Le philosophe Cicéron a dit : « C’est dans l’adversité que se révèlent les vrais amis. » Après sa sortie, ce mardi sur CNews/Europe 1, Bruno Retailleau ne s’est pas fait que des copains… Il a même mis dans l’embarras ses propres troupes, à quelques mois des municipales. Interviewé par Sonia Mabrouk, le patron des Républicains a appelé à faire barrage à la gauche, ce dimanche, au second tour des législatives partielles dans le Tarn-et-Garonne. Sauf qu’en face, l’adversaire est le candidat soutenu par l’extrême-droite. « Bruno Retailleau est un homme suffisamment brillant pour ne pas avoir fait une erreur… Chez lui, tout est pesé, calculé », fustige le sénateur PS du Gard, Denis Bouad.
En 2024, la dissolution de l’Assemblée nationale n’a pas fait que des malheureux… Sans majorité absolue, les macronistes se sont tournés vers Les Républicains pour gouverner. La droite républicaine est revenue sur le devant de la scène. Une renaissance inespérée pour le parti, en déliquescence depuis la défaite de Nicolas Sarkozy à la présidentielle de 2012. La résurrection ne s’arrête pas là. Passé des salons feutrés du Sénat à l’exposé ministère de l’Intérieur, Bruno Retailleau a créé la surprise en se faisant élire président du parti, en mai dernier. Une étape de plus pour nourrir son appétit présidentiel. Sauf que cette conjonction de facteurs n’a pas, pour autant, résorbé la crise profonde que traversent les LR, dont une partie de l’électorat a migré au RN.
L'étrange position de Jean-Paul Fournier
L’appel du pied de Bruno Retailleau vers le RN a de quoi embarrasser la droite nîmoise, en pleine campagne des municipales. Dans cette crise gouvernementale, le maire de Nîmes, Jean-Paul Fournier, a carrément appelé à la démission du président Emmanuel Macron : « Je suis gaulliste et j’apprécierai que le chef de l’État se souvienne de ce printemps 1969 durant lequel son illustre prédécesseur, Charles de Gaulle, n’hésita pas à démissionner après avoir perdu de peu un référendum. » Cette position n’est pas celle de Bruno Retailleau. En se comportant ainsi, Jean-Paul Fournier, opposant historique à l’extrême-droite, s’évite-t-il de désavouer le patron de son parti ? Ou sa position est-elle celle d’un élu, en fin de carrière, désireux de jouir de la liberté de son statut ?
Interrogé, un autre Nîmois se distingue, plus légèrement, de Bruno Retailleau : le sénateur nîmois Laurent Burgoa : « Si j’avais été dans le Tarn-et-Garonne, j’aurais adopté le ni-ni. Moi, je ne voterai jamais LFI. Et je refuserai toujours de m’allier au Rassemblement national. » Le sénateur Denis Bouad rétorque : « Moi, je vais arrêter de faire le front républicain parce que chez les LR, un de leurs sénateurs a été retrouvé ivre dans la rue, un autre est accusé de tentative de viol… Ce sont des excuses ! Depuis des années, la droite court derrière les voix du Rassemblement national. »
La polémique autour de Bruno Retailleau inquiète, l’ex-leader de TPNA, Jean-Paul Boré, en pourparlers avec le candidat LR Franck Proust. Sur les réseaux sociaux, l'ancien communiste appelle les élus républicains à se positionner « faute de quoi l’avenir sera sans doute bouché si des situations similaires se posent lors de futures élections. » Joint par nos soins, Franck Proust n'a pas donné suite. Un ancien proche de Franck Proust relève : « Sur beaucoup de sujets, Franck Proust ne prend pas position. Il est silencieux, préférant ne pas sortir du bois pour s’éviter les critiques. » À force de ne pas décider, d’autres le feront pour lui : « On verra si au second tour, ils n’auront pas besoin de nous pour faire barrage à l’extrême-droite », lâche Denis Bouad. Avec des amis comme Bruno Retailleau, on n'a pas besoin d'ennemis finalement…