Publié il y a 3 h - Mise à jour le 14.05.2025 - Propos recueillis par Corentin Dimanche - 6 min  - vu 629 fois

L'INTERVIEW Christian Cataldo : "L'hôpital d'Alès est aujourd'hui 10 % plus efficace que la moyenne nationale"

Christian Cataldo, directeur du Centre hospitalier Alès-Cévennes depuis le mois de mai 2024

- François Desmeures

Arrivé il y a un an à la tête du Centre hospitalier Alès-Cévennes, Christian Cataldo a donné un second souffle à cet établissement aussi essentiel qu'en déperdition avant sa prise de poste. Le directeur promet une fin de la régulation des urgences en 2026, signe de la bonne vitalité du centre et de ses employés, qui commencent à être à l'étroit.

Objectif Gard : Un an après votre arrivée à la direction de l'hôpital d'Alès, celui-ci semble bien mieux se porter. Les services et les lits ouvrent, les médecins arrivent et restent, les finances se portent bien... Comment avez-vous opéré ce redressement humain, financier et surtout médical ?

Christian Cataldo : Il a d'abord fallu retisser les liens avec les médecins, les organisations syndicales, le Groupement hospitalier territorial et les partenaires sociaux, sans qui on ne peut avancer. Nous avons un rôle d'hébergement, de soins et de formation envers la population à respecter, malgré les difficultés liées au manque de temps médical.

Je suis un défenseur du service public efficient. L'hôpital d'Alès est aujourd'hui 10 % plus efficace que la moyenne nationale. À fin mars 2025, l'activité a augmenté de 6,5 %, et les recettes de 14 %. Toutes les banques sont prêtes à nous accorder des prêts, nous sommes passés en catégorie 'A' à leurs yeux. Nous avons par ailleurs créé une fondation intitulée 'CHAC’un pour tous' afin de chercher des financements défiscalisés et avons déjà obtenu 5 000 € en dix jours grâce à cela. Des secteurs communication et culture ont aussi été créés pour mieux s'ouvrir sur la ville.

Les urgences connaissent malgré tout, encore et toujours, des temps compliqués avec des régulations fréquentes. Peut-on s'attendre à une amélioration dans les prochains mois ?

Tout à fait. En mai déjà, les régulations ont été divisées par deux. On pense pouvoir les supprimer quasi complètement dès la rentrée, grâce à du recrutement propre et du partage de temps médical avec les médecins juniors et en formation de Nîmes. Cela permettra aussi d'anticiper l'avenir en formant et préservant nos jeunes. Les régulations seront en tout cas pleinement supprimées dès l'année prochaine.

Entre 10 et 15 % de notre patientèle des urgences vient de la Lozère et de l'Ardèche, des territoires en difficulté sanitaire qui ne peuvent répondre à leurs demandes. Pour traiter ce problème en amont, désengorger les urgences d'Alès et maitriser le flux, on veut proposer des postes avancés. Une maison médicale de garde sera lancée d'ici à la fin d’année et marquera le début du projet des urgences redimensionnées. On veut y créer 20 lits ‘tampons’ multidisciplinaires supplémentaires, entre soins et unité d'hospitalisation de courte durée pour mieux orienter les patients. La deuxième ligne de SMUR rouvrira bientôt, avec comme objectif d'atteindre les effectifs cibles en avril prochain.

Où en sont les autres services spécialisés de l'hôpital à ce jour ?

On a rouvert la pneumologie il y a une quinzaine de jours, douze lits de chirurgie et gastroentérologie la semaine dernière et une dizaine en gériatrie, en attendant deux supplémentaires. On a par ailleurs créé le service de rhumatologie, renforcé la dermatologie, l'oncologie, la gastroentérologie, la chirurgie orthopédique et la gériatrie. Nous avons aussi reconstitué les lits de SSR (Soins de suite et de réadaptation, NDLR), on en vise 51 avant l'été et 53 à terme. La capacité d'accueil a aussi augmenté dans plusieurs services et un second IRM sera bientôt installé.

Christian Cataldo, directeur général de l'hôpital d'Alès et Christophe Rivenq, maire, ont dressé un bilan positif et prometteur.
Christian Cataldo, directeur général de l'hôpital d'Alès et Christophe Rivenq, maire, ont dressé un bilan positif et prometteur. • CD

En mai 2024, on comptait quatre gériatres. En novembre 2025, on en aura une dizaine grâce au chef de service, motivé à recruter par les projets engagés dans ce service. Les médecins eux-mêmes sont les premiers recruteurs de l'hôpital.

Six pneumologues ont aussi été recrutés alors qu'on n'en comptait aucun en 2024 et trois gynécologues arrivent pour reconstituer ce secteur assez fragile jusqu'alors, en plus d'une rhumatologue et d'un chef de clinique d'urologie. Un Centre d'accueil thérapeutique à temps partiel ainsi qu'une équipe mobile de pédopsychiatrie ont été mis sur pied, en attendant la création d'un service de périnatalité, ainsi qu'un appartement thérapeutique en psychiatrie adulte pour travailler la réinsertion.

Est-ce que ces ouvertures de lits et de services, ainsi que ces recrutements, suffisent à répondre aux besoins du bassin alésien en matière de santé ?

Malgré 28 lits ouverts en trois semaines, on est encore débordés et plein. On espère donc 12 lits supplémentaires de médecine courant été, mais même avec cela, il manquera toujours 30 lits de médecine et 25 lits de SSR. On a une belle équipe de huit cardiologues, mais il n'empêche qu'il faut un an pour obtenir un rendez-vous avec eux... Les sorties d'école permettront néanmoins de maintenir l'effectif pendant l'été. La pharmacie commence à être à l'étroit, l'hôpital en général commence à être trop petit. Le problème du manque de médecins est quasi résolu, mais ce qui pose désormais un problème pour le développement, ce sont l'infrastructure et les locaux.

Justement, où en sont les projets de travaux d'agrandissement ?

Les grandes lignes ont été validées en termes de volumétrie. À notre charge dorénavant de porter un projet architectural d'ici juillet afin de connaître une extension en trois ans. Cela nécessitera un investissement porté par l'hôpital et soutenu par l'ARS (projet hôpital 2030-2035 ci-dessous).

Comment parvenez-vous à fidéliser vos employés malgré la pression et le stress inhérents à leurs fonctions, en plus des conditions de travail souvent précaires dans les hôpitaux ?

Recruter c'est une chose, mais l'objectif, c'est aussi de conserver. Chaque départ entraîne une perte de compétences, de cohésion de temps et une formation. La direction travaille donc collectivement, d'une seule voix, pour mieux répondre aux demandes et offrir de meilleures conditions d'exercice. On compte mettre en place une politique de titularisation. Cela coûtera environ 250 000 € par an, mais il faut récompenser les efforts faits. Une micro-crèche devrait être développée en partenariat avec des acteurs locaux et une nouvelle semaine dédiée à la Qualité de vie et des conditions de travail se tiendra en juin. Je ne peux que me féliciter d'avoir une équipe de direction reconstituée à 100 %, dont un poste de chef de projet créé afin de mettre en place rapidement des projets. Dire 'oui' à un médecin pour ensuite lui dire d'attendre deux ans, ce n'est pas possible. On a mis en place et tenu les délais d'une centaine de projets à ce jour. Ici, les soignants se disent que les choses avancent.

Pour finir, où en est le CH de Ponteils, dont vous avez aussi la charge ?

On rouvre actuellement des lits et développe un plateau technique dans plusieurs disciplines. Pour mieux répondre aux besoins, on propose aussi des consultations de sages-femmes, de psychiatrie, de diététique et bientôt d'addictologie. L'équipe médicale se reconstitue pour consolider l'avenir, qui sera marqué par un beau projet architectural à l'étude, avec une emphase sur le handicap en ligne de mire.

Christophe Rivenq, maire d'Alès, président d'Alès Agglo et du comité de surveillance du CHAC :

"On constate que la politique de la direction porte ses fruits. Si nous avions continué la dérive de la fin 2023, le CHAC compterait entre 50 et 80 lits de moins. Nous devons mener une politique de santé à l'échelle du territoire pour que l'hôpital soit un peu plus ouvert sur la ville. Parler de santé d'un territoire en n'évoquant que l'hôpital, ça n'a pas de sens. Mais le faire en ne parlant que de médecine en ville, ça n'en a pas plus. Avec presque 2 000 postes, dont 80 créés en un an, l'hôpital reste le deuxième employeur d'Alès, après la ville et l'Agglo justement.

Même si on compte toujours 15 000 personnes sans médecin traitant dans Alès Agglo, on va dans un sens d'amélioration, on est un peu plus optimistes qu'il y a quelques mois. Nous travaillons main dans la main avec l'ARS et la CPAM sans qui rien n'est possible, mais aussi avec les CHU de Nîmes et Montpellier, qui nous permettent d'attirer des médecins.

Ces derniers ont peu d'intérêt à venir en termes de carrière, on doit donc travailler sur la qualité d'exercice. Aujourd'hui, on donne aux médecins ce dont ils ont besoin. Avant, on leur expliquait comment s'en passer. Le rapport direction-médecins permet ce bon travail et de fidéliser les médecins."

Projet hôpital 2030-2035 :

2025-2028 : 

  • Maison Médicale de garde en lien avec la médecine de ville
  • Agrandissement des urgences pour une surface totale de 1600 m²
  • Création d'un service d'aval des urgences de 10 lits
  • Restructuration de l'accueil patients du service imagerie, remplacement d'un scanner et installation d'un second IRM
  • Création de 60 places de parking et redirection du flux pompiers
  • Création d'une sixième salle de bloc opératoire
  • Réhabilitation de l'institut de formation en soin infirmier avec accessibilité pour les Personnes à Mobilité Réduite, centre de simulation et rénovation des salles de cours

2028-2031 : 

  • Relocalisation sur 900 m² et création de 20 lits supplémentaires pour les Soins de Suite et de Réadaptation
  • Création d'un espace de co-working et d'une salle numérique de travail dédiée à la recherche clinique
  • Développement du service d'aval des urgences avec 8 à 10 lits supplémentaires
  • Création de deux lits supplémentaires pour l'Unité de Soins Intensifs en Psychiatrie 

2031-2035 :

  • Augmentation capacitaire du service oncologie
  • Création d'une septième salle de bloc opératoire
  • Rapprochement de locaux de consultation et hospitalisation pour la cardiologie/pneumologie

Corentin Dimanche

Alès-Cévennes

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