Publié il y a 1 an - Mise à jour le 24.04.2023 - Propos recueillis par François Desmeures - 4 min  - vu 3594 fois

L'INTERVIEW Jack Verriez, maire de Mialet : "Par rapport aux baigneurs, je trouve une grande tolérance chez les habitants de Mialet"

Jack Verriez est maire de Mialet depuis 2020

- (photo François Desmeures)

Le village de Mialet voit déjà passer les randonneurs en ces vacances de printemps. Mais ce que son maire, Jack Verriez, craint le plus, ce sont les baigneurs de l'été, au respect approximatif. Or, s'il ne souhaite pas interdire la baignade, le maire de Mialet rappelle que tous les terrains qui bordent le Gardon, dans la vallée des Camisards, sont privés. Et que ses concitoyens sont encore bien gentils de préserver l'accès à des touristes ou baigneurs locaux qui ne respectent pas les lieux. Entretien avec un maire en colère face à l'absence de respect des visiteurs. 

Jack Verriez est maire de Mialet depuis 2020 • (photo François Desmeures)

Objectif Gard : De mémoire de maire, aviez-vous déjà vu le Gardon aussi bas ?

Non, en cette saison, non. L'an dernier, il n'était pas bien haut. Mais il n'y a pas eu de gardonnade cette année, ou de façon insignifiante. Et on voit comme il est bas. Étonnamment, en revanche, il n'est pas trop sale, c'est déjà un miracle. On a aussi, d'habitude, beaucoup de sources qui l'alimentent. Mais elles sont en train de se tarir. Ici, au village, le ruisseau est à sec. Les gens qui ont des sources et en tirent leur eau potable sont inquiets. La commune a une étendue de 30 km2 et toutes les maisons ne sont pas reliées à l'eau de la ville. 

"Les habitants tolèrent, parce qu'ils ont conscience de cet avantage idyllique que nous avons."

Malgré cette absence d'eau, la vallée des Camisards est l'une des plus connues, des plus réputées et des plus fréquentées pour la baignade. Pourtant, chaque année, vous tentez de décourager une partie des baigneurs. Pourquoi ?

On ne veut pas les décourager, mais ce n'est pas facile. Je viens ici depuis l'âge d'un an. Il est certain que si j'y suis venu et revenu, c'est parce qu'il y avait l'attrait du Gardon. Mais, comme dans le Parc national des Calanques de Marseille, l'inconvénient ce sont le stationnement et les incivilités (qui ont augmenté). Les gens se garent n'importe où et se disent "ici, on n'est pas punis". Ou se garent devant le chemin d'accès d'une maison en pensant ne déranger personne. J'ai discuté avec des gens d'Alès, ils ont fini par admettre qu'ils ne feraient jamais ça à Alès. Tous les habitants tolèrent, parce qu'ils ont conscience de cet avantage idyllique que nous avons. Je trouve une grande tolérance chez les habitants de Mialet. Mais il faut que les visiteurs respectent : ils coupent du bois pour faire du feu - qui est de toute façon interdit - ils laissent des détritus, font leurs besoins. Dans certains fourrés, il y a des endroits où on ne peut plus aller ! Le propriétaire des rives, au pont des Abarines, avait fléché le chemin pour que les baigneurs descendent, tout lui a été arraché. Et le matin, en été, quand il va se baigner, il remonte avec des sacs-poubelles remplis de détritus... 

"À la Rouquette, je suis obligé de faire venir les gendarmes l'été."

Irez-vous jusqu'à émettre un arrêté d'interdiction de baignade ?

Cela avait été fait par mes prédécesseurs. Dans mon programme, il était évoqué le fait de constituer un "profil de baignade". En fait, il vaudrait mieux parler de "profil de vulnérabilité", qui vise à chercher d'où viennent les pollutions. Mais le terme officiel est "profil de baignade". J'ai justement dit à l'Agence régionale de santé (ARS), "pourquoi ne pas donner un autre nom ? On ne fait pas les études pour que les gens viennent se baigner !" Un arrêté ne réduirait pas le problème, je pense. Mais à la Rouquette, par exemple, je suis obligé de faire venir les gendarmes l'été. Depuis deux étés, les patrouilles sont d'ailleurs plus fréquentes grâce aux réservistes. Quand il y a eu l'arrêté, la commune a quand même deux plaintes d'hébergeurs, en justice, parce que dans leur publicité envoyée aux touristes figurait la baignade dans le gardon de Mialet... 

Que ce soit au seuil du village(cette photo), sous le pont des Camisards ou au pont des Abarines (voir plus loin), le débit du Gardon de Mialet est effrayant • (photo François Desmeures)

Si vous n'interdisez pas, comment limiter la fréquentation ?

Il y a eu des réflexions de faites, avant que je sois élu. Des buttes de terre ont été installées pour limiter les voitures, pour regrouper les gens sur des parkings et ainsi limiter le nombre de personnes. Je prospecte pour trouver des terrains afin d'organiser le stationnement. Ce n'est pas simple parce que les gens croient qu'on va leur apporter du monde. C'est le contraire. Mais organiser le stationnement aura un coût pour la commune. Donc, le parking sera payant. Pas cher, mais payant. En attendant, j'ai recruté un agent supplémentaire avec une compétence ASVP (agent de surveillance de la voie publique, NDLR). 

À défaut de baigneurs, vous êtes satisfait de voir les randonneurs dans la vallée ?

On atteint désormais une surfréquentation des chemins de randonnée, c'est aussi une grosse problématique. Le "vivre ensemble" est difficile parfois... Ces chemins, les VTT les prennent aussi. On a les mêmes problèmes que les trottinettes en ville. Aujourd'hui, avec le vélo électrique, tout le monde va partout. Mais un piéton plus un vélo, ça ne passe plus, ça devient dangereux. D'autres, même à pied, laissent leur chien en liberté qui, parfois, fonce sur les cyclistes. Un peu dans l'esprit "on est libres, on va à la campagne". 

Dans ce contexte, Mialet reste-t-elle une commune touristique, en dehors de la grotte et du musée du Désert ?

Oui. D'ailleurs, on est en train de réétudier l'aménagement du camping municipal de la Rouquette. Je voudrais qu'il dispose de plus d'équipements, en profiter pour étoffer le commerce de proximité. Les Mialétains vont y prendre leur café du matin, y boivent un coup... Ce serait intéressant s'il y avait aussi de la restauration. L'espace est magnifique. Je voulais aussi y installer un espace pour les camping-cars parce qu'on ne peut pas verbaliser les gens si on ne leur offre pas de solutions alternatives. 

Propos recueillis par François Desmeures

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