LE GARD MÉCONNU La communauté Quaker de Congénies
Tout l’été, Objectif Gard vous emmène à la découverte du Gard, mais sous un autre angle. Au-delà des célèbres Pont du Gard, arènes de Nîmes ou duché d’Uzès, notre département regorge de pépites méconnues. Cette semaine nous vous entraînons à la découverte du village de Congénies qui possède un des patrimoines les plus singuliers du Pays Vidourle-Camargue : une maison et un cimetière Quaker...
Lové au cœur de la Vaunage et au bord de la voie verte, le village de Congénies se situe à 7 kilomètres à l'est de la cité médiévale de Sommières. Cette bucolique petite commune de 1616 âmes possède la particularité d'abriter l'unique cimetière de France de la communauté religieuse des Quakers (*).
Au mitan des années 1700, Congénies et les villages à l'entour rassemblaient une communauté de protestants pacifistes, localement désignés du nom de "Couflaïres" (inspirés). Les habitants de Congénies partageaient avec les Quakers anglais une pratique intense de leur religion avec laquelle il y avait de nombreuses similitudes et analogies dues à la clandestinité et à la discrétion où avait été cantonné le protestantisme durant plusieurs générations (rassemblements silencieux, lecture de la Bible, refus de la violence, etc.).
Lieu de recueillement et de prières, la maison quaker fut construite en 1822. Via des échanges épistolaires, un protestant du village, Jean de Marcillac, était entré en contact avec un armateur quaker anglais, Mister Fox, qui avait écrit un article dans la Gazette de France, le 25 février 1785. Les deux hommes avaient sympathisé et des liens s'étaient crées entre les deux communautés. Au point que des sujets Anglais s'étaient installés définitivement à Congénies et y avait bâti un temple quaker et son cimetière attenant.
Le monument cultuel est situé à la sortie du village en surplomb de la route de Nîmes, rebaptisée depuis "Avenue des Quakers". Ce temple restera en fonction jusqu'en 1907. Au début du XIXe siècle, on recensait 33 familles quakers à Congénies, soit environ 90 membres, et à peu près 130 personnes originaires de bourgs des alentours, de Quissac à Saint Gilles. Au cours du XXe siècle l'édifice fut transformé en hôpital militaire destiné à accueillir les blessés de la guerre de 1914-18, avant d'être par la suite réhabilité en maison d'habitation, en 1954.
Après avoir servi de...dépôt de munitions pour l'armée allemande durant la guerre de 39-45, au même titre que la maison, le cimetière appartient depuis 2003 à une association quaker (Assemblée de France de la Société religieuse des Amis) et il est entretenu et préservé par des Quakers anglais. Il abrite une cinquantaine de tombes et présente l'aspect habituel des cimetière anglo-saxons avec, en guise de stèle, de simples pierres plantées dans le sol qui marquent l'emplacement des sépultures. Depuis quelques années, la maison Quaker a retrouvé quant à elle sa vocation originelle en accueillant à nouveau des membres de la communauté locale mais aussi internationale.
Philippe GAVILLET de PENEY
philippe@objectifgard.com
(*) Le mouvement Quaker (trembleur, en Anglais) fut fondé en 1682 par William Penn, aux Etats Unis d'Amérique puis en Angleterre aux 17e et 18e siècles. Il émergea en Angleterre durant les turbulences religieuses et politiques que connut la Grande-Bretagne dans les années 1640. Les Quakers pensent que chacun peut ressentir la connaissance directe de Dieu et n'a nul besoin de prêtre comme intermédiaire. Le quakerisme trouve ses racines dans la chrétienté, et les enseignements de Jésus sont très importants pour la grande majorité des Amis, comme se désignent eux-mêmes les pratiquants. Toutefois, les Quakers ont souvent recours à d'autres expressions, comme "la lumière intérieure", "l'étincelle divine", "la présence vivante", "la semence", etc.