Publié il y a 6 h - Mise à jour le 19.05.2025 - François Desmeures - 4 min  - vu 64 fois

SAINT-FÉLIX-DE-PALLIÈRES Les ingénieurs de SystExt livrent cinq ans de travaux sur l'après-mine

Plus d'une centaine de personnes a assisté à la conférence sur l'après-mine, salle Pélico, à Anduze

- François Desmeures

Ils sont venus visiter la mine de Pallières dès 2020, en lien avec l'association qui documentait, déjà depuis six ans, la pollution des mines Umicore de Saint-Félix-de-Pallières et Thoiras, et s'intéresse désormais à celle de Durfort, ADAMVM. C'est à Anduze, samedi 17 mai, que les ingénieurs de SystExt (pour systèmes extractifs et environnements) sont venus livrer leur premier état des lieux de l'après-mine, avant deux autres conférences, à Paris, le 24 mai, puis Figeac le 14 juin. Un bilan national qui souligne les pollutions au niveau national mais n'a que peu zoomé sur le cas cévenol. 

Plus d'une centaine de personnes a assisté à la conférence sur l'après-mine, salle Pélico, à Anduze • François Desmeures

S'ils ont choisi les Cévennes pour déflorer le rapport qui ne sortira qu'en juin, à travers une conférence grand public samedi 17 mai, c'est que la relation est ancienne entre l'ADAMVM (association pour la dépollution des anciennes mines de la vieille montagne) et les ingénieurs géologues miniers, et bénévoles, de l'association. À Anduze, l'ingénieur Pierre Lebrou est revenu sur cinq ans de travaux qui, avant même qu'ils ne débutent et alors qu'une réforme du code minier s'annonçait, avaient valu à l'association une mention spéciale, catégorie Droits de l'Homme, remise par la République française. 

Une république qui n'est pas toujours cohérente sur sa façon de reconnaître les mérites des ingénieurs et de gérer l'après-mine, notamment à Saint-Félix-de-Pallières et Thoiras, le parcours judiciaire du dossier pouvant en attester (relire ici). Grâce à la tenacité d'ADAMVM, la digue a été confinée et un site dépollué, en fin d'année dernière (relire ici et ici). Mais les six titres miniers différents qui cohabitent sur site continuent de polluer la zone. 

"En 2020, notre association s'est engagée dans un projet d'après-mine, introduit Pierre Lebrou, ingénieur chez SystExt. Avec un triple objectif : permettre aux citoyens de s'exprimer, donner accès aux informations et émettre des propositions et recommandations par rapport à cette étude." Une étude qui devait, au départ, durer deux ans à Saint-Félix-de-Pallières, et s'est finalement étalée sur cinq ans. 

Pierre Lebrou, ingénieur géologue, a présenté une synthèse des travaux menés par SystExt depuis 5 ans • François Desmeures

Il faut dire que l'enquête était nationale. Entre 2020 et 2022, les ingénieurs géologues ont donc accumulé les visites de terrain, soit 59 sites miniers en France qui ont reçu leur visite. "On peut faire remonter l'exploitation minière aux Romains, au Moyen-Âge, rembobine Pierre Lebrou Mais c'est surtout à la fin du 19e siècle, avant la Première Guerre mondiale, qu'on en voit la plus grande variété. Après, le nombre de mines chute, même si la production, elle, a toujours augmenté."

"La valeur toxicologique de référence, c'est le principal indicateur dont on dispose. Mais il est très compliqué de savoir quels métaux sont toxiques ou pas."

Pierre Lebrou, ingénieur géologue chez SystExt

En France, quatorze métaux et un minéral - la pyrite - ont été exploités. Mais il existe, encore, "de nombreuses incertitudes et limites sur les éléments de toxicité, tempère Pierre Lebrou. La valeur toxicologique de référence, c'est le principal indicateur dont on dispose. Mais il est très compliqué de savoir quels métaux sont toxiques ou pas." À l'heure actuelle, dans le tableau de Mendeleïev, vingt-huit éléments sont retenus comme toxiques.

"On a aussi cherché quels éléments on retrouve autour des sites miniers", poursuit Pierre Lebrou devant plus de cent personnes réunies salle Pélico, à Anduze. Sans grande surprise, les ingénieurs ont fait face à "un cortège d'éléments chimiques présents". Sur une mine de plomb et zinc, comme le fut celle de Pallières, "on va avoir, en substances associées, du fer, de l'arsenic, de l'antimoine, de l'argent et du cuivre". Quatre étapes de production sont autant de sources potentielles de pollution : "l'exploitation, le traitement du minerai, la gestion des déchets et le transport des matériaux". Ces différentes phases laissent des traces de stériles miniers, de remblais miniers, qui se concentrent et se déversent dans les milieux aquatiques. 

Pendant les travaux de dépollution de la zone de l'Issart, en jnvier dernier • François Desmeures

"Ce qui inquiète le plus, ce sont les eaux minières : pour l'exploitation, les nappes phréatiques ont été assechées. Puis, on arrête le processus avec la fin de l'exploitation et la nappe remonte dans ce qui été abandonné". En se chargeant, au passage, de tous les éléments toxiques qui ont été nécessaires à l'exploitation. Quand la pollution est chariée par l'eau, qu'elle a participé à dissoudre les métaux, "les impacts se retrouvent très loin du site minier", constate Pierre Lebrou.

Par absorption, ces poussières ou métaux ont un impact sanitaire qui diffère "selon les métaux et les organes-cible. Par exemple, explique Pierre Lebrou, l'arsenic est facilement aspiré par le système respiratoire et donne lieu à des maladies de peau et du système nerveux. Le plomb s'attaque au système nerveux et à la moelle osseuse", jusqu'au saturnisme développé par certains enfants. Quant à l'information aux populations, "on assiste à une tendance à l'invisibilisation des traces matérielles et mémorielles. On a développé des usages sur les sites, des habitations, des lieux touristiques... Au jourd'hui, on assiste à une prise de conscience des enjeux. Mais la perception est assez variée face aux risques."

"L'État nous laisse nous dépêtrer"

Michel Sala, maire de Saint-Félix-de-Pallières

Et alors qu'il n'existe toujours pas de définition stricte du dommage minier, la caractérisation des sources de pollution reste essentielle, quand "les sites à étudier peuvent être étalés sur des dizaines de kilomètres. Ce qu'on peut faire, c'est confiner, éviter que cela se disperse dans l'environnement." Car, en cas de problème sanitaire, "il existe une complexité des démonstrations de causalité. Et il n'y a pas de suivi sanitaire des populations".

Ancien président d'ADAMVM et médécin généraliste en retraite, François Simon a aussi souligné, au cours du débat qui a suivi la conférence, que les préconisations aux populations étaient, elles-mêmes, fort réduites. "Les recommandations sont faibles au regard de la dangerosité des matériaux, a fait valoir l'habitant de Saint-Félix-de-Pallières. Il faut réduire l'exposition. Mais, à part pour le plomb, il n'existe pas de traitement contre l'arsenic et le cadmium..." Invité à réagir sur le volet judiciaire, le maire de Saint-Félix-de-Pallières, Michel Sala, s'est félicité "d'avoir pu responsabiliser le pollueur. Mais l'État nous laisse nous dépêtrer." Et ce n'est pas grâce à lui qu'Umicore a été rendu responsable de ses déchets (relire ici).

Le site des ingénieurs géologues qui ont travaillé sur le site de la mine de Thoiras et Saint-Félix-de-Pallières est a retrouver ici.

François Desmeures

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