pris comme un challenge après être tombées sur un panneau d'annonce", se souvient la cheffe de projet. Et d'enfoncer : "C'était symbolique pour nous, un moyen d'acter le lancement de notre SCOP." C'est depuis l'espace de coworking Le Spot à Nîmes, dans lequel elles se sentent si bien, que les filles de La grande bobine réunissent leurs compétences très variées. Comme ce vendredi à l'occasion de notre rencontre lorsque Marion, vidéaste et photographe, assurait le tournage d'une web-série destinée à valoriser les actions du plan départemental d'insertion, mettant en scène des professionnels et des bénéficiaires du RSA.

D'autres actions significatives sont à mettre au crédit de la team "Grande bobine" qui entend réformer le monde de l'entreprise, en instaurant pourquoi pas le temps plein à 32 heures pour "avoir une vie et être efficace en faisant du bon travail". Sur le bassin d'Alès Agglomération où "tout le monde se connaît" et les pouvoirs publics sont "souvent précurseurs sur pas mal de sujets", les jeunes femmes y entrevoient une marge de manœuvre plus large qu'à Nîmes. "À Alès, il y a un vrai terreau fertile", complète Laura Bouchet.

La mobilité, principal frein à l'emploi

Ainsi, La grande bobine collabore avec la Mission locale alésienne , œuvrant notamment à l'élaboration d'un programme de remobilisation à destination des jeunes décrocheurs. Une fois encore, les six cofondatrices appliquent des méthodes innovantes. Outre la co-construction de la démarche avec les principaux concernés, il s'agit de faire en sorte que ces derniers soient rémunérés pour leur participation aux ateliers. "C'était un peu irrespectueux de ne pas les payer dans la mesure où se sont justement des personnes qui cherchent à valoriser leur temps", justifie Loriane Roques, heureuse de constater que les jeunes se sont montrés par conséquent "plus actifs". 

En plus de turbiner sur l'inclusion des travailleurs handicapés dans les structures d'insertion par l'activité économique du département, la SCOP, amenée à "grossir" avec "de nouveaux salariés", est chargée de faire éclore un tiers-lieu culturel à Saint-Christol-lez-Alès dans les mois prochains, investissant une ancienne maison de maitre laissée à l'abandon. "C'est un lieu qui réunira plein de fonctionnalités différentes mais complémentaires, qui vont dynamiser le territoire", assure la cheffe de projet, indiquant que ces structures sont "de plus en plus à la mode" à l'heure où "les travailleurs indépendants représentent 20% de la population active".

Parce que les idées fusent dans sa tête à la vitesse de l'éclair, Loriane Roques sait déjà quelle sera l'une des prochaines priorités de la SCOP. "On sait que la mobilité est le frein principal en matière d'accès à l'emploi. S'il faut payer le permis et une voiture aux jeunes pour qu'ils aillent travailler, alors faisons le !" Si l'idée peut paraître illusoire sur le papier, "nous ne sommes pas folles", promet la dernière nommée. Et de conclure : "À long terme ça couterait moins cher à l'État que de distribuer des allocations chômage ou le RSA. Ça prendra six mois, un an ou deux ans, mais les résultats de l'expérimentation montreront qu'on avait raison !"

Corentin Migoule

Corentin Migoule

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