Publié il y a 2 ans - Mise à jour le 12.06.2022 - pierre-havez - 3 min  - vu 2285 fois

AU PALAIS « Vous êtes le champion toute catégorie de cette juridiction avec, feria oblige, 51 mentions à votre casier »

La salle d'audience du tribunal correctionnel Nîmes (Photo : Philippe Gavillet de Peney/Objectif Gard)

Ce mardi 7 juin, Noureddine et Stéphan ont été respectivement condamnés à deux ans et un an d’emprisonnement par le tribunal judiciaire de Nîmes, pour une vingtaine de vols et de tentatives en 2018 et en 2019, à Nîmes. Les deux acolytes sont des habitués des tribunaux.

Le duo de quinquagénaire dévalisait des bouteilles d’alcool dans de nombreux magasins et grandes surfaces de Nîmes et sa banlieue, en vue de les boire ou de les revendre, depuis plusieurs mois. Le tandem remplissait tranquillement des caddies, de nuit ou de jour, avant de s’enfuir par les issues de secours. Mais faute de précaution, les deux complices finiront par être facilement identifiés par des images de vidéosurveillance.

« Vous êtes le champion toute catégorie de cette juridiction avec, feria oblige, 51 mentions à votre actif », commente faussement admiratif, le président Jean-Pierre Bandiera, en s’adressant à Noureddine. « Je reconnais ces vols, sauf celui où le vigile s’est fait gazer. C’est Stéphan qui l’a fait, explique celui-ci. À cette époque, j’avais retrouvé du travail, mais il m’a présenté un dealer à qui j’ai fini par devoir beaucoup d’argent. Je me suis donc engagé à l’aider pour rembourser ma dette. »

« Ça ressemblait à un gros piège »

Noureddine a déjà passé une trentaine d’années derrière les barreaux. « Je vous ai connu, vous étiez encore juge d’Instruction », déclare-t-il au président, comme un père à un fils. « Oui, et après toutes ces années, vous n’avez toujours pas compris, visiblement ! », répond le magistrat un peu vexé. Le prévenu fait amende honorable. « Mais j’ai pris conscience que j’ai un problème : on n’était pas dans notre état normal, on était totalement inconscient, on était en train de se détruire. Mais je suis suivi par un psychologue maintenant… », jure le quinquagénaire.

Le président l’interroge ensuite sur le vol d’une voiture sur le parking du crématorium de Nîmes, pour lequel il a aussi été confondu. « Ça m’a paru suspect, j’ai vu cette grosse Mercedes ouverte avec un portefeuille dedans et dès que j’ai mis la main dessus, des agents de la BAC ont débarqué tout autour, reprend Noureddine. J’ai réussi à m’échapper par miracle, mais ça ressemblait à un gros piège. »

Deux ou trois grammes tous les jours

Son complice, au casier un peu moins chargé, explique ces vols pour sa propre consommation. « Mais une fois que vous avez volé 150 bouteilles, vous aviez de quoi faire des provisions ! », proteste Jean-Pierre Bandiera. Stéphan baisse la tête. « Je devais être à deux ou trois grammes tous les jours. J’ai une maladie de cellule qui fait que je dois continuer dès que je touche un verre, j’ai deux cancers mais je vais suivre un nouveau protocole américain pour les soigner » promet-il, à son tour.

Le Parquet requiert 30 mois ferme contre Noureddine et 16 mois contre son complice. « Ils se félicitent de ne pas avoir de sang sur les mains, mais dans le casier du premier, il y a tout de même neuf condamnations pour des violences, justifie Romain Domingues. Que va-t-on faire de ces deux-là, alors que l’un sera libérable en 2023 et que l’autre a de graves problèmes de santé ? »

Des records et une vie en prison

L’avocate de Noureddine rebondit sur cette interrogation. « Avec l’accumulation des vols, mon client a été condamné à plus de 50 ans de prison, au total. J’ai compté, à 52 ans, il en a passé 29 derrière les barreaux, résume Khadija Aoudia. Mais il en a fini, son corps ne le lui permet plus, et cette dégradation va se poursuivre. On retiendra de lui des records et une vie en prison. Laissez-lui vivre ses dernières années libre... »

L’avocat de Stéphan demande lui aussi un aménagement de peine. « Mon client est un suiveur, mais lui aussi paye d’avoir consommé la chandelle par les deux bouts pendant toutes ces années. Et il doit pouvoir aujourd’hui se concentrer sur le gros travail médical qui l’attend », ajoute Frédéric Mansat-Jaffré.

Pierre Havez

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