Publié il y a 1 h - Mise à jour le 22.11.2025 - Julia Razil - 4 min  - vu 322 fois

FAIT DU JOUR De la tenue blanche à l’habit de lumières, le doublé historique de Joachim Cadenas

L'Arlésien se prépare au Mexique. Ici, chez Barralva.

- DR

C’est une première dans l’histoire des tauromachies. Jamais jusqu’alors un homme n’avait conduit à la fois une carrière de raseteur et une autre de torero. Le 6 décembre prochain, dans les arènes de Pisté, près de Chichen Itza au Mexique, Joachim Cadenas, As des As du crochet, s’habillera de lumières pour sa première novillada piquée. Et l’Arlésien ne compte pas s’arrêter là. Dans une interview exclusive, il évoque son aficion, ses ambitions et la double saison qu’il s’apprête à mener.

Il est 16h à Arles, 8h au Mexique. Joachim Cadenas débute une nouvelle journée d’entraînement au campo, entouré de ses amis André Lagravère "El Galo" et Lalo de Maria. Ce jour-là, ils vont prendre la route pour rejoindre la ganaderia Barralva. La veille, ils étaient chez le mythique élevage de Pepe Garfias. Terre de Navegante, toro qui en 2010 avait asséné une effroyable cornada à José Tomas. "On ne s’arrête pas, on fait beaucoup de route pour aller d’un élevage à l’autre, on tiente beaucoup, les journées sont intenses mais je vis un rêve éveillé", confie-t-il. Un rêve de gosse pour lui qui a longtemps hésité entre marcher sur les pas du raseteur Christian Chomel ou emprunter le chemin du matador José Tomas, ses idoles. À 30 ans, plus aucune hésitation, Joachim Cadenas sera l’un, et l’autre.

Joachim Cadenas et André Lagravère "El Galo" au campo chez Ignacio de Haro, propriétaire de l'élevage de Tepeyahualco. • DR

Objectif Gard : On vous savait practico mais de là à devenir professionnel… Quel a été le déclic pour vous lancer en novillada piquée ?

Joachim Cadenas : Il y a quatre ans, mon ami Fredo Cabasse est décédé. C’était un homme passionné qui avait un pied dans la course camarguaise et un autre dans la corrida. Pour lui rendre hommage, tous les professionnels proches de lui ont organisé un festival à Fourques. Clemente m’a entraîné pendant quelques semaines et pour la première fois, j’ai lidié entièrement un toro. Et j’ai eu cette chance de l’indulter. Je ne peux pas dire que ça a été une révélation, puisque j’ai toujours eu l’envie d’être matador, mais depuis je pratique. Et toujours avec sérieux. Longtemps j’ai hésité entre la course camarguaise et la tauromachie espagnole, mais je pensais être incapable de tuer l’animal que j’aime le plus. Aujourd’hui, les choses se concrétisent. Et j’en suis extrêmement heureux. Cela fait trois ans que je viens au Mexique, deux ans que je me prépare sérieusement. J'ai envie de démarrer et de démarrer bien. Je n'ai pas envie de le faire juste pour pouvoir dire ‘je l’ai fait, je suis matador’. Je veux devenir matador et donner le meilleur de moi-même.

Vous envisagez donc de prendre l’alternative…

Tout à fait. Mais je veux avancer sans me précipiter. Toréer intensément chaque toro, chaque vache, me donner à fond à chaque entraînement, puis à chaque corrida. J’ai la chance de pouvoir me préparer. Mais c’est vrai que pas mal d’arènes en Europe ont entendu que j’allais me lancer et m’ont contacté pour me proposer des choses. Envisager ça, c’est vivre un rêve.

De quelles arènes parle-t-on ?

Je ne peux encore rien dire, parce que rien n’est fixé. Et honnêtement je n'en suis pas à ce stade-là, celui de me dire je fais ça. Je veux me préparer d’abord. Quand je reviendrai en France, je verrai.

La saison prochaine, comment allez-vous mener de front votre carrière de raseteur et celle de torero ?

J’ai commencé à réfléchir au calendrier des courses camarguaises, mais comme je n’ai pas encore finalisé celui de la tauromachie espagnole, tout n’est pas encore en place. Je vais faire de mon mieux, même si je sais que ce ne sera pas simple. C’est une nouvelle aventure, et c’est justement ce qui la rend enrichissante. Ça ne m’inquiète pas, car même en pleine saison de course camarguaise, j’ai toujours trouvé le temps d’aller au campo et de toréer. Souvent, je sortais en second après le matador, et ce rythme ne m’a jamais posé problème. Bien sûr, aller au campo et se produire en corrida, ce n’est pas la même chose. L’énergie et l’investissement ne sont pas comparables, surtout quand c’est toi qui revêts l’habit de lumières. Peut-être que je réduirai un peu le nombre de courses camarguaises pour mieux me consacrer à la corrida. Mon objectif est de trouver l’équilibre parfait entre les deux.

Joachim Cadenas dans les arènes de Nîmes, en 2023. • Yannick Pons

Appréhendez-vous la réaction de certaines personnes qui pourraient vous accuser de creuser l’amalgame entre course camarguaise et corrida ?

Certains me le reprocheront peut-être oui, ça peut ne pas plaire à tout le monde. Mais je suis libre et je vis ma passion. Passer d’une tauromachie à l’autre, même s’il y a des choses similaires, fait grandir ma vision du taureau, la façon même dont j'aborde mes rasets. Tout ça m'a fait évoluer, y compris les préparations physiques. Et ce n’est que du bonheur que je vis chaque jour.

Pourquoi avez-vous choisi le Mexique ? Est-ce pour démarrer directement en novillada piquée ?

En France, c'est quand même assez fermé. Au Mexique, on me laisse l'opportunité de me préparer sans me poser trop de questions. Là-bas, on ne connaît pas la course camarguaise. Et puis, au Mexique il y a pas mal d'opportunités. Du côté du campo, les possibilités sont bien plus nombreuses, il y a beaucoup d’élevages. Hier, on a eu dix vaches par exemple. Aujourd’hui, trois toros nous attendent. En France, ce ne serait pas possible. Je suis de Mas-Thibert, je vais souvent chez Gallon, Tardieu, Roland Durand et même si j’ai cette chance, il n’y a pas autant de bêtes. Donc moins d’opportunités pour se préparer.

En tant que raseteur, vous avez remporté tous les trophées. Quel est celui que vous visez en tant que torero ?

Ce que je vise surtout c’est parvenir à exprimer à pleine puissance ce que je ressens au fond de moi. Je ne vise pas telle ou telle arène, je veux toréer bien tous les toros. Après, c’est vrai que les arènes qui m’ont toujours fait rêver, ce sont celles de Madrid. Elles ont quelque chose de spécial, elles m’ont donné beaucoup d’aficion. Et évidemment, j'ai grandi à Arles. Arles, ce sont mes arènes. Je suis allé à l'école de Nîmes et j'ai une relation particulière avec ces arènes aussi.

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