Il flotte toujours une atmosphère particulière sur le Critérium des Cévennes. Ce rallye historique, profondément ancré dans le paysage sportif gardois, a retrouvé tout son éclat ce vendredi à l’occasion de sa 66e édition. Des routes sinueuses, des villages en liesse et une ferveur intacte : le décor est resté le même, mais les histoires, elles, se réécrivent à chaque virage. Et cette première journée a déjà réservé son lot d’émotions, entre la fierté des pilotes locaux et le coup dur de l’enfant du pays, Yohan Rossel, contraint à l’abandon dès les premiers kilomètres.

Des Cévennes qui vibrent au rythme des moteurs

Sous une météo observée et mitigée en début de journée, c'est finalement un grand soleil qui a lancé le Critérium en début d'après-midi. Dans le parc d’assistance placé à Saint-Hippolyte-du-Fort, la foule s’est pressée autour des voitures et des pilotes, impatiente de retrouver l’esprit du rallye “à l’ancienne”, où la proximité et la convivialité font partie du spectacle.

L’écurie Chazel Technologie Course, installée à Saint-Hippolyte-du-Fort, faisait évidemment figure d’ambassadrice locale. Avec plusieurs pilotes comme Jean-François Mourgues, Dorian Nicolas, Vincent Romeuf, Romain Jouve, Christophe François, ou encore trois autres pilotes, l’équipe dirigée par Renaud Chazel symbolise ce lien fort entre passion mécanique et ancrage cévenol.

« C’est toujours spécial de rouler ici. J'ai jamais pu finir la course en entier à cause des conditions météo, alors j'espère cette année là finir, mais à chaque fois, on sent surtout tout le public derrière nous », confiait Romain Jouve, engagé sur une Volkswagen Polo Rally2. « L’organisation est top cette année, c’est redevenu un vrai rallye des Cévennes », ajoutait-il, lui qui est devenu pilote grâce à la passion transmise par son père, Phillipe, pilote du Critérium dans les années 1980. 

À ses côtés, Christophe François, au volant d’une Alpine A110 RGT, affichait la même envie de bien faire : « On n’est pas là pour jouer la victoire, mais pour se faire plaisir. Le rallye de nuit, c’est une ambiance à part, avec les feux, les fumigènes, et tous les gens sur le bord de la route. »

Rossel, la désillusion du favori

C’était l’un des événements du week-end : Yohan Rossel, champion du monde WRC2 2021 et originaire de Nîmes, avait décidé de s’aligner en “invité surprise”, pour le plaisir de rouler à domicile, sur ses terres. Mais la fête a tourné court. À peine un kilomètre après le départ de la première spéciale, le pilote gardois est sorti de la route, victime d’une erreur d’appréciation dans un virage piégeux. Fin de rallye immédiate, immense déception pour le public comme pour lui. « On avait tout pour passer un bon week-end avec la famille. Mais ce sport est parfois cruel. On est arrivés trop vite dans un gauche qui refermait, j’ai perdu l’arrière et tapé. C’était fatal », a réagi Rossel, lucide malgré la frustration. « Désolé à tous, j’espère ne pas vous avoir trop déçus. »

Un coup dur symbolique pour celui qui incarnait, le temps d’un week-end, le lien entre le haut niveau international et la passion populaire du rallye cévenol.

Les anciens toujours là

S’il y a bien un nom indissociable du Critérium des Cévennes, c’est celui de Jean-François Mourgues. Double vainqueur de l’épreuve (en 2001 et 2009), le pilote alésien reste, à 63 ans, une véritable légende du sport automobile français. Fidèle au rendez-vous, il s’est offert un départ solide ce vendredi, deuxième de la catégorie F-RGT au volant de son Alpine A110, copiloté par Yohan Mendez.

« Je n’ai pas d’objectif de chrono, je suis surtout là pour me faire plaisir », confiait-il le matin. « Le Critérium, c’est un rallye à part. J’ai grandi avec, et à chaque fois, c’est un bonheur de revenir. »

Sur le plan purement sportif, c’est Yoann Bonato qui mène la danse après la troisième spéciale, devant Éric Camilli. L’Alésien Pablo Sarrazin, fils de l’ancien pilote de F1 et de rallye Stéphane Sarrazin, signe une performance prometteuse et occupe la 4e place provisoire. Une belle démonstration du dynamisme de la nouvelle génération gardoise.

Samedi, place à la longue bataille

La journée de samedi s’annonce redoutable, avec notamment la mythique spéciale du Val d'Aigoual à Sumène (45 km), réputée pour sa longueur, ses pièges et ses enchaînements techniques. Les pilotes gardois, nombreux dans le peloton, comptent bien continuer à faire parler d’eux, entre panache et plaisir. Et c’est sans doute ce qui fait, année après année, la magie intacte du Critérium des Cévennes : un mélange unique de sport, de passion, et d’identité gardoise.