Même les humoristes ne l’avaient pas vu venir ! En quelques heures, Sébastien Lecornu a d’abord présenté son gouvernement, avant de remettre sa démission. Il aura suffi d’un post sur X du président des Républicains, Bruno Retailleau, pour déclencher une nouvelle crise politique. Dans cette atmosphère à la fois burlesque et affligeante, le président de la République a laissé jusqu’à mercredi pour trouver une issue. Vu du Gard, la situation peut prêter à sourire. Pourtant, sur le terrain, certains acteurs ne cachent pas leur inquiétude.
Industrie et viticulture en souffrance
Pour les agriculteurs, la série noire continue. « Depuis quelques années déjà, nous traversons une grave crise : baisse de la consommation, hausse des droits de douane aux États-Unis… », rappelle Bernard Angelras, élu nîmois et président de l’Institut français de la vigne et du vin. Et de constater : « La récolte 2025 a été la plus faible jamais enregistrée dans le Gard, avec seulement 2,2 millions d’hectolitres. » Annie Genevard, ministre de l’Agriculture nommée en 2024, avait demandé à Bruxelles « un fonds de crise de 200 M€, ainsi qu’un nouveau plan d’arrachage. Mais sans ministre pour suivre les dossiers, c’est beaucoup plus compliqué », poursuit-il. D'autant que la PAC (Politique agricole commune) est en pleine renégociation : « Cette instabilité empêche la France de faire entendre sa voix pour défendre notre souveraineté alimentaire. »
Côté industriel, même constat. Alors que l’attention est monopolisée par l’absence de gouvernement et les querelles politiciennes, « les combats des salariés dans des entreprises comme la verrerie de Vergèze passent à la trappe », déplore la sénatrice Vivette Lopez. Une réalité difficile pour le Gard, sixième département le plus pauvre de France, confronté au déclin de l’industrie depuis les années 70.
Mairies : des dossiers à l’arrêt
D’autres acteurs gardois font les frais des soubresauts gouvernementaux : les élus. « Heureusement que cet épisode n’a pas eu lieu lors de la négociation pour la police des transports », soupire une source à l’Agglo. Toutefois, Nîmes métropole s’interroge sur l’élaboration du budget 2026 : « On ne sait pas à quelle sauce nous allons être mangés. » À Clarensac, au fond de la Vaunage, le maire Patrick Gervais attend « depuis deux ans » que sa commune passe du classement B2 à B1 pour faciliter la construction de logements, notamment sociaux. « Comme tout le monde, on suit les tartufferies… Mais forcément, ça nous pénalise. »
À Caissargues, le maire Olivier Fabregoul doit composer avec deux problématiques gelées : « D’abord, nos aides de l’État, qui doivent être révisées puisque nous n’avons plus les recettes fiscales de la zone d’activité économique reversées à l’Agglo. » La commune touche 63 € par habitant, quand Rodilhan en reçoit 129 €. « Ce rééquilibrage nous permettrait de retrouver des marges de manœuvre financières », insiste-t-il. Mais sans gouvernement, pas de réforme… Même chose pour le dossier du forage militaire, qui bloque la construction de logements sociaux. « Il faut un ministre des Armées stable, capable de prendre des décisions dans le temps long. » La stabilité, on l'a compris : ce ne sera pas pour tout de suite.