Publié il y a 1 h - Mise à jour le 15.08.2025 - Yannick Pons - 4 min  - vu 35 fois

FAIT DU SOIR Entre mer et marais, l’identité camarguaise cultive les racines du goût

Au mois de juillet, une journée a été consacrée aux produits sous indication géographique de Camargue. Trois IGP-AOP emblématiques de la Camargue gardoise, le sel, le riz et la viande de taureau, ont été mises en avant par les grands chefs gardois. Ces filières, porteuses d'une identité forte, sont aussi les actrices d'une économie résiliente et durable.

Une manière de rappeler que la Camargue n'est pas qu'un décor naturel, mais un espace agricole vivant, productif et riche d'un savoir-faire ancestral.

Triptyque d'excellence locale

À Aigues-Mortes, la récolte de la fleur de sel a commencé cette année le 1er juillet, quinze jours en avance sur le calendrier de l’année dernière. Même si cela paraît étrange pour un produit minéral, cette première cueillette sera certifiée bio et marque l’entrée des Salins du Midi dans le groupement des IGP du territoire.

À leur initiative, une journée a été consacrée aux produits sous indication géographique de Camargue. Trois IGP-AOP ont été mises à l’honneur : la viande de taureau, le riz et le sel. « L’idée est née en 2024, lorsque nous avons obtenu notre propre IGP », explique Franck Heurtebise, directeur commercial et marketing des Salins du Midi depuis 37 ans.

Derrière cette vitrine gourmande, l'enjeu est bien plus vaste. « Il faut défendre la Camargue, sa singularité, son économie, ses familles », plaide Franck Heurtebise. Face aux risques climatiques, à la montée des eaux de la mer et à l'érosion du trait de côte, les produits sous IGP sont autant de preuves tangibles de l'utilité de ce territoire.

Bertrand Mazel, président des syndicats français et européen de riziculture. • Photo Yannick Pons

Car ici, ce n'est pas du folklore. Riziculteurs, manadiers et sauniers incarnent une activité agricole essentielle, qui structure le paysage et l'emploi local, mais préserve également cet environnement sauvage.

Sel, viande et riz

La récolte de la fleur de sel mobilise chaque été des gestes hérités des anciens. Sur huit semaines, dans un ballet blanc et cristallin, la fleur de sel se forme à la surface des bassins, récoltée à la main selon un savoir-faire préservé. IGP depuis 2024, ce sel marin incarne l'identité d'un territoire dans lequel le vent, le soleil et l'homme conjuguent leurs forces afin de produire un ingrédient de caractère, prisé par les plus grands chefs.

Thierry Teyssier, à la tête de la manade de la Vidoulenque, élève 109 taureaux avec sa fille pour la course camarguaise • Photo Yannick Pons

Déjà reconnue en AOC dès 1996, la viande de taureau de Camargue obtient l'AOP européenne en 2011. Issue de races rustiques, le Biòu et le Brave, élevées en plein air dans les marais, elle est le fruit d'une tradition pastorale unique. Les taureaux destinés à la course camarguaise vivent entre 7 et 15 ans, avant d'être valorisés en viande. Depuis 2025, l'AOP a également fait son entrée au Concours Général Agricole, au sein duquel elle a remporté ses premières médailles. Thierry Teyssier, à la tête de la manade de la Vidoulenque à Saint-Laurent-d'Aigouze, élève 109 taureaux avec sa fille pour la course camarguaise, au cœur de la garrigue gardoise, hors des sentiers traditionnels de l’élevage.

Annabelle Santucci cultive du riz sur les terres marécageuses de Saint-Gilles, route des Iscles • Photo Yannick Pons

Cultivé depuis le XVIe siècle, le riz de Camargue est devenu une production phare après la Seconde Guerre mondiale. Créant l'IGP en 2000, il est aujourd'hui cultivé sur 150 exploitations, dont un tiers en Camargue gardoise. Il joue un rôle crucial dans la désalinisation des sols, grâce à l'injection annuelle de 500 millions de m³ d'eau douce. 

Les artisans du terroir camarguais autour de Magali Saumade, présidente de la Chambre d'agriculture du Gard • Photo Yannick Pons

Annabelle Santucci cultive du riz IGP de Camargue avec son mari sur les terres marécageuses de Saint-Gilles, route des Iscles, où elle défend une agriculture respectueuse et diversifiée, attachée au goût et à l’origine du produit. Cette culture, exigeante, mais adaptée au terroir, participe à la biodiversité du delta du Rhône. Avec 50 variétés cultivées localement, le riz camarguais conjugue diversité, qualité et savoir-faire.

Quelques chefs gardois de l'association Gard aux chefs • Photo Yannick Pons

Gard aux chefs

Trois produits, une même ambition, faire de la Camargue une terre reconnue, valorisée et protégée. Grâce à ces IGP et AOP, la région affirme sa place dans le paysage agricole français et européen, tout en défendant une identité forte, entre nature, culture et agriculture.

Michel Benet • Photo Yannick Pons

À l'image de Michel Benet, les chefs gardois de Gard aux chefs subliment avec audace ces trois produits du terroir, notamment en mêlant des accords terre-mer, propres à ce département. Tartare de taureau aux huîtres, gardiane servie avec des anchois… Le riz de Camargue inspire également les cuistos gardois. Chips de galettes de riz, risotto aux fruits de mer ou riz noir au citron.

Vincent Vergne, meilleur ouvrier de France fromager 2019 • Photo Yannick Pons

En dessert, le riz de Camargue se prête à toutes les audaces, de l’arancini sucré garni de ganache gianduja et relevé de fleur de sel, à la fameuse fougasse d’Aigues-Mortes revisitée par une espuma au yaourt fleur d’oranger et une tuile de caramel au riz, sans oublier les fraises du Gard accompagnées de glace vanille-caramel, fleur de sel et riz soufflé. 

Les plats IGP des chefs gardois

Tartare de taureau aux huîtres sur une tartine grillée (Jerôme Nutile MOF)

Une brandade de morue à ma façon (Michel Benet)

Effiloché de morue, roseline d'aïoli et fleur de sel au piment d'Espelette (Jerôme Nutile MOF)

Carpaccio de taureau mariné, (Serge Chenet MOF)

Petit craquant de carotte des sables, poivron doux et riz noir soufflé (Michel Benet) Focaccia au thym rafraîchi d'une moule cuite façon marinière (Damien Sanchez)

Servi dans sa meule de parmesan

Petit risotto de riz complet de Camargue aux fruits de mer (Damien Sanchez)

Risotto de riz noir au citron (Serge Chenet MOF)

La dorade du Grau du Roi cuite en croûte de sel (Jerôme Nutile MOF)

Ravioli de joue de taureau confite relevé de fondue de tomate (Damien Sanchez)

Langue de boeuf braisée basse température (Michel Michel Benet)

Bao d'estouffade de taureau, jus de viande naturel (Maxime Chenet).

Côte de taureau marinée aux épices et grillée (Serge Chenet MOF)

Le site internet des chefs ici

Yannick Pons

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