L’INTERVIEW Émilien Fesquet (SA Cigalois) : "On a monté un vrai projet village"

Le SA Cigalois, club de football historique de Saint-Hippolyte-du-Fort, vient de réussir une performance marquante : l’accession en District 2. À sa tête, Émilien Fesquet, vigneron local et président passionné, revient sur cette saison réussie, les défis du football amateur et ses ambitions pour le club.
Objectif Gard : Quel bilan tirez-vous de cette saison 2024-2025 ?
Émilien Fesquet : Le bilan est forcément très positif. On termine champions, avec la meilleure attaque, la meilleure différence de buts et le meilleur ratio de points. C’est une grande fierté pour tout le club. On a été réguliers, solides mentalement. On a perdu deux matchs seulement dans la saison, c’est la preuve qu’on a été constants et concentrés jusqu’au bout. Gagner un championnat, ce n’est jamais un sprint, c’est un marathon.
C’est le retour au haut niveau pour le SA Cigalois ?
Oui, on revient à haut niveau pour l’histoire du SA Cigalois. Le club a fêté ses 90 ans en 2022, donc ce n’est pas rien ! On est une terre de football ici, Saint-Hippo a toujours été un bastion du ballon rond. Dans les années 40-50, on jouait en DH. Ce retour vers le haut du tableau, c’est aussi un retour à ce que le club a toujours été : un lieu de passion et de formation.
Vous avez également annoncé l’arrivée de Stéphan Ghalem comme nouvel entraîneur. Un tournant ?
Un choix réfléchi. Notre ancien coach Antony Sabatier a arrêté de son plein gré, ce n’était pas parce qu’il était en conflit avec le club. Il a arrêté parce qu’il avait d’autres projets, puisqu'il a décidé de se présenter aux élections municipales. Du coup, on a passé plusieurs mois à chercher un coach. Ce n'est pas facile de trouver des entraîneurs de qualité dans le secteur. Nous avons dû chercher depuis février, et le problème est que nous sommes éloignés de villes comme Nîmes ou Montpellier. Cela signifie que nous avons moins d’entraîneurs potentiels que les clubs des villes environnantes. Nous sommes à 30 minutes d’Alès et à un peu plus de 30 minutes de Nîmes, mais nous sommes à 4 000 habitants. Cela rend le recrutement d’entraîneurs plus difficile. Stéphan Ghalem, c’est un coach reconnu dans le département, il a coaché à Marguerittes, Anduze, Monoblet… Il connaît bien le niveau régional et surtout, il connaît les joueurs locaux. Il a déjà travaillé avec plusieurs recrues que l’on fait revenir cette saison. On monte, mais on veut surtout se structurer pour durer. L’idée, c’est d’avoir un vrai projet village, pas juste une montée éclair sans lendemain.
Justement, vous parlez de retour des joueurs "du cru" ?
Oui, et c’est essentiel. Yoan Oswald, Robin Grousset, Ayoub El Ouadghiri… Ce sont des gars du coin, qui ont joué en National, en Régional et qui reviennent au club. Ils sont Cigalois, ils représentent quelque chose pour les jeunes, pour le public. Ce retour, c’est un symbole fort. Et c’est grâce à ces joueurs que le public revient au stade, que les commerçants affichent les résultats, que la fierté renaît.
Le club semble aussi très impliqué sur les jeunes...
Totalement. On a eu quelques difficultés cette saison, notamment chez les U15, mais on travaille beaucoup pour encadrer nos jeunes. Mon père est éducateur, certifié FFF, et on essaie de faire monter nos éducateurs en compétence. On a des projets avec le collège, des stages pour attirer les enfants des villages alentours comme Pompignan ou Cadière. La formation est notre priorité pour continuer à grandir.
Le fonctionnement repose sur des bénévoles. Comment arrivez-vous à les mobiliser ?
C’est un vrai défi. Il faut comprendre que ce n’est pas 2-3 événements par an. C’est tous les week-ends, plus les entraînements, les matchs, les papiers, la logistique... Cette année, j’ai décidé de mieux répartir les rôles : communication, tournois, équipements, etc. Ma compagne m’aide beaucoup. On forme nos bénévoles, on les accompagne, mais on a besoin de relève. Les gens doivent comprendre que s’ils veulent que leurs enfants jouent au foot dans de bonnes conditions, ça passe par l’implication collective.
Le SC Cigalois a des ambitions. Vos infrastructures suivent-elles ?
On fait avec les moyens du bord, mais oui, petit à petit, on progresse. On a refait le terrain, bouché les trous, amélioré les abords... Il manque encore de l’éclairage pour pouvoir s’entraîner confortablement en hiver. Le club house est trop petit, on ne peut pas y faire de vraies soirées ou réunions. On aimerait aussi un local plus adapté pour le matériel. Mais on avance. Le but, c’est que les jeunes, les seniors et les bénévoles aient des conditions dignes. Ce n’est pas du luxe, c’est juste la base pour bien travailler.
Vous êtes aussi un passionné du Nîmes Olympique. Difficile de ne pas évoquer leur situation actuelle ?
Je suis abonné depuis des années. Ça fait mal de voir ce club-là dans une telle situation. Le Nîmes Olympique doit être un phare pour tout le département. Mais sans structure, sans formation, sans projet clair, tu coules. On essaie de ne pas reproduire ça à notre échelle. Former, structurer, faire grandir, c’est notre ligne directrice.
Et la suite pour le SA Cigalois ? La D1 ? La Régionale ?
On ne va pas s’enflammer. Il faut d’abord bien s’installer en D2. Mais oui, on est ambitieux. Si on monte, on veut que ce soit durable. Monter pour redescendre, ça n’a aucun intérêt. On veut un club structuré, avec des éducateurs formés, des jeunes bien encadrés, des infrastructures solides. On a déjà fait un beau chemin : de la 5e à la 3e division en trois ans. L’objectif dans 2-3 ans, c’est de goûter à la Régionale. Mais chaque chose en son temps.
Quel regard portez-vous sur l’évolution du football amateur ?
Franchement, c’est de plus en plus dur. Entre les règlements, les mutations, les arbitrages qui manquent, c’est un vrai parcours du combattant. Il faut une rigueur quasi-professionnelle pour ne pas se faire piéger. Et pourtant, on reste bénévoles. Il faut qu’on s’inspire des clubs qui bossent bien comme Beaucaire, Aigues-Mortes, ou même Moussac, qui a réussi à monter après des années de galère. C’est des modèles. Pas pour copier, mais pour s’en inspirer. Nous, on veut être sérieux, stables et solides.
Un mot pour conclure ?
Merci ! Merci aux bénévoles, aux supporters, aux partenaires, aux joueurs, aux dirigeants et à notre ancien coach Antony Sabatier. Et surtout à Saint-Hippolyte-du-Fort, qui est derrière nous. On fait ça pour que les gens soient fiers de leur club, de leur ville. Le SA Cigalois, c’est le cœur du village.