CULTURE L’art cinétique de Charly Salvatge, mécanique et poétique

Charly Salvatge propose l'exposition Garage Kinetik
- Thierry AllardPlus qu’une exposition, c’est une plongée dans un univers que propose l’Uzétien Charly Salvatge du 26 juin au 20 juillet à la galerie 5 Heures, à Uzès. Un univers de sculptures en mouvement, pour certaines immersives, d’une inventivité et d’une poésie rares. Découverte.
Ce sont des sculptures, mais celles-ci diffusent de la lumière, du bruit, et sont en mouvement : bienvenue dans l’univers de l’art cinétique que pratique Charly Salvatge, 37 ans, qui propose sa première exposition. Douze œuvres la composent, avec chacune leur forme, leur histoire, leur poésie propre, expression de l’art de celui qui est menuisier dans le civil et voulait que sa « créativité ait un terrain d’expression » plus grand.
Ce terrain, c’est l’art cinétique, courant artistique incluant le mouvement au sein des œuvres, né au milieu du XXe siècle. « J’ai rencontré un manque face aux tableaux, et j’ai trouvé dans les œuvres et installations de Jean Tinguely quelque chose qui me parlait », explique Charly Salvatge. L’artiste suisse, qui créait des machines à l’aide de matériaux de récupération, fait donc partie des inspirations revendiquées par Charly Salvatge, au même titre que des films des années 1980, comme « les Goonies, Retour vers le futur, Chérie j’ai rétréci les gosses, dans lesquelles on retrouvait la figure de l’ingénieur un peu fou qui fabriquait des machines presque vivantes », développe-t-il.
Les siennes le sont, presque vivantes. Fabriquées à partir de matériaux chinés, patinés, détournés de leur usage premier, au point qu’on se surprend à trouver de la poésie dans le mouvement d’un mécanisme de machine à laver, le rythme fragile et imparfait de leurs mouvements mécaniques leur donne un côté presque organique, parfois vaguement inquiétant. En s’approchant, on distingue des détails, des personnages minuscules, des extraits de comics, des références à la pop-culture, des extraits de musiques de Pink Floyd ou Ennio Morricone mélangés à des extraits de films ou des sons mécaniques, le tout contant une histoire propre à chaque œuvre.
« Je ne sais pas du tout où je vais quand je commence, explique l’artiste. Souvent, je pars d’une pièce qui me parle, j’ai un hangar où j’ai une collection énorme de pièces que je chine, et de là, je fais un assemblage basé sur l’harmonie ou la disharmonie des matériaux qui se complètent », explique-t-il. À partir de là « apparaît un semblant d’utilité, une histoire de la pièce, et je crée des fanzines sur chaque pièce où je raconte l’histoire que j’y ai projetée, même si chacun a son interprétation », poursuit-il.
On y retrouve des moteurs, des lumières, du son, parfois des écrans, exclusivement cathodiques, que Charly Salvatge bidouille pour les transformer en oscilloscopes, comme dans « L’Orgue de Corti ». L’œuvre, à la forme d’escargot et à l’allure brutaliste, nommée d’après l’organe de Corti, organe de la perception auditive situé dans l’oreille interne, allie casque audio, oscilloscope et enceinte à conduction osseuse. Le spectateur est alors amené à s’immerger dans le son à travers une véritable expérience sensorielle. Comme dans « Le siège de Corti », qui reprend les mêmes éléments pour faire vibrer le spectateur qui s’y assoit au rythme de la musique ambiante, traduite en images à travers l’oscilloscope.
Baignées de science-fiction, les œuvres de Charly Salvatge propulsent le spectateur dans un futur proche, mais dont le côté patiné et analogique suggère qu’il est issu du passé. Du rétrofuturisme, en somme, dont l’univers singulier a séduit Maximin Jacquier et Julien Segard, à la tête de la galerie 5 heures. Julien Segard a découvert les œuvres de Charly Salvatge fortuitement : « À l’origine, j’y allais pour les lampes, qui représentent une grosse partie de mon activité d’antiquaire, rejoue-t-il. J’ai vu tout ça, je me suis dit que c’était incroyable, on a été scotchés par la poésie, pour moi, il y a beaucoup de choses dans ces œuvres, où tous les sens sont mis à contribution, avec à chaque fois un univers et une histoire très différents. » De quoi les convaincre de faire de Garage Kinetik la première grosse exposition de leur galerie ouverte il y a un an.
À découvrir du 26 juin au 20 juillet à la galerie 5 heures, 32 avenue du Général-Vincent à Uzès. Ouvert du mardi au samedi de 10h à 18h30, les dimanches et lundis sur rendez-vous. Plus d’informations ici.