Une histoire de rencontres, de sensibilité, c'est bien de cela dont il s'agit. À travers ses photographies, Vanessa Gilles interroge la mémoire collective du peuple tsigane, la transmission des récits et le lien sacré entre l’eau, la foi et l’exil. Un projet initié il y a plusieurs mois, après s’être immergée dans la crypte de sainte Sara aux Saintes-Maries-de-la-Mer.
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Ilsen About, chercheur au CNRS autour de l'identité tsigane et commissaire d'exposition, ainsi qu'Esmeralda Romanez, présidente de la « Fédération Européenne des Femmes Romanis et Voyageuses », en sont les déclencheurs. La photographe nîmoise a ainsi porté son regard curieux et bienveillant sur les ex-voto offerts à Sara la Noire, sainte vénérée par le peuple tsigane aux Saintes-Maries-de-la-Mer. Les tirages sur soie grandeur nature reprennent les capes cérémonielles de la procession du 24 mai, confiées par Dominique Charmaison, surnommé "l'homme de Sara" et gardien de l’église des Saintes-Maries-de-la-Mer.
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"C’est lui qui a sélectionné une quinzaine de capes et me les a remises", rembobine-t-elle, consciente de la confiance accordée et du privilège que cela représente. Ces capes lui évoquent "la protection". "C’est le symbole de la tradition orale du peuple tsigane", sur les origines de Sara, figure légendaire qui aurait accueilli les Saintes venues de Palestine, arrivées par la mer en barque, en jetant sa cape dans l’eau. Suspendus au beau milieu de la première pièce de la galerie, les papiers de soie imprimés recto verso forment un sanctuaire. "On y entre un peu comme dans la crypte. Ces œuvres deviennent des sculptures, puisqu’il y a deux faces et qu’on peut tourner autour, ça transcende la photographie", souligne Anne Clergue. La cape blanche mise en exergue "est un hommage à Jacqueline Aubanel", la dernière des petits-enfants du Marquis de Baroncelli, décédée à l’âge de 88 ans, le 13 avril dernier.
Cette exposition intitulée Sara, la mémoire de l’Eau s’accompagne d’une série de clichés très poétiques, avec toujours cette présence de l’eau et de ces femmes, Livia, Jade, et bien sûr Esmeralda, portant la cape blanche, photographiée le jour de l’enterrement de Jacqueline Aubanel dont elle était très proche.
"Sara, la mémoire de l'Eau", à la galerie Anne Clergue, 4 plan de la Cour à Arles, jusqu'au 11 octobre.