La Fédération des mosquées de la vallée du Rhône vient de voir le jour dans le Gard rhodanien et le sud de la Drôme. Le but ? « S’occuper des besoins et des préoccupations des musulmans au niveau local », avance son président Yassine Taleb.
Le Spiripontain, vice-président de l’association culturelle musulmane qui gère la mosquée de Pont-Saint-Esprit, a été à l’initiative de la création de cette fédération, qui regroupe aujourd’hui les deux mosquées de Bagnols, et celles de Pont-Saint-Esprit, Roquemaure, Pierrette (Drôme) et prochainement celle d’Uzès. L’idée est de représenter les musulmans localement. « Les musulmans se font marteler à longueur de temps et sont représentés par des personnes qui ne les représentent pas vraiment », tonne Yassine Taleb.
« Le CFCM (le Conseil français du culte musulman, NDLR) est un organe mort, estime pour sa part l'imam de la mosquée de Bagnols et vice-président de la fédération Mahjoub Mahjoubi. Nous sommes plus de 6 millions de musulmans en France, mais on ne sait pas qui nous représente, ni comment ces personnes sont choisies et quels intérêts elles défendent. » Et ce alors que, rappelle Yassine Taleb, « l’Islam n’est absolument pas incompatible avec les lois de la République, l’écrasante majorité des musulmans respecte les lois. » Alors pour les représenter au niveau local : « Il faut être crédible, cette fédération représente 2 000 à 3 000 fidèles, nous sommes bénévoles et nous connaissons les besoins de la population », affirme-t-il.
"On a du pain sur la planche"
L’idée est aussi de défendre les musulmans face à ce que Yassine Taleb qualifie « d’islamophobie décomplexée. » « La société est fracturée, ajoute Mahjoub Mahjoubi. Des choses me font penser à des périodes noires de l’histoire. On cherche des boucs émissaires sur tout. Par exemple, quand il n’y a plus d’huile dans les magasins, on dit que c’est la faute de l’Aïd… » Sans parler de leurs « soeurs qui se font arracher le foulard. » Un malaise que la fédération veut exprimer. « 80 % des musulmans sont français, ils défendraient ce pays en cas de problème, ils contribuent à la société, je suis chef d’entreprise, je paie plus de 80 000 euros de cotisations sociales par an, je créé de l’emploi, mes parents ont contribué à reconstruire la France et touchent des toutes petites retraites », énumère l’imam de la mosquée de Bagnols. Bref, « avec la fédération, on sait qu’on a du pain sur la planche », reprend-t-il. Pour autant, nulle intention de supplanter le Conseil départemental du culte musulman. « La fédération vient en complément, pour répondre à des projets locaux », note Yassine Taleb. Parmi ces projets, celui d’un abattoir, pour le sacrifice du mouton à l’Aïd mais pas que... « Ce ne serait pas un abattoir que pour les musulmans », affirme Yassine Taleb.
Autre dossier sensible : les cimetières. « La crise covid a montré le besoin réel d’enterrer les morts dans la dignité, aujourd’hui dans certaines villes on se bat pour avoir un carré musulman », explique Mahjoub Mahjoubi. C’est le cas à Pont-Saint-Esprit où la communauté discute avec la mairie, mais où le carré musulman fait cruellement défaut. La fédération veut également oeuvrer pour la mise en place d’une école, « dans les lois de la République, pour enseigner notre culture et nos traditions », poursuit le président de la fédération. Il s’agit « de soutien scolaire et d’enseignement de l’arabe, pas plus », précise l’imam de Bagnols. « On ne demande pas de passe-droits, juste nos droits », résume Yassine Taleb.
Thierry ALLARD