FAIT DU SOIR Débat électrique pour le projet de ligne à très haute tension
Le réseau de transport de l’électricité (RTE) a tenu hier soir la première réunion publique pour son projet de ligne à très haute tension entre Jonquières-Saint-Vincent et Fos-sur-Mer. Les élus de la CCBTA, le député RN Yoann Gillet, ainsi que de très nombreux habitants étaient présents pour un débat électrique.
Lorsqu’on arrive devant le centre socio-culturel de Jonquières-Saint-Vincent ce jeudi soir, on découvre des banderoles posées près de l’entrée : « RTE, tueur de la Terre d’Argence ». Le ton est donné, et la première réunion publique pour le projet de ligne à très haute tension tenue par RTE commence sous un signe de discorde. La salle est pleine à craquer, l’atmosphère tendue. Si certains semblent prêts à en découdre, la plupart viennent d’abord pour s’informer, bien qu’un peu inquiets.
C’est le maire de Jonquières qui ouvre le bal, un peu cinglant. « Il ne serait pas honnête de ma part de prétendre que c’est avec plaisir que nous accueillons ce projet. D’aucun dirons-nous que tout est déjà décidé, que la concertation publique n’est qu’un habillage réglementaire, et qu’une fois de plus, la France d’en bas subira les décisions prises par les hautes sphères. Mais je veux croire qu’il reste dans notre intérêt d’écouter, d’apprendre et peut-être d’influer dès lors qu’il s’agit d’un projet d’intérêt public aux implications écologiques, économiques et environnementales qui nous concerne tous ». S’en est suivi près d’une heure d’explication du projet par le préfet de la région PACA, Christophe Mirmand et par les membres du RTE, parfois ponctuées de réactions véhémentes de l’audience.
On le rappelle, le projet de ligne à très haute tension, c’est 65 kilomètres de lignes électriques qui doivent relier Jonquières-Saint-Vincent à Fos-sur-Mer. L’objectif étant, d’une part, de sécuriser et améliorer le réseau électrique existant pour pallier la demande énergétique croissante, et d’autre part d’alimenter, en accord avec les mesures de décarbonation, la zone de Fos-sur-Mer qui est en développement industriel constant. Plusieurs tracés ont été dévoilés début février, et RTE assurait que tout serait mis en œuvre pour que ce projet ait un « moindre impact » sur le territoire. Même l’aspect esthétique des pylônes aurait été révisé. Une mesure qui n’est pas vraiment prise au sérieux par le député Yoann Gillet, qui sous les applaudissements du public rétorque : « Quand bien même vos poteaux auraient des formes de taureaux ou d’Arlésiennes, ça ne change rien au fait qu’ils feront 50 mètres de haut ! »
Dans un précédent article, la question de l’intérêt du Gard dans un tel projet était évoquée. Rappelons que la moitié des communes concernées appartiennent à ce département. Force est de constater que les élus comme les citoyens partagent cette inquiétude. Lors de la phase d’échange avec un public peu convaincu (pour ne pas dire carrément remonté pour certains), nombreux sont ceux qui ont comparé le Gard à une zone sacrifiée esthétiquement, économiquement, agronomiquement… Soulignant au passage une sorte de duel au sommet entre ce département et son voisin des Bouches-du-Rhône, forçant les habitants à choisir « non pas le tracé gagnant, mais le tracé perdant », et à créer des rivalités là où il n'y en a pas. Les agriculteurs se sont inquiétés de la mise en danger de l’AOP Costières de Nîmes, d’autres pour les oiseaux, et tous font part de leurs réserves quant à l’avenir du territoire. « La Terre d’Argence n’est pas à vendre ! », crie même un participant. Un argument est d’ailleurs souvent revenu dans les plaidoyers des orateurs : celui d’une région PACA qui bénéficie entièrement des retombées économiques du projet, alors que le Gard, lui, en subit tous les désagréments. « Dans ce cas, que la région PACA ait le beurre, l’argent du beurre… et les inconvénients qui vont avec ! », tonne Luc Perrin, conseiller municipal à Beaucaire.
Plusieurs pistes alternatives sont alors évoquées : le contournement du territoire du Gard via un tracé qui partirait directement de Tavel pour rejoindre Fos, ou même l’enfouissement des lignes pour éviter de « meurtrir le territoire, et faire un bras d’honneur aux agriculteurs » pour reprendre les mots de Julien Sanchez, maire de Beaucaire. Arguments déboutés par RTE et Christophe Mirmand, à grand renfort de diapositives explicatives qui finissent d’agacer l’audience. « J’ai l’impression d’une petite mascarade », confie monsieur Pinkowski, enseignant à Tarascon. « Je ne connais pas ce projet depuis longtemps, mais les réponses préparées à l’avance sur les lignes enterrées par exemple, ou le calendrier, en disent long sur le fait que les choses sont déjà décidées… ». Et ce sentiment de mauvaise foi est partagé par la grande majorité : nombreux sont ceux qui, en sortant, ne sont plus inquiets mais furieux d’avoir été invités à échanger, sans avoir vraiment été écoutés.
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