PROFESSION DE L'ÉTÉ Pour le gardien de barrage Sébastien Pantel, fin d'été rime avec équinoxe

Sébadstien Panatel sur le balcon de la maison des gardiens, qui surplombe le barrage
- François DeslmeuresChaque lundi de l'été, Objectif Gard & Arles vous propose une série de portraits de professions de l'été. Pour cet épisode, le sujet est un peu maltraité, reconnaissons-le. Car la profession de barragiste, ou gardien de barrage, est permanente et ne se limite pas à l'été. Mais c'est en fin d'été que la tension peut monter, en même temps que le niveau du cours d'eau...
Ils sont six barragistes au Département. Non pas qu'ils leur manque deux matchs avant de passer en division supérieure... "Barragiste" est l'autre nom donné aux gardiens de barrage. "Moi, je suis sur le secteur Sainte-Cécile-d'Andorge - les Cambous, il y en sur Sénéchas et sur le secteur du Vidourle", explique Sébastien Pantel du haut de son mètre quatre-vingt-dix.
"Au minimum, on passe une à deux fois par semaine dans les ouvrages, explique Sébastien. On a des tournées hebdomadaires à réaliser, et des tournées mensuelles." Le tout en fonction de ce qui est à contrôler sur cet ouvrage mis en service en février 1967, et qui va bientôt recevoir d'importants travaux (relire ici). "On regarde surtout ce qui relève de la maintenance de l'ouvrage : l'état des pompes, les vannes, si le béton n'a pas d'usure, l'état des batardeaux, etc. On effectue aussi des opérations de débroussaillage sur le site. Et entre 20 et 25 contrôles sont à faire chaque année, certains deux fois par an."
En équipement, "on n'a que du portatif, poursuit Sébastien Pantel. Si une pompe lâche, on la remplace à l'identique, on doit aussi les nettoyer. L'entretien cible les pannes : on peut aussi avoir à remplacer un nanomètre. On a une simple remorque, pour transporter des gravats, et un bateau à moteur si on doit intervenir sur le lac. Si on ajoute toutes les maintenances, on n'a pas beaucoup de temps libre pour les imprévus", sourit le gardien. Tronçonneuse et débroussailleuse sont aussi à disposition pour les chantiers sur les berges, notamment ceux qui évitent d'ajouter des embâcles au lac. Le tout étant stocké dans une maison qui surplombe le barrage, et dispose de sa propre échelle pour atteindre le sommet de l'ouvrage, hors eau qui aurait éventuellement déjà débordé sur la route.
L'opportunité d'être barragiste s'est présentée en devenant agent du Département. "Au départ, j'étais chaudronnier. Puis, je suis rentré par les routes et la direction départementale de l'équipement." En 2006, suite à une loi de décentralisation, les départements récupèrent la gestion des routes départementales, et les agents qui vont avec. De la fonction publique d'État, Sébastien Pantel bifurque vers la territoriale. S'il n'existe pas d'école de barragistes, il est nécessaire "d'être polyvalent. On sait que chaque journée va être différente."
En 2008, un poste se libère. "J'ai postulé, ai été pris, et j'ai eu droit à une formation d'un mois en école. Puis, on apprend sur le tas. D'ailleurs, sur le barrage de Sainte-Cécile, je suis calé, alors que, sur les autres, j'en apprends tous les jours." Sébastien Pantel a aussi pour lui d'être un enfants du pays, originaire de Branoux-les-Taillades. "Ce métier me plaît, et je suis content d'être ici", résume-t-il.
Depuis son retour de vacances, le barragiste est à nouveau sur le pont. C'est que la période au potentiel le plus agité va débuter. "Le service des barrages comprend des astreintes toute l'année. Mais autour de l'équinoxe, on est deux, du vendredi soir au lundi matin, pour cinq à sept week-ends. Et, en semaine, on met une personne d'astreinte sur site en fonction des bulletins météo. On n'a aucun souci à trouver des volontaires."
Pourtant, on suppose qu'au cours d'un épisode cévenol, descendre de la maison de gardiennage et rentrer dans le barrage doit donner quelques émotions. "Un deuxième barragiste peut venir. Un reste en observation à la maison, l'autre va faire des constatations sur place. On rentre dans le barrage, on vérifie les drains, on s'assure que le réseau d'alerte des sept sirènes fonctionne bien." Un réseau qui couvre les communes jusqu'à L'Habitarelle. "La prévention va jusqu'à Saint-Christol-lès-Alès, en lien avec des habitants consignés sur une liste. On fait un test tous les premiers mercredis du mois, en appelant 80 citoyens dans une liste de 150."
Si le barrage devait être plein, 15 millions de mètres cube d'eau seraient alors stockés. "Mais ce n'est jamais arrivé. C'est sûr que c'est toujours impressionnant. Quand on monte, on entend le chant de l'eau dans le barrage." Et en période de crue, il n'est pas exceptionnel de monter jusqu'à trois fois les plus de 200 marches dans le corps de l'ouvrage. Un vase clos où les téléphones portables ne passent pas. "Mais on va bientôt mettre la fibre", sourit Sébastien.
Et pour lui, il y a une différence entre impression et appréhension. Si l'épisode cévenol est impressionnant, "je n'ai pas de peur de rentrer dans le barrage. Il est sain. On l'ausculte souvent et on voit que le barrage réagit bien." Et les travaux visent à le renforcer encore, même si la crête du barrage ne sera plus accessible puisque elle devra accueillir le déversoir. "On ne pourra plus rentrer par là ni traverser la crête. On devra systématiquement passer par l'aval."
Mais pour l'instant, le Gardon est en étiage, à Sainte-Cécile aussi, laissant apparaître des berges couvertes du limon qui tapisse le fond de la retenue d'eau. "Cette année, on s'en est bien sorti, constate Sébastien Pantel en pensant aux sécheresses des années précédentes. L'an dernier, on avait dû baisser le niveau des Cambous. Mais cette année, on a pu fournir 250 litres d'eau par seconde pour soutenir l'étiage." Pourtant, les pluies attendues cette semaine seront les bienvenues. Parce qu'en plus de la maintenance, Sébastien Pantel et ses collègues barragistes surveillent aussi l'eau qui arrive dans le barrage. "Au 1er août, le barrage recevait 132 litres d'eau par seconde. Vendredi, on était à 85 litres par seconde." L'équinoxe est, finalement, peut-être moins redoutée que ce qu'elle est attendue...