Publié il y a 8 mois - Mise à jour le 30.09.2024 - Louis Valat - 3 min  - vu 2735 fois

SALINDRES L'usine de Solvay mise en cause pour une contamination aux polluants éternels

L'entrée du site de l'usine Solvay à Salindres.

- Sacha Virga

Des récentes enquêtes menées par France 3 et Le Monde ont révélé des niveaux alarmants d'acide trifluoroacétique (TFA) dans les eaux de l’Arias et l’Avène rejétés par l'usine de PFAS exploitée par Solvay à Salindres.

On ne s’attendait pas à retrouver des niveaux pareils, affirme François Veillerette, porte-parole de l’ONG Générations Future dans les colonnes du Monde. On a été désagréablement surpris, à tel point que le laboratoire a dû s’y prendre à deux fois pour faire les analyses parce qu’il n’était pas calibré pour en trouver autant."

Qu'est-ce que le TFA ?

L'entreprise Solvay, propriétaire d'une des cinq installations en France qui produisent des PFAS (composés per- et polyfluoroalkylés), pourrait être responsable de la plus grande contamination mondiale" par l'un de ces produits, le TFA. Il est le plus petit de ce que l'on nomme les "polluants éternels". L'acide trifluoroacétique (TFA) est un composé organique fluoré, principalement utilisé comme réactif chimique dans diverses applications industrielles et de laboratoire, telles que la synthèse organique, la purification des peptides et des protéines, et comme solvant.

Il est également un sous-produit courant dans la décomposition de certains PFAS, ce qui peut entraîner sa présence dans l'environnement et susciter des préoccupations en matière de santé publique en raison de sa persistance et de sa toxicité potentielle. Cependant, la preuve de sa toxicité spécifique reste à établir. Bien que les PFAS soient désormais associés à différents cancers, à des troubles endocriniens, immunitaires et à l’infertilité, aucune étude épidémiologique spécifique sur cette molécule n'a encore été réalisée, et par conséquent, aucune restriction à l'échelle européenne n'a été mise en place.

Des taux records dans l’Arias et l’Avène ?

Ce serait, d'après les enquêtes menées par nos confrères, près de 10.000.000 nanogrammes de PFAS par litre d'eau rejetée par l'usine Solvay de Salindres. À l'automne 2023, à l'initiative de l'association Génération Futures, dix échantillons ont été prélevés dans l'Arias et l'Avène - deux cours d'eau qui traversent la plate-forme chimique - aussi bien en amont qu'en aval, ainsi que plus loin dans le Gardon. Des échantillons ont également été collectés dans l'eau du robinet de communes situées à plus de 20 kilomètres au sud, le long du Gardon. Sur les neuf échantillons analysés, par le laboratoire Ianesco, agréé par les ministères de la Santé et de l'Environnement, des concentrations spectaculaires de PFAS, notamment de TFA, provenant de l'usine Solvay, ont été révélées.

Sollicité ce mardi 6 février, par Objectif Gard, le sous-préfet d'Alès, Émile Soumbo, n'a pas souhaité s'exprimer sur l'enquête, expliquant ne pas "disposer de tous les éléments nécessaires". Cependant, il a organisé une réunion interne, qui selon nos sources, a eu lieu hier, à la sous-préfecture d'Alès. 

Un risque de santé publique ?

Les analyses réalisées dans l'eau potable des communes de Moussac et Boucoiran-et-Nozières révèleraient ainsi des concentrations bien au-delà des niveaux habituellement observés. Selon Générations Futures, "99,9 % des PFAS retrouvés dans l'eau potable de ces communes sont fabriqués par Solvay". Les concentrations en TFA s'élèveraient à 18 μg/l à Moussac et 19 μg/l à Boucoiran-et-Nozières. Nos confrères de France 3 effectuent une comparaison avec le sud de Lyon, où le scandale des PFAS a été exposé il y a deux ans par des journalistes du magazine Envoyé Spécial : la concentration d'eau potable pour la somme totale de vingt molécules n'a jamais dépassé 0,3 µg/L. Mais pour Christophe Rivenq, président d'Alès Agglomération, "l'eau est réglementaire"

Cette enquête fait mal à la commune, à la population, aux commerces, elle salit l'image de Salindres

Etienne Malachanne, maire de Salindres

L'association attend également des "investigations supplémentaires à Salindres et Rousson - où un nombre élevé de cas de glioblastomes, un cancer rare du cerveau, avait été signalé (article à retrouver en cliquant ici) - pour évaluer le lien potentiel avec l’exposition aux PFAS. D'après Christophe Rivenq, mais aussi le maire de Salindres, Etienne Malachanne, "aucun lien ne peut exister" entre l'usine de Salindres et ces cancers du cerveau. Hasard du calendrier - ou pas - le rapport final d'enquête de Santé Publique France sur le cas de glioblastomes de Salindres et Rousson, sur la période 2016-2020, a été publié ce mardi 6 février sur leur site internet (à retrouver ici). 

Selon Christophe Rivenq, l'Agence régionale de santé devrait publier, dans cette journée de mercredi, un communiqué de presse en réponse aux révélations de nos confrères nationaux. Le président d'Alès Agglo promet un point presse dans la foulée, ce mercredi à la mairie de Salindres, pour mettre en évidence ce qu'il estime être une "enquête scandaleuse" notamment dans la manière dont elle a été menée. Selon lui, le terme de "record mondial" utilisé par nos confrères pour qualifier ces niveaux alarmants d'acide trifluoroacétique est faussé.

Louis Valat

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