Publié il y a 1 an - Mise à jour le 29.12.2022 - Anthony Maurin avec l'Inrap - 4 min  - vu 564 fois

GARD Aubrespin, l'histoire de Saint-Gervasy (1/2)

Tamisage en cours (Photo Jérémy Bousquet Inrap)

L'histoire de Saint-Gervasy est très liée au site d'Aubrespin. Les archéologues de l'Inrap avaient, lors du grand chantier de la LGV, fouillé en deux parties un site prometteur.

La fouille qui s’en est suivie a porté principalement sur l’étude de cinq enclos circulaires des VIIIe-VIIe siècles avant notre ère, dont la vocation funéraire était supposée. Elle a également permis des découvertes concernant l’âge du Bronze ancien et l’Antiquité.

Vue générale depuis un drone de la zone décapée en 2013 (Photo Drone Concept Inrap)

À l’aide de quatre pelles mécaniques, une bande de 250 m de long pour 40 à 50 m de large, soit plus d’un hectare, a été décapée puis explorée de part et d’autre d’une route départementale. Les vestiges archéologiques apparaissent rapidement entre 0,40 et 0,60 m de profondeur. Leur état de conservation est assez médiocre en raison des bouleversements causés par les travaux agricoles répétés, notamment les labours, dans les couches superficielles de la terre.   

On suppose que les populations du passé vivaient à peu près au niveau des sols actuels et qu’il n’y a pas eu de forte érosion ou d’apport massif de terre. Tous les aménagements de surface ont donc disparu et seules subsistent les parties les plus profondes des structures. Celles-ci se reconnaissent par le contraste entre la couleur assez sombre de leur comblement, contenant du mobilier archéologique, et les lœss beige jaune dans lesquels elles ont été creusées.

Une occupation datée de l'Âge du Bronze

Les plus anciens témoignages d’occupation humaine dans la fenêtre de décapage concernent la période de l’âge du Bronze. Il s’agit d’un silo, de plusieurs points d’épandage de mobiliers céramiques et d’un probable foyer démantelé. Pour la période, les sites sont rares dans la région et on peine à caractériser l’occupation humaine dans les plaines.

Les pelles mécanniques lèvent la terre et préservent le site (Photo Pierre Séjalon Inrap)

Il semble que les populations vivent en très petits groupes, probablement de l’ordre de la cellule familiale, et aménagent leur habitat de façon peu prégnante dans le sous-sol. La présence du silo suggère qu’ils ont planté des céréales à proximité, les ont récoltées et ont constitué une réserve.

Le type de fossé circulaire identifié sur le site matérialise en général l’entourage de la sépulture d’un individu, dont le corps, incinéré ou non, est inhumé dans une fosse ou déposé directement sur le sol sous un tertre de terre. Ces pratiques sont bien connues dans les secteurs de garrigues méditerranéennes, où l’utilisation de la pierre pour la construction des monuments funéraires a facilité leur conservation. En plaine c’est très souvent la terre qui a été préférée pour l’aménagement du marquage des tombes. Les petits tertres en terre qui signalaient les sépultures ont probablement été effacés. Toutefois, à l’époque antique, ils semblent encore être visibles car les fosses de plantations se limitent au pourtour de l’enclos.

Vue aérienne d'un enclos (Photo drone concept Inrap)

Les cinq fossés d’enclos de Saint-Gervasy ont donc fait l’objet d’une fouille manuelle intégrale afin de récolter l’ensemble du mobilier présent dans les comblements et de le localiser avec précision. L’objectif était d’étudier les objets volontairement déposés aux abords des sépultures, peut-être sur les tertres, et d’apporter des éléments de chronologie pour dater chaque ensemble.

Aucune sépulture n’ayant toutefois été repérée, des échantillons de terre recueillie à l’intérieur de deux enclos ont été tamisés. Brassées par les travaux agricoles depuis l’Antiquité, les terres pouvaient en effet encore contenir les témoins des sépultures installées au sein des enclos : os humains brûlés ou non, mobilier céramique et métallique d’accompagnement, dépôt de faune...

Tamisage en cours (Photo Jérémy Bousquet Inrap)

Ce protocole a permis la récolte de menus objets suggérant la présence d’au moins une incinération de sujet adulte dans l’enclos situé au nord de la fouille. Quelques fragments de bronze, dont certains présentent les stigmates d’un passage au feu, suggèrent que le défunt était accompagné d’objets personnels (des bracelets et peut-être une ceinture). Ces éléments confortent l’hypothèse selon laquelle ces cercles entouraient bien des sépultures datées de la fin du VIIsiècle avant notre ère.

Un bâtiment agricole antique

Dans la partie sud de la fouille, un bâtiment antique de plan carré a été mis au jour. À l’intérieur se trouvait une grande fosse également quadrangulaire, remplie de plusieurs couches de matériaux grossiers, notamment des galets provenant d’une construction démantelée. La vocation initiale du bâtiment, peut-être lié à une activité viticole, reste incertaine.

Vestiges du bâtiment antique incluant une fosse quadrangulaire (Photo Cyril Gaillard)

À proximité, des fossés et des réseaux de fosses de plantation suggèrent la présence de parcelles plantées en vigne. Une surface de circulation, avec une sorte de rigole installée dans les niveaux supérieurs du remplissage de la fosse, pourrait matérialiser un second état d’occupation du bâtiment, avec un changement de vocation. Il pourrait s’agir d’une petite étable ; l’étude des phytolithes (microfossiles végétaux) révèle un nombre important de tiges de céréales dépourvues de graines, qui pourraient être les vestiges d’une litière de paille.

L’ensemble de ces découvertes montre que ce secteur de la plaine du Vistre a été très tôt attractif pour les populations. La diversité des vestiges indique que les terres sont tour à tour dédiées à l’agriculture et l’élevage, et à l’édification de monuments funéraires pour accueillir les morts de la communauté. Elle permet aussi de mettre en évidence des moments où ces terres ne semblent pas exploitées par l’homme et retournent à l’état de friche. Cela peut traduire également des mouvements de population au sein d’un terroir exploité à une échelle plus grande, que la fenêtre de fouille ne permet pas d’appréhender.

Anthony Maurin avec l'Inrap

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