Publié il y a 1 an - Mise à jour le 09.08.2023 - Thierry Allard - 3 min  - vu 5937 fois

FAIT DU SOIR « Là, c’est plus possible » : Pont-Saint-Esprit face à l’explosion des dépôts sauvages de déchets

Élus et agents devant la "récolte" de dépôts sauvages du matin, qui remplit deux camions

- Photo : Thierry Allard

Les deux camions-plateaux n’ont rien de camions-poubelles, et pourtant ils débordent d’ordures, dans une odeur pestilentielle. Et encore, il ne s’agit que de la « récolte » du matin, ce mercredi. Une récolte dont la mairie se passerait bien, puisqu’il s’agit de celle des dépôts sauvages.

À Pont-Saint-Esprit, la situation est grave. « Des dépôts sauvages, il y en a toujours eu, mais dans le cadre de la mise en place de la redevance incitative, ça explose, pose sans détour la maire Claire Lapeyronie. Là c’est plus possible, il y a un ras-le-bol des élus, mais aussi des agents qui tournent tous les jours. » C’est qu’une partie de l’équipe propreté de la mairie est mobilisée à ramasser les dépôts sauvages, et ce plusieurs fois par jour. Tel Sisyphe condamné à remonter inlassablement son rocher au sommet d’une montagne, les agents doivent repasser en permanence, les dépôts qu’ils ramassent étant presque instantanément remplacés par d’autres.

« C’est le bordel, tonne Benjamin Clamens, agent municipal à la propreté. Dès 4 heures du matin on est là pour ramasser, et on perd du temps sur notre boulot. On se fait engueuler par certains habitants, d’autres jettent leurs poubelles devant nous. » Lui et ses collègues nous confient avoir déjà vomi en ramassant des déchets. Et ce alors que ce n’est pas leur travail. « Mais on essaie de faire de notre mieux pour avoir une ville propre, il faut bien le faire », souffle l’agent, qui s’est porté volontaire pour cette mission ingrate.

Les agents sont bien placés pour voir l’explosion du nombre de dépôts sauvages dont parle la maire. « En 2022, nous récupérions environ une quinzaine de sacs par jour, maintenant c’est dix fois plus », note l’adjoint Daniel Mouchetant. Le nombre de verbalisations a augmenté dans les mêmes proportions, mais ne semble pas avoir d’effet sur les citoyens indélicats, spiripontains mais pas seulement, la mairie en soupçonnant certains de venir d'autres communes pour se délester à Pont. « La difficulté est de faire du flagrant délit, c’est pour ça que les 4 agents de la Brigade environnement passent 70 à 80 % de leur temps sur le terrain », précise-t-il. L’adjoint Vincent Rousselot affirme que le problème a empiré « il y a deux mois et demi quand on a retiré les bacs. »

Chaque jour, les agents communaux ramassent des dizaines de sacs d'ordures ménagères issus de dépôts sauvages • Photo : Thierry Allard

Un quartier concentre la plupart des dépôts : le centre ancien, « et quatre points noirs sur l’extérieur de la commune, ailleurs les gens jouent le jeu », note Vincent Rousselot. Et l’élu pointe un fait : « nous avons distribué 1 052 badges sur les 1 400 prévus. » En clair : près de 400 foyers n’ont de ce fait pas accès aux points d’apport volontaire des déchets (il y en a sept dans le centre ancien), qui se déverrouillent avec ledit badge. Résultat, les dépôts sauvages se multiplient, alors qu’il suffit d’un justificatif de domicile pour aller retirer son badge à l’accueil de la mairie Citézen, à la Cazerne. « Mais il faut faire un effort », grince Vincent Rousselot.

« Deux tonnes par jour »

Et ça urge : « les agents municipaux ramassent environ deux tonnes par jour », expose Claire Lapeyronie, une masse de déchets pour la plupart non-triés. Ce qui représente « vingt containers de 650 litres chaque jour, soit 1,5 tonne, en comptant les encombrants on en est à deux tonnes », abonde le directeur des services techniques de la municipalité Philippe Bayet. Or, « moi, je ne suis pas Nicollin », tonne la maire, rappelant que la collecte des ordures ménagères n’est pas du ressort de la municipalité, mais de l’Agglo et de son prestataire Nicollin. Sauf que les dépôts sauvages ne font pas partie de la collecte mais de la propreté urbaine, cette fois bien de la compétence de la mairie. Mais à une telle échelle, on peut parler de deuxième collecte…

« Si tout le monde ne met pas un peu de discipline, le système ne va plus marcher, reprend Claire Lapeyronie. Il faut que chacun prenne ses responsabilités, il y a une fuite en avant. » Outre le côté répugnant de la tâche, « nous ne sommes pas équipés pour », rajoute Philippe Bayet en pointant les camions du centre technique municipal. « Et pendant qu’ils font ça, les agents ne font pas autre chose, ça commence à poser problème sur l’organisation de la collectivité », rajoute la maire, les agents étant obligés de mener trois, voire quatre collectes par jour. Sans compter qu’il s’agit aussi « d’une question de respect des agents », souligne Vincent Rousselot, des agents « totalement engagés », salue la maire.

Les agents vident les camions des dépôts sauvages dans les containers du Centre technique municipal, avant de retourner sur le terrain • Photo : Thierry Allard

Que faire ? « Nous allons encore amplifier les verbalisations pour que le message soit clairement compris », promet Claire Lapeyronie, sachant que l’amende pour dépôt sauvage de déchets est de 135 euros. L’Agglomération doit également faire partir un courrier rappelant les règles très prochainement. En attendant que certains spiripontains fassent preuve du civisme le plus élémentaire, les agents municipaux seront encore sur le pont demain dès potron-minet pour essayer de maintenir Pont-Saint-Esprit propre.

Thierry Allard

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