Publié il y a 5 mois - Mise à jour le 08.07.2024 - Propos recueillis par Louise Gal - 3 min  - vu 219 fois

ARLES Le poids de la culture dans l’enjeu démocratique

David Irle

David Irle, éco-conseiller auprès du secteur culturel.

- Thierry Gautier

Le festival Les Suds, à Arles, organise une rencontre publique mardi 9 juillet à 15 h, au sein de l’École nationale de la photographie, avec David Irle, éco-conseiller auprès du secteur culturel, Marie José Mondzain, philosophe, ainsi que Edwy Plenel, journaliste co-fondateur de Médiapart. Cette rencontre tournera autour de la place de la culture pour concilier urgences climatique et sociale, un défi démocratique. David Irle nous présente cette conférence et ses enjeux. Interview. 

Sur quoi porteront vos prises de parole ? 

David Irle : Nous avons un peu fait infléchir ce que nous avions imaginé faire compte tenu du contexte politique du moment. Nous nous sommes dit qu’il fallait repositionner les discussions sur la question de la démocratie. J’ai grandi à Nîmes et j’habite sur Montpellier en ce moment mais mon territoire de cœur c’est le Gard, et on voit bien que c’est un territoire où les questions de lien démocratique se posent de façon très forte. 

Quel est le rôle de la culture dans cet enjeu démocratique ? 

La culture doit jouer son rôle, ça ne sera pas un substitut au pouvoir politique mais elle a son rôle à jouer, ni plus ni moins. Une partie des professionnels de la culture s'est peut-être un peu trop éloignée des habitants. Il faut réfléchir à quel point nous sommes capables d’écouter, de travailler avec les habitants et de ne pas être dans une posture trop élitiste dans le mauvais sens du terme. Il ne s’agit pas de perdre de vue l’exigence et la qualité mais de veiller à créer un lien entre les professionnels de la culture et les habitants et de faire démocratie ensemble. Ce qui est le cas d’une grande part des acteurs culturels, tout n’est pas à jeter mais ce n’est pas toujours le cas. 

Nous devons nous demander à quel point nous, le secteur culturel, nous restons un service public à l’endroit où nous sommes subventionnés. Parce que l’activité artistique peut être privée ou publique mais lorsqu’on est subventionné par des fonds publics je crois qu’on doit se demander à quel point nous sommes au service du public. Cela ne veut pas dire leur proposer ce qu’ils veulent, mais les inclure, créer un lien. 

C’est, selon vous, particulièrement important dans le contexte actuel ?

Il faut absolument préserver les libertés artistiques. Parce qu’elles peuvent être attaquées, notamment par l’extrême droite. Il faut donc veiller à les préserver, mais en même temps, se demander à quel point les artistes et surtout les producteurs doivent aussi, de leur côté, exercer des formes de responsabilités sociales et environnementales. En clair, arrêter de faire n’importe quoi. 

Concrètement, comment le secteur culturel peut-il agir ? 

La clé réside sans doute dans l’exemplarité dans nos manières de faire. Par exemple, en faisant en sorte que les gens puissent facilement venir dans son festival en mobilité durable. Parallèlement, je pense que cela peut aussi être utile qu’il y ait des artistes qui portent un propos, au travers de leur spectacle ou en tant que personnalité influente. Mais cela marche bien s’il y a par ailleurs un minimum d’exemplarité dans les pratiques. 

Le festival des Suds s’est par exemple engagé pour transformer ses pratiques…

Oui, les organisateurs participent au projet Déclic (un projet collectif de décarbonation de la filière du spectacle vivant des musiques actuelles). Par ailleurs, en Région Paca, le collectif des festivals (COFEES) travaille sur un projet qui s’appelle Festivals en Mouvement et qui essaye d’améliorer les mobilités en festival. Pour ma part, j’ai aidé le festival d’Avignon à déployer une nouvelle offre de train nocturne pendant le festival pour permettre aux habitants d’Arles, Orange, Carpentras et Cavaillon de venir en soirée et de pouvoir rentrer en train chez eux. Il y a beaucoup d’initiatives d’éco-responsabilité de la part des acteurs culturels. Cela montre qu’ils ont commencé à prendre ces questions à bras le corps autour des enjeux d’exemplarité. Ils peuvent vraiment être des vecteurs de transformation, surtout quand on arrive à toucher des publics qui ne sont pas trop sensibilisés à ce sujet.

Comment aborder la question de la transition écologique ?

Il me semble que nous avons notre part de responsabilité dans ce qu’il est en train de se passer. Sur les questions de transition écologique, nous avons probablement eu un angle beaucoup trop culpabilisant. Ce sont des sujets graves, sérieux, anxiogènes. Il faut peut-être les penser de manière plus inclusive, plus horizontale, en écoutant davantage les habitants et leurs problématiques. Je le fais beaucoup en conférence en abordant la question de co-bénéfice. Avec l’angle de l’amélioration des conditions de déplacement, de leur santé etc… C’est plus motivant.

Les projets culturels sont-ils déjà impactés par le changement climatique, et les conséquences sur l’accès à l’offre sont-elles déjà à l'œuvre ?

Oui, il y a déjà des effets très nets, les projets culturels sont impactés, notamment les festivals qui font face à des tempêtes, des canicules. Cela joue sur les conditions de travail, il y a aussi des annulations. Pas loin d’ici, à Apt, l’Insane a été décalé à Pentecôte car il faisait trop chaud en août. En revanche, pour l’instant, je n’ai pas l’impression que cela vienne abîmer l’accessibilité.

Propos recueillis par Louise Gal

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