Inscrite au calendrier de la 9e édition du festival "Dans les bras du Rhône", la visite de la passe à poissons de dernière génération en cours de construction à Beaucaire, a suscité la curiosité d'une dizaine de personnes, accueillies par les équipes de la Compagnie nationale du Rhône (CNR), de l'association Migrateurs Rhône Méditérranée et de NGE TMF en charge du chantier. Situé à l’aval du barrage de Vallabrègues, le seuil constitue la première porte d’entrée sur le Rhône vis-à-vis de la continuité piscicole. Son franchissement représente un enjeu majeur pour les grands migrateurs — tels que l’alose feinte de Méditerranée, l’anguille européenne ou la lamproie marine — ainsi que pour les espèces d’eau douce typiques du fleuve, comme la brème, le gardon ou l’ablette.
Ces poissons, « beaucoup moins athlétiques que les saumons », cite en exemple Romain Brusson, ingénieur Environnement à la CNR, nécessitent des aménagements adaptés pour remonter le cours d’eau. Le site dispose déjà d’une passe à poissons sur le parement aval de la rive droite, et une seconde est actuellement en construction sur la rive gauche. Des installations qui permettent d’assurer la libre circulation des poissons sur le Rhône ainsi que sur plusieurs affluents : le Gardon, la Durance, l’Ouvèze et la Cèze, l’Ardèche...
Cette passe à poissons*, en complément de la première, réalisée en 2001 pour les mêmes espèces (passe en enrochements à deux bassins créant trois niveaux de franchissement), répond à de nouveaux besoins identifiés à la suite d'études menées en continu, en tenant compte des composantes hydrologiques du cours d'eau ainsi que des composants biologiques des poissons. Un suivi notamment assuré par Migrateurs Rhône Méditérranée, qui permet de faire évoluer les connaissances et d'adapter les aménagements au fil du temps. L'association basée à Arles, avait ciblé des problèmes de continuité sur ce site, notamment liés à l'augmentation des débits réservés de la concession de Vallabrègues au 1er janvier 2014 ( de 10 à 84m3/s). "La passe à poissons actuelle n'était plus dimensionnée pour ces nouveaux débits, ce qui nous a fait retravailler le sujet de continuité piscicole avec notre Direction de l’ingénierie CNR, d'abord sur la passe à poissons de Comps, dans le Gardon, et maintenant à Beaucaire", explique Romain Brusson.
Il s'agit d'une passe à macro-rugosité constituée de trois rampes légèrement inclinées, dimensionnée de manière à être compatible avec la capacité de nage des poissons et les conditions hydrauliques durant les périodes de migration. "Cet ouvrage étant long — près de 100 mètres, NDLR — deux bassins de repos ont été créés", précise Arnauld Caumartin, responsable d'exploitation chez NGE TMF. Le déroulement du chantier, conditionné à une autorisation préfectorale, a débuté en octobre 2024 sur l'île de la Barthelasse à Beaucaire. "La première phase du chantier a consisté au terrassement des surfaces — installations de chantier et emprise foncière dédiée à la construction de l'ouvrage — pour pouvoir mettre au clair les zones, ce qui signifie déboiser, défricher et retirer les espèces végétales invasives." En fin de travaux, les zones restituées seront également replantées. Les arbres utilisés seront issus d'une filière labellisée Végétal local.
La construction de la passe à poissons a démarré en janvier 2025. Un travail en fondations profondes et en bord de berge du seuil, nécessitant des réunions quotidiennes de sécurité sur site pour les équipes à l'oeuvre, dont des plongeurs ; ainsi qu'une grande vigilance opérationnelle. "En fond de passe, par exemple, on travaille sur un coulage de béton immergé de faible épaisseur, à 8 mètres de profondeur. On est sur une technicité de mise en oeuvre et de choix de formulation du béton très pointus", précise Arnauld Caumartin.
Coût de l'opération : environ 5M€
L'ouvrage, dont le coût s'élève à près de 5 M€, cofinancé par la CNR et l’Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse, sera mis en eau en novembre 2025. Pour vérifier la fonctionnalité de cette passe à poissons, des antennes ont été installées à l'intérieur afin de contrôler le passage des différentes espèces.
*À l'échelle du Rhône, la CNR gère 70 passes à poissons
