Publié il y a 1 mois - Mise à jour le 01.12.2024 - Propos recueillis par Louis Valat - 7 min  - vu 979 fois

L'INTERVIEW Laurence Baldit, maire de La Grand'Combe : « J’ai dû trouver ma place »

Laurence Baldit

Laurence Baldit, maire de La Grand'Combe depuis le 4 février 2023.

- François Desmeures

Ciblée par des critiques sur les réseaux sociaux, émanant du député Alexandre Allegret-Pillot comme de divers détracteurs, Laurence Baldit, première femme élue maire à La Grand'Combe, s’apprête à boucler sa deuxième année de mandat. Après avoir pris la relève de Patrick Malavieille, elle se défend, dresse un premier bilan et partage ses perspectives.

Objectif Gard : Vous êtes devenue maire en février 2023. Sur un plan personnel, comment s’est passée la transition entre votre rôle d’adjointe et celui de maire ?

Laurence Baldit : Je dois avouer que cela n'a pas été simple de succéder à un homme comme Patrick Malavieille, implanté depuis plus de trente ans comme maire sur la commune, bien implanté aussi dans le paysage politique, il a une autorité locale, départementale voire nationale. Cela n'a pas été facile pour moi de trouver ma place dans ce contexte-là. Puis je suis une femme, la première femme élue maire sur la commune de La Grand'Combe... Et j'ai le sentiment que la commune, représentée par une femme, ce n'est pas forcément une évidence pour tous. Il y a des hommes, y compris des femmes, qui ne sont pas prêts à voir ou entendre cela, même si beaucoup en sont fiers. J'ai beaucoup appris, sur tous les dossiers techniques, sur l'urbanisme, l'eau, la question des déchets, de la législation, pour moi c'était intéressant, j'ai découvert beaucoup de partenaires et ça m'a fait avancé sur un plan personnel. Le fait de me promener dans la commune, d'être disponible dans la rue... je trouve que c'est intéressant.

« Il (son bilan, NDLR) est très positif. De beaux projets ont été réalisé, d'autres sont prévus. Je suis resté et je reste, fidèle à ma volonté de prendre soin des gens.

Laurence Baldit, maire de La Grand'Combe

Quel bilan tirez-vous de ces deux premières années ?

Il est très positif. De beaux projets ont été réalisé, d'autres sont prévus. Je suis resté et je reste, fidèle à ma volonté de prendre soin des gens. C'est un parallèle que je fais avec mon métier de principale de collège (elle est principale du collège du Trenze, à Vialas en Lozère, NDLR), comment on peut améliorer la vie des gens ou des jeunes. J'adore ce qui est technique mais j'adore aussi tout ce qui relève de la proximité avec la population. La mise en place des réunions publiques c'est lourd, une prise de risque, mais c'est extrêmement enrichissant d'avoir le sentiment d'avancer avec la population, de répondre à leurs demandes même si l'on ne peut pas répondre à tout. Les missions de maire sont complètement passionnantes.

« J'ai été amenée à déposer plusieurs plaintes et une main courante. Il m'arrive, en rentrant chez moi, de retrouver des œufs lancés sur la façade de mon domicile. Il y a quelques jours, j’ai également découvert ma voiture complètement rayée. »

Laurence Baldit, maire de La Grand'Combe

Colis anonyme reçu en mairie, jets d'œufs sur votre domicile, voiture rayée après la polémique sur la viande halal (relire ici)... alors que la sécurité des élus inquiète, comment vivez-vous personnellement ces attaques ?

C'est un vrai sujet. J'ai été amenée à déposer plusieurs plaintes et une main courante. Il m'arrive, en rentrant chez moi, de retrouver des œufs lancés sur la façade de mon domicile. Il y a quelques jours, j’ai également découvert ma voiture complètement rayée. Ce que je ressens, c'est qu’effectivement, lorsque les élus ne donnent pas les réponses attendues par la population, il y a des représailles. J’ai été victime d’insultes extrêmement vulgaires, de menaces, et même d’attaques venant d’élus proches, y compris dans ma propre liste. Ces menaces, sauf lorsqu’elles proviennent de personnes identifiées pour lesquelles j’ai pu déposer une plainte, sont souvent faites sous couvert de pseudonymes. Pour moi, cela n’a pas grande importance. Ces personnes diffusent des informations en partie erronées. On pense souvent que les femmes ne sont pas compétentes techniquement, qu'elles ne comprennent rien aux dossiers. Je prends l'exemple de Geneviève Blanc (maire d'Anduze, NDLR) : c'est une personne qui maîtrise ses dossiers sur le bout des doigts, une technicienne incroyable. En matière technique, nous ne sommes pas moins compétentes qu’un homme.

Laurence Baldit maire La Grand'combe
La maire, Laurence Baldit. • Louis Valat

Pour une commune comme La Grand’Combe, qui dépend largement des subventions pour ses projets, comment accueillez-vous les restrictions budgétaires annoncées par le Premier ministre Michel Barnier ?

Nous avons l’habitude de solliciter des subventions de l’État, de la Région, du Département ou de l’Agglo, mais cette fois, on ne sait pas comment s’en sortir. Les dotations vont baisser et nous le comprenons parfaitement, à défaut de le cautionner. À La Grand’Combe, nous allons également subir une baisse de dotation à cause du recensement qui nous fait passer sous la barre des 5 000 habitants. Comme les subventions sont calculées par tranche, cela pourrait représenter une forte diminution. Pour une centaine d’habitants en moins, on risque de perdre un million d’euros. Nous mettons en œuvre des projets pour alléger les factures. Par exemple, nous travaillons sur un bâtiment en autoconsommation électrique et venons de signer un marché avec le SMEG pour mettre en concurrence les tarifs de l’électricité. Mais nous serons obligés de faire des coupes et de prioriser les projets. Il est possible que certains prévus pour 2025 ne puissent pas être réalisés.

Après avoir réussi à maintenir, in extremis, La Grand’Combe au sein du dispositif Quartier prioritaire de la Ville, avez-vous le sentiment que les baisses de subventions annoncées rendent ces efforts inutiles ?

Le combat pour rester dans la politique de la Ville n’est jamais vain. Nous savons où nous en sommes aujourd’hui, mais il est difficile de dire où nous serions sans cette politique. Ce que permettent les subventions liées à la politique de la Ville, ce sont notamment celles destinées à de nombreuses associations qui proposent des activités culturelles, sportives ou citoyennes pour les enfants, les jeunes et les adultes. Quand les adolescents participent à ces activités, ils ne sont pas ailleurs à faire je ne sais quoi pour s'occuper. Tous les combats menés ont leur mérite, et nous devons être fiers des résultats obtenus. Le fait que La Grand’Combe reste dans le dispositif des quartiers politiques de la Ville est une victoire. C’est aussi une victoire pour l’éducation, car ce statut permet aux écoles et au collège de bénéficier du Réseau d’éducation prioritaire (REP). La crainte que nous avions, c’était que ces établissements sortent de ce réseau et en soient privés. Pour nous c'est très important et on se battra toujours pour y rester.

Laurence Baldit
Laurence Baldit a prononcé ses premiers vœux en qualité de maire de La Grand'Combe. • Photo Louis Valat

La désertification médicale reste une problématique majeure sur le territoire, mais La Grand'Combe semble s'être armé ces dernières années. Quid de la situation sanitaire sur votre commune ?

Nous ne sommes pas particulièrement touchés par ce phénomène, car la grande action menée par Patrick Malavieille, à savoir la création de la Maison de santé pluridisciplinaire Simone Veil, a vraiment fait la différence. Grâce à Filiéris, nous avons des médecins généralistes installés dans cette structure, ainsi que des cabinets infirmiers. À la Maison de santé, le laboratoire d’analyses, qui avait failli partir, est finalement resté. Il y a aussi un psychologue, un orthophoniste, un podologue, une diététicienne, et nous avons la chance d’avoir un deuxième cabinet de kinésithérapeute qui s’est installé sur la commune, le premier étant au sein de la Maison de santé. En dehors des structures publiques, nous avons aussi des services privés comme un centre d’audition et un opticien. Nous sommes donc plutôt préservés, et cela est dû à l’action de Patrick Malavieille, mais aussi à ce fameux dispositif Quartier prioritaire de la Ville. Nous sommes également, même si ce n'est pas directement lié à la santé, sur la réflexion d'une Maison d'accueil d'assistants maternels pour les petits enfants.

Quels sont les projets à venir pour 2025 sur la commune ? 

Notre projet principal pour 2025 est le projet Pise 2030, qui se divise en deux volets. Le premier concerne la requalification de la zone par la vente de terrains et de bâtiments que la commune avait acquis. Plusieurs entreprises se sont déjà implantées, comme La Frenetik, une brasserie artisanale qui prévoit une extension, et les C.A.R Lafont qui sont désormais installés. Nous allons également finaliser la vente à un privé qui va créer une chaîne de montage de karting électrique. Une fois ces projets terminés, tout le quartier de la Pise sera bouclé, et dans un an, nous aurons une belle zone économique. Le second volet du projet inclut la requalification de la voie Nelson Mandela, afin de la rendre plus accessible tout en aménageant une voie verte pour les piétons. Ces travaux devraient commencer en septembre 2025. Nous prévoyons aussi l’aménagement d’un espace de détente et de loisirs en centre-ville, derrière la médiathèque, où nous allons démolir une maison pour créer un espace agréable et végétalisé. Par ailleurs, un city stade ou un skate park devrait être installé sur l’espace Charles de Gaulle. Concernant l’école Jules Ferry, nous avons entamé des travaux de rénovation énergétique. Enfin, sur l’esplanade devant la Maison de santé, nous prévoyons l’installation d’ombrières et de panneaux photovoltaïques sur le parking.

« Toutes les situations de crise sociale ont conduit au retour de l’extrême droite, et c’est difficilement compréhensible. »

Laurence Baldit, maire de La Grand'Combe

De nombreux maires gardois s’interrogent sur une éventuelle candidature. Vous concernant, pensez-vous déjà à 2026 ?

Je réfléchis encore à cette question et je n'ai pas de réponse définitive pour le moment, parce qu'il est important que nous en discutions au sein de notre majorité. Il s'agit de la construction de l’avenir. Je n'ai pas grand-chose à dévoiler à ce sujet pour l'instant. Mais, l'histoire de La Grand'Combe a toujours été celle d'amitiés et de combats, entre la famille communiste, sociale et la société civile. C'est une commune ancrée à gauche depuis trente ans, avec des valeurs progressistes sur la manière de prendre soin des gens, de les protéger, ainsi que sur la laïcité. Il est essentiel que nous continuions de travailler sur ces idées. Une réponse précise viendra très rapidement. Mais l’arrivée de l’extrême droite est préoccupante. Sur les six circonscriptions du département, nous avons désormais six députés du Rassemblement national ou de l'alliance avec Ciotti. Cela témoigne d’une droitisation du vote, à l’image de ce qui se passe ailleurs dans le monde. Toutes les situations de crise sociale ont conduit au retour de l’extrême droite, et c’est difficilement compréhensible. Ces partis ne proposent aucune solution concrète aux problèmes que rencontrent les citoyens. Mais en politique, rien n’est jamais acquis.

Propos recueillis par Louis Valat

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