ÉDITORIAL Au pays des Lumières, on ferme des médiathèques à cause des caïds
Tout fout le camp. Et la culture et l'éducation avec. Depuis plusieurs jours - et l'information a été confirmée directement au président de la République vendredi dernier lors de sa venue sur la base de la Sécurité civile -, la médiathèque Marc-Bernard est fermée jusqu'à nouvel ordre.
Je me souviens des mercredis matin de mon adolescence. Accompagnant ma mère faire ses emplettes à Pissevin dans ce grand marché populaire. Le temps de sa tournée hebdomadaire, un seul objectif m'animait : pénétrer dans la médiathèque Marc-Bernard pour lire le dernier numéro de Libération, du Monde, de Courrier International ou encore de Charlie Hebdo. Un temps de lecture pour un cerveau jeune et disponible prêt à recevoir un maximum d'informations et d'en apprendre sur le monde. Voyager loin, très loin de cette capitale gardoise pour découvrir la politique, l'économie, les us et coutumes des citoyens partout sur la planète. Depuis ce matin, et si j'avais encore 15 ans, je ne pourrais plus pousser la porte de ce lieu de culture et d'éducation. Pourquoi ? C'est le maire de Nîmes, Jean-Paul Fournier, qui a officialisé la mauvaise nouvelle hier après-midi par un communiqué. "Une terrible décision", comme il dit, mais avec le sentiment de ne plus avoir le choix. Des incidents graves, une situation de tension, des agents qui viennent travailler la peur au ventre. À cause de petits caïds. Des délinquants s’adonnant en toute impunité au trafic de stupéfiants à la vue de tous et en particulier des gamins qui voient leurs agissements en partant ou en revenant à l'école chaque matin et chaque soir. Depuis décembre dernier, des dealers qui vont jusqu'à exercer une pression de plus en plus forte sur le quartier avec l’instauration de "barricades/points de contrôle" pour encadrer leur commerce illicite, et ce, au droit de la médiathèque. Ainsi, depuis plusieurs mois, les 18 agents du centre culturel sont victimes de menaces et d’agressions verbales au vu et au su de tous. Des contrôles et de palpations en pleine rue avant d’accéder à leur poste de travail ? Comment est-ce possible ? Mais où est la police ? Elle est déjà là ! Elle est mobilisée, mais le mal est si profond qu'une seule police locale et nationale de Nîmes ne peut pas permettre un agent des forces de l'ordre derrière chaque individu menaçant. Alors que le quartier entame une révolution urbaine avec le nouveau plan NPRU, les trafiquants ne l'entendent pas de cette oreille. On fait quoi ? Une chose est sûre, il est temps d'arrêter de négocier. Stopper la culture et fermer un lieu éducatif à cause de quelques racailles, ce n'est plus possible. Dans le pays des Lumières, cela commence vraiment à faire tache... Et ce matin, au réveil, on se demande si le chef de l'État n'avait pas mieux à faire vendredi à Nîmes...
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