NÎMES Les traces d’un protestantisme actif

L'intérieur de l'ancien Temple de la Calade à Nîmes (Photo Anthony Maurin)
Nîmes est un des grands pôles du protestantisme dès le XVIe siècle ; les temples nombreux, sont d’anciens édifices catholiques réutilisés, après le Concordat et encore en usage aujourd’hui.
« Cette ville, que certains se plaisent à appeler « la Rome française » à cause de la beauté de ses monuments antiques, est aussi, comme Genève, une Rome protestante, une métropole de la spiritualité huguenote », notait le grand André Chamson dans la France Protestante. Nîmes n’est pas Rome ! Ici, la chrétienté s’est violemment scindée.
En 1561, le réformateur Pierre Viret célèbre le culte de Noël dans la cathédrale Saint-Castor qui sera le premier lieu de culte des réformés. Le 15 janvier 1562 a lieu un culte officiel des réformés avec 8 000 communiants. L’intérieur de la cathédrale est alors réaménagé pour les protestants qui abaissent la chaire, installent des bancs et un parquet.
Démolie deux fois au cours des guerres de religion, la cathédrale sera rebâtie en 1646. À la Révocation, de nombreux huguenots seront exécutés devant la cathédrale. De cet édifice subsistent la tour, les mâchicoulis du XIVe siècle, le clocher du XVe siècle.
Charles IX et sa mère Catherine de Médicis passent à Nîmes en 1565. Les députés réformés présentent leur cahier de doléances. Charles IX accorde deux terrains pour construire le temple de la Calade.
L’édifice est un grand rectangle de 30 mètres de long sur 48 mètres de large, conçu pour 5 000 fidèles. Il ouvre sur la place de la Calade par une grande porte, seul vestige de l’ancien temple.
Au-dessus de cette porte figurait, une inscription dans la pierre « C’est ici la maison de Dieu, c’est ici la porte des cieux ». Effacée en 1795, elle sera reproduite au tympan du petit temple, ancienne chapelle des Célestins, affectée au culte en 1793.
À l’intérieur, des galeries sont soutenues par des voûtes en arceau comme aux temples de Vialas et de Collet-de-Dèze. En 1601, une poutre du temple de la Calade semblant prête à céder, un second temple est construit. Édifié en 1610, le petit temple Saint-Marc était situé dans la Grand-rue, face à la rue Trélis. Il sera démoli en 1663.
Il fut l’un des plus grands de son temps. Son porche qui ouvrait sur un couloir débouchant à l’intérieur de ce lieu de culte a vu passer les principaux membres de l’Église réformée de la ville. La qualité de sa construction initiale, en tout cas de sa façade, lui a permis de traverser le temps. C’est sans doute un des lieux les plus denses, mais aussi les plus méconnus de la mémoire protestante nîmoise.
En 1685, le temple est démantelé à la révocation de l’édit de Nantes. Les pierres des ruines sont utilisées au XVIIIe siècle par des religieux pour construire une école. Ils remploient la porte d’entrée. La cloche est vendue 1 000 livres à la commune voisine de Calvisson (toujours à la mairie de cette commune).
Au cours du XVIIIe, bien des jeunes filles protestantes ont été contraintes à la conversion par les Ursulines dans la chapelle et le couvent construits entre 1714 et 1718. À la Révolution, la chapelle et le couvent des Ursulines sont vendus comme biens nationaux. La chapelle est acquise par un protestant. C’est le futur Petit Temple.
Mais, dès 1787, grâce à l’intervention de Rabaud Saint-Étienne, la liberté de conscience est rétablie. On ne parle pas assez de lui mais quelle personnalité incroyable dont les propos ont, aujourd’hui, autant de résonance qu’à cette époque…
Il faudra attendre 1787 puis l’intervention de Rabaud Saint-Étienne qui travaille au rétablissement de la liberté de conscience. On ne parle pas assez de lui, mais quelle personnalité incroyable dont les propos ont, aujourd’hui, autant de résonance qu’à cette époque…
À la Révolution, la chapelle et le couvent des Ursulines sont vendus comme biens nationaux. La chapelle est acquise par un protestant. D’abord prêtée au culte, elle devient propriété de la communauté réformée en 1831.
Pour le Grand Temple, il faudra attendre 179. La communauté louait alors la chapelle du couvent que les Dominicains avaient fait construire en 1714 sur les ruines du château royal et dans le style baroque. Devenue bien national sous la Révolution, la chapelle sera acquise lors d’une vente aux enchères en 1803 par le consistoire réformé de Nîmes. La façade actuelle date de 1843.
Petit temple, grand temple, oratoire, maison de santé, cimetière privé… Le protestantisme fait partie de l’histoire de la cité d’hier et d’aujourd’hui.
Bibliographie :
DUBIEF Henri et POUJOL Jacques, La France protestante, Histoire et Lieux de mémoire, Max Chaleil éditeur, Montpellier, 1992, rééd. 2006, p. 450.
LAURENT René, Promenade à travers les temples de France, Les Presses du Languedoc, Millau, 1996, p. 520.
REYMOND Bernard, L’architecture religieuse des protestants, Labor et Fides, Genève, 1996.