ALÈS Les États généraux de la santé livrent des pistes locales qui se veulent universelles
Entre accès aux services et résorption des inégalités, les États généraux de la santé d'Alès agglomération ont livré des idées d'avenir pour rapprocher la santé du citoyen, quand il ne cesse, actuellement, de s'en éloigner. Le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, est venu entériner deux idées, notamment la création d'un pôle premier recours à Alès, qui commencera jeudi 9 novembre, et la mise en place prochaine d'un bus de santé premier recours qui sillonnera le territoire.
Il a été chahuté en début et en fin de soirée. Mais au final, les acteurs de la santé ont pu s'exprimer - après le président d'Alès agglo, Christophe Rivenq - et leur ministre répondre. À deux échelles : celle des propositions locales et celle de la philosophie nationale. Permettant ainsi de constater que le concret du terrain s'évanouit parfois dans les politiques nationales. Chahuté d'entrée, sur le parvis du Cratère, le ministre l'a été par le comité de défense de l'hôpital, dont le communiste Jean-Michel Suau s'est fait le porte-parole. Face à la presse, Aurélien Rousseau s'est ensuite montré inquiet pour les 700 000 patients sans médecins traitants en France (entre 10 et 12 000 sur le bassin alésien), tout en assurant "on récupère petit à petit".
La grande célébration des États généraux de la santé pouvait alors commencer sur la scène du Cratère. En présence des professionnels de santé qui ont planché sur les idées du territoire, étayées par les 1 700 contributions reçues depuis début juin, et devant plus de 540 personnes. Président d'Alès agglo, Christophe Rivenq a rappelé les quatre thématiques qui encadraient la réflexion : droits à la santé, besoins de services, évolution des pratiques de santé et organisation de proximité. Un questionnaire en ligne a reçu 1 000 réponses de patients potentiels.
Le résultat, des pistes pour "questionner l'organisation et les pratiques professionnelles", a présenté Christophe Rivenq (comme il l'avait laissé entendre dans l'interview donnée à Objectif Gard, relire ici). La "couverture territoriale et l'évolution des pratiques professionnelles et de leur organisation" furent donc au coeur de la réflexion de ces quatre mois et demi, soumise à 50 professions et 89 structures. "Nous allons présenter ce que vous avez dit et ce que j'ai tiré comme conclusions", a osé Christophe Rivenq, afin "d'imaginer ensemble ce que devrait être le système de santé de demain. Que voulons-nous ? Apporter une réponse à tous les habitants du territoire". Le tout en "partant de l'existant".
Un pôle de premiers recours ouvert ce jeudi 9 novembre
Si le "manque de moyens humains et financiers" reste un élement pointé du doigt, les contributions "permettent d'étoffer un modèle local et pertinent", pour Christophe Rivenq. Modèle que les professionnels de santé se sont appliqués à brosser. "Un pôle de soins premier recours ouvrira au 9 novembre", s'est chargé d'annoncer Christophe Rivenq. Une annonce complétée ensuite par la généraliste alésienne Amandine Salanova, qui a confirmé la date d'ouverture, au troisième étage du bâtiment flambant neuf de Gard vision. "Le public ciblé, a dit l'une des responsables du CPTS (communauté professionnelle territoriale de santé) la Cévenole, ce sont les patients sans médecin traitant, atteints d'une maladie chronique ou d'une affection subaïgue." Un pôle de médecins et infirmiers libéraux sera chargé de les orienter, leur permettant "plusieurs modalités de prise en charge". Amandine Salanova a tenu à différencier une "équipe traitante" d'un "médecin traitant", tout en appelant de ses voeux "la création d'un pôle de soins non-programmés", ainsi que d'un pôle de soins pédiatriques de premiers recours, déjà annoncés comme imminent par le président d'Alès Agglo.
Ces soins de premiers recours connaîtront une extension grâce à un bus itinérant, dans les prochains mois. Une idée chère à Alain Devallez, du pôle prévention de Filieris Sud, qui fut, à Alès, le Monsieur Vaccin de la période pandémique. "Le problème est "d'aller vers", a insisté le médecin, d'amener au plus près des usagers un panier de services". Même s'il a globalement appuyé les idées formulées, le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, a néanmoins apposé un bémol à cette idée lors de son discours final, soulignant qu'il craignait que les bus santé d'aujourd'hui ne bénéficient de la même fascination que les cabines de télé-consultation d'il y a 2 ou 3 ans : de bonnes idées sur le papier, finalement désertées.
Enfin, côté pédiatrie, Claire Le Guennou a présenté le travail de la Maison des Colibris et de son projet de pôle de soins pédiatriques de premier recours, qui réunira vingt professionnels de santé médicaux et paramédicaux. "On aimerait travailler ensemble de manière innovante", a insisté la praticienne, tout en rappelant "qu'investir dans la santé des plus petits, c'est aussi le plus rentable".
"Je garde la lucidité sur là où en est notre système de santé"
Aurélien Rousseau, ministre de la Santé
Tout en reconnaissant, au long de son discours, le manque actuel de médecins, Aurélien Rousseau a manié l'humour et les satisfactions sur le travail qui lui était présenté. Il n'a pas hésité à commencer en évoquant la "fragilité du système", à ne pas oublier dans un "moment d'enthousiasme" comme ce lundi soir. "Mais je garde la lucidité sur là où en est notre système de santé". Il a ensuite souligné que cette fragilité ne devait pas occulter les "choses qui bougent positivement".
"On tourne tous autour des mêmes sujets, a enchaîné Aurélien Rousseau : les déterminants de santé, la prévention, et chercher des réponses aux besoins des populations". Mais il a isolé le travail alésien, voire cévenol, car "tous les bassins de vie n'ont pas un degré de maturité tel qu'ici le principe d'égalité doit faire en fonction des réalités du territoire", a scandé le ministre, tout en appelant à renforcer la prévention face à "la culture française du curatif". En fin de discours, il a signé un chèque de 450 000 € pour le pôle de premier recours. Les applaudissements à la suite de l'annonce lui ont offert un trait d'humour : "Il y avait assez peu de suspense puisque vous commencez dans trois jours..." Au final, Aurélien Rousseau a donné un immense satisfecit à une démarche "partie du terrain" qui "rend très modeste et donne envie d'y croire". Les chahuts d'une dizaine d'intermittents et chômeurs, en fin de séquence, n'auront finalement que peu dérangé des propositions plutôt consensuelles. Sans doute, justement, parce que celles-ci émanent des acteurs de terrain.
Ce qu'en disent les députés alésiens...
Michel Sala, député France insoumise de la 5e circonscription, et Pierre Meurin, élu du Rassemblement national sur la 4e, ont tous deux une part de leur territoire d'élection à Alès. Ils ont, hier soir, accueilli le ministre avant d'aller se placer pour entendre le résultat des états généraux. En fin de soirée, Michel Sala relevait "des choses sur le territoire, qui sont mises en oeuvre et sont positives, notamment cette organisation concertée avec les acteurs d'ici. Il n'en reste pas moins, même si le ministre l'a noté, qu'on ne pourra faire ça sans moyen : on a le premier budget d'austérité de la Sécurité sociale depuis 1996, insiste le député Nupes, qui s'est appliqué à différencier "l'échelle locale", à la réflexion intéressante, et "l'échelle nationale" dont la philosophie vise à la réduction de moyens. Il a néanmoins regretté que la pédopsychiatrie n'ait pas été évoquée, "quand il n'y a qu'1,5 équivalent temps plein à l'hôpital d'Alès, alors qu'il en faudrait cinq". Côté RN, Pierre Meurin a trouvé la soirée "classe et bien organisée". "Je prendrai le temps de digérer le contenu, mais on voit la volonté de faire quelque chose et de régler des problèmes de fond, a loué le député de la 4e circonscription. Je relayerai, à l'Assemblée nationale, les idées du territoire". Le député RN a, en revanche, regretté "beaucoup d'incantations et de lieux communs de la part du ministre", et "pas beaucoup d'annonces".
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