Publié il y a 14 jours - Mise à jour le 15.04.2024 - Propos recueillis par Sacha Virga - 4 min  - vu 1237 fois

L'INTERVIEW Jean-Michel Perret, maire de Saint-Hilaire de Brethmas sur la loi SRU : "Certains payent pour les anciens maires qui n'ont rien fait"

Jean-Michel Perret, maire de Saint-Hilaire-de-Brethmas

Jean-Michel Perret, maire de Saint-Hilaire-de-Brethmas

- Sacha Virga

21 maires du Gard se sont unis pour protester contre la loi SRU. Ce collectif de premiers édiles a pour objectif de la faire modifier. Jean-Michel Perret, maire de Saint-Hilaire de Brethmas, en fait partie. Interview.

Objectif Gard : Quels sont les problèmes que vous rencontrez avec la loi SRU ?

Jean-Michel Perret : En 2015, le Gouvernement a constaté que de nombreuses communes n'avaient pas respecté la loi SRU, appliquée en 2020. Il a été ordonné à toutes les préfectures de tous les départements, de mettre à l'amende et sous tutelle les communes qui ne respectaient pas la loi et de récupérer les droits de préemption et les droits d'instruction des permis de construire pour les logements sociaux. En fin de compte, ils se retrouvent confrontés à un problème. Tu ne peux pas du jour au lendemain forcer des gens à vendre leur terrain pour faire du logement social, et dans un lotissement tu ne peux pas t'amuser à acheter un pavillon à la vente pour en faire une dizaine de logements sociaux parce que tu n'es pas dans les clous. Préempter un pavillon pour faire un ou deux logements sociaux s'il y a un grand terrain, ça ne tient pas économiquement. Aucun bailleur social ne veut mettre de l'argent pour ça parce qu'ils sont perdants.

Vous avez été à l'initiative d'un collectif, qui a pris forme...

Tout part de rencontres dans certaines réunions, où on a pu discuter de cette problématique. Avec le maire de Générac Frédéric Touzellier, on a fait le même constat des difficultés que l'on rencontre sur la loi SRU. On est sous tutelle depuis 2015, toutes les communes en carence de logements sociaux sont dans ce cas. Il n'y en a qu'une qui en est sortie, c'est Saint-Martin-de-Valgalgues, qui a fait construire plus de 350 logements sociaux d'un coup. En fin de compte, l'État nous a sorti du fauteuil de conducteur pour nous mettre sur le siège passager. Il a pris le volant à notre place, continue à être en infraction, et c'est nous qui payons les PV. C'est ça depuis huit ans. 

Combien cela représente financièrement sur une année ?

C'est un pourcentage qui plafonne le montant de l'amende, rapportée à notre budget de fonctionnement. Cela représente environ 130 000 euros cette année, mais ça bouge. Sur le montant, il y a deux tranches pour être précis. Une de base qui correspond à 60 000 euros, et une autre optionnelle où les services de l'État dans le Gard disent : "Eux ils ne veulent pas faire de logements sociaux", donc ça alourdit l'amende, par pure décision d'une personne de ces services, et c'est ratifié par le préfet. C'est un scandale.

Savez-vous comment est réinvesti cet argent ?

Cela fait bientôt dix ans qu'on paye des amendes et il n'y a jamais eu le moindre centime d'euro pour aider à faire les logements sociaux. L'argent part dans le budget général.

En quelque sorte vous payez les pots cassés ?

Certains payent pour les anciens maires qui n'ont rien fait. Ce qui me met en colère, c'est que l'État m'a mis au tribunal administratif en m'accusant de bloquer la production de logements sociaux. On s'est défendu et le tribunal nous a donné raison, les juges ont déterminé que nous faisons tout pour en produire. Il y a des procédures légales pour rendre un terrain constructible même quand on a pas de PLU, ce qui est notre cas. Cela a été le cas au chemin Paul Courtin. On les a respecté, ça a pris quasiment deux ans, c'est du temps qu'on a perdu. On finit par faire valider notre dossier à l'issue d'une commission mixte présidée par la DDTM avec de nombreuses institutions. On dépose donc un permis, et l'État refuse. On retourne au tribunal, et l'État perd de nouveau. 

Ce permis permettait de construire combien de logements ?

Vingt logements dont dix sociaux, il n'y avait aucune idée de construire une cité ! C'était un petit lotissement comme à côté de l'école maternelle. Seulement des maisons avec des logements sociaux dissimilés deux par deux, quelque chose d'invisible. Quand j'avais fait venir Madame Lecaillon (ndlr : ancienne préfète du Gard), elle n'avait pas réussi à me dire où se trouvaient les logements sociaux à côté de l'école maternelle alors qu'il y en avait la moitié.

Mairie de Saint-Hilaire de Brethmas
La mairie de Saint-Hilaire de Brethmas • Sacha Virga

Avez-vous déjà rencontré le préfet Jérôme Bonet sur Saint-Hilaire-de-Brethmas ou est-ce déjà programmé ?

Non ce n'est pas prévu, parce que ça ne servira à rien. Je l'ai rencontré à Nîmes, je lui en ai parlé et j'ai aussi évoqué le sujet avec son secrétaire général Frédéric Loiseau. Malgré les explications et le fait d'avoir détaillé le dossier, trois mois après je recevais l'arrêté de carence qui entérine l'amende pour l'année 2024, ils ne m'ont pas écouté. 

Il y a quelques semaines nous avons rencontré le maire de Saint-Dionisy Jean-Christophe Grégoire, qui développait l'avis suivant : "Pourquoi les logements sociaux réalisés dans notre village ne pourraient pas compter pour certaines communes limitrophes qui ne peuvent pas en construire ?". Partagez-vous ses propos ?

Complètement ! J'ai habité des petits villages avec des logements sociaux, qui servaient à des institutrices qui étaient en remplacement, à certains employés communaux et aux enfants du pays qui souhaitaient rester dans leur commune. On s'en fiche de savoir si la commune a plus de 3 500 habitants ou autres, du logement social il y en a besoin partout. Je rejoins les propos du maire de Saint-Dionisy, les gens qui n'ont pas les moyens de se loger il y en a partout. 

Propos recueillis par Sacha Virga

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