Publié il y a 7 mois - Mise à jour le 04.10.2023 - Anthony Maurin - 5 min  - vu 215 fois

NÎMES Assurer la vitrine du patrimoine nîmois en partageant les connaissances scientifiques

Les intervenants de la première journée d'étude de l'Inrap à Nîmes (Photo Archives Anthony Maurin).

L’Institut national de recherches archéologiques et préventives organisait une journée d’étude, sa première sous cette forme, au Musée de la romanité. Quatre conférences dont nous avons déjà parlé et une table-ronde ouverte aux questions du public.

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Le chantier en cours à l'amphithéâtre (Photo Archives Anthony Maurin).

De l’aveu même de Dominique Garcia, président de l’Inrap, « la tradition archéologique à Nîmes date de plusieurs décennies voire plusieurs siècles, on a toujours reconstruit la ville sur la ville et on a toujours fait de l’archéologie. L’Inrap, depuis 20 ans après les fouilles de sauvetage des années 1970-80 essaie de restituer l’histoire de Nîmes au fur et à mesure qu’elle se reconstruit. C’est une prouesse car on voit une ville qui s’est modernisée mais dont la connaissance a progressé parce qu’en fin de compte pour les archéologues c’est une opportunité d’aller ce qu’il y a sous vestiges actuels, sous les maisons actuelles. À Nîmes, on trace un cercle vertueux car avec la modernité on connaît le passé de la ville. En plus la ville est couronnée par ce label Unesco autour de la Maison carrée qui montre qu’une ville peut se moderniser et valoriser son patrimoine pour en faire un élément essentiel pour rassembler les populations. »

Dominique Garcia, président de l'Inrap (Photo Anthony Maurin).

Pour le président, le choix de Nîmes n’était pas anodin. Le but de cette journée spéciale était simple mais primordial. « L’Inrap tenait à rassembler les spécialistes et pas uniquement les archéologues même si nous sommes un institut d’archéologie. Nous travaillons depuis plusieurs décennies à Nîmes donc il était normal d’y rassembler, pour notre première journée d’étude des archéologues mais aussi des historiens de l’art, des historiens, des architectes, des maîtres d’œuvre… Pour essayer d’échanger afin de savoir ce que chacune de ces disciplines peut apporter aux autres dans le but de construire du patrimoine et de la connaissance. »

Nîmes comme exemple du partage des connaissance, c’est aussi une grande première et c’est tant mieux. Habituellement les recherches sont relativement cloisonnées et il est difficile d’avoir accès, au moins pour le grand public, à des données nouvelles. Là, L’Inrap joue le jeu de la transparence, mieux, de l’appropriation.

Les intervenants de la journée d'étude de l'Inrap à Nîmes (Photo Anthony Maurin).

« À partir de quatre monuments emblématiques de Nîmes, la Maison carrée, la cathédrale, l’amphithéâtre et l’enceinte romaine, nous avons fait un bilan de ce que l’on savait et de ce que l’on pouvait transmettre aux générations futures. Cette journée s’est tenue au Musée de la romanité avec pour volonté de faire travailler les professionnels mais aussi échanger avec un public d’étudiants, de membres d’associations de protection du patrimoine, des élus ou de responsables administratifs. C’est la vitrine du patrimoine vivant et scientifique de Nîmes. » La table-ronde qui a suivi les conférences et qui devait clôturer la journée fut l’occasion d’avoir tous les intervenants à disposition dans une ambiance sereine, simple, voire carrément joviale et souriante.

Les intervenants de la première journée d'étude de l'Inrap à Nîmes (Photo Archives Anthony Maurin).

Un atlas numérique, basé sur les recherches et les cartes de l’Inrap, devrait bientôt voir le jour pour Nîmes et son histoire. Il portera sur la zone protégée par la nouvelle inscription de la Maison carrée sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco.

Des marques de couleurs ?

Y avait-il de la polychromie, de la peinture, sur les monuments nîmois ? Dominique Garcia s’interroge sur la question et met les pieds dans le plat en demandant où en sont les recherches. « Sur l’amphithéâtre, le parapet actuellement en restauration et dont une sculpture illustre un combat de gladiateurs aurait des traces d’un badigeon rouge. Il semble antique ou postérieur mais pour l’instant on ne peut pas prélever d’échantillon car il y a trop peu de matière. » Peut-être que les archéologues en trouveront un peu plus ans un endroit masqué.

Le public passionné par les propos des experts (Photo Anthony Maurin).

Ailleurs sur l’amphithéâtre, « on voit des traces de peinture pour marquer les blocs mais qui ne sont pas présentes pour décorer ». Et le président de l’Inrap de rétorquer : « S’il y avait eu de la polychromie et si cela avait été important, les archéologues en auraient trouvé. » Sur la cathédrale pour l’instant on ne voit rien. Cependant, sur des fouilles récentes du côté de l’avenue Jean-Jaurès une belle surprise, actuellement à l’étude, est à prévoir dans les prochains mois…

Selon Dominique Garcia qui tient à le rappeler, « on a déjà retrouvé à côté du Temple de Diane des statues préromaines qui étaient colorées et qui avaient gardé toute leur beauté. Il est étonnant de ne pas trouver plus de couleurs sur les monuments romains. Peut-être que la pierre de Lens, celle dont sont en grande majorité faits les édifices, se suffisait à elle-même et offrait tout ce que le romain pensait de beau pour de telles structures. »

Choix de restauration

Jean-Claude Bessac, spécialiste de la chose, a pris la parole pour parler de la pierre, fantastique, du bois de Lens, qui a servi aux monuments nîmois antiques. Cet ancien chercheur au CNRS est incollable sur la question et connaît par cœur la moindre des carrières antiques en ayant pour elles un réel attachement. Et pour cause, les Nîmois eux-mêmes ne sont pas conscients de cette qualité supérieure.

Perdu non loin de Moulézan, une des carrières antiques du bois de Lens (Photo Archives Anthony Maurin).

Pour lui, « on retrouve cette pierre de qualité de Nice à Narbonne » Quand on connaît le poids de la Narbonne de l’époque… On comprend mieux l’importance de nos pierres gardoises qui valaient leur pesant en marbre grâce à leur qualité et leur blancheur. Pour un fervent sourtien : « Après l’inscription de la Maison carrée à l’Unesco​​, il faudrait penser à protéger les carrières du bois de Lens qui ont servi à ces nombreux chantiers antiques. »

Passons aux couleurs. Comment faire pour la restauration d’un monument ? Quel état choisir ? Hubert Robert, peintre du XVIIIe siècle, fut l’un des principaux artistes français de son temps. Ses toiles sont exposées partout et parmi elles de nombreuses évoquent les monuments nîmois.

Aujourd'hui encore en activité, une carrière moderne puise toujours la belle pierre du bois de Lens (Photo Archives Anthony Maurin).

« Hubert-Robert était un peintre qui représentait les monuments de manière patinée. C’est un exemple dans l’art nîmois car on retrouve ses tableaux sur Nîmes à Rome ou au Louvre. Mais il peignait une couleur non originale qui a été faite par le temps qui passe ou plus tardivement par d’autres hommes d’où les couleurs dorées des monuments. On peut aussi voir des patines couleur bronze sur des monuments en pierres mais la pierre de Lens content de l’oxyde de fer qui donne naturellement une patine de couleur ocre. »

Elle est belle notre Maison carrée ! Mais les romains l'ont-ils déju vu de cette couleur ? (Photo Anthony Maurin).

Pour la restauration de la Maison carrée, on choisit les couleurs des tableaux de Robert ou celles de l’Antiquité ? Une chose est sûre pour Nîmes c’est que la patine de la pierre de Lens est rapidement à l’œuvre, on parle de cinq ans après la taille. Pour le président Garcia, « on peut en conclure que les romains eux-mêmes n’ont pas dû voir bien longtemps la Maison carrée comme nous allons la voir quelques décennies car nous avons choisi de la patiner à l’aide d’un badigeon ». Il faut faire des choix mais dans tous les cas on se privera de quelque chose qui a fait partie de l’histoire d’un monument.

Les petits ânes ne transportent plus la pierre du bois de Lens ! (Photo Archives Anthony Maurin).

Anthony Maurin

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