Les consommateurs la retrouveront dans quelques semaines sur les étals des boucheries de détail. Sous l'intitulé "Agneau des bergers de Provence", cette marque a non seulement pour objectif de valoriser un produit local (face aux importations massives), mais aussi de créer de nouveaux débouchés pour la filière ovine locale. "Nous voulons que le consommateur sache qu’en achetant cet agneau, il fait un acte citoyen", explique Luc Bourgeois, éleveur à Salon-de-Provence et président de la Fédération départementale ovine (FDO).
L’agneau labellisé devra être né, élevé et abattu dans les Bouches-du-Rhône, et issu des trois races locales (Mérinos d’Arles, Mourerous et Préalpes du Sud). Le cahier des charges, volontairement souple, vise à intégrer le maximum d’éleveurs, sans leur imposer une lourdeur administrative excessive. "On veut garantir une viande de qualité tout en préservant la qualité de vie des éleveurs", ajoute le président de la FDO13.
Le tout jeune label "Agneau des bergers de Provence" regroupe déjà une quarantaine d’éleveurs, mais les responsables visent rapidement une centaine d’adhérents (sur les 200 potentiels) et environ 10 000 agneaux labellisés pour cette première année. À terme, la démarche pourrait évoluer vers une reconnaissance officielle (IGP ou AOP), en lien avec l’INAO (Institut national de l'origine et de la qualité).
La restauration collective, enjeu de taille pour la filière ovine
Autre défi majeur : faire entrer cet agneau local dans les cantines et les restaurants collectifs. Michel Staub, directeur des cuisines centrales d’Arles et d’Avignon -- qui servent près de 10 000 repas par jour -- voit dans la création de ce label, un levier essentiel pour intégrer le local dans l’assiette : "Avec la loi Egalim, nous devons augmenter la part de produits locaux et durables. Ce label nous donne une solution concrète pour proposer une viande de qualité, issue de notre région." La restauration scolaire, en particulier, joue un rôle clé dans la découverte gustative : "On associe souvent l’agneau à un goût fort. Avec l’agneau local, plus tendre et savoureux, on change cette perception dès le plus jeune âge", ajoute Luc Bourgeois.
Avec une contrainte, et pas des moindres, à prendre en compte : "l’agneau est une viande qui coûte cher, et le prix d’un panier repas en restauration collective est quand même plus bas", reconnaît Olivier Roux, le président d’Alazard & Roux, entreprise spécialisée dans la découpe et la commercialisation. Celui qui est donc désormais partenaire de la SICA, s’est recentré voilà quelques années sur le marché de la restauration collective, délaissant celui des hypermarchés où "il était plus difficile de valoriser les produits". Et il se réjouit de l’arrivée de ce label, complémentaire de sa marque existante "Agneau Crau-Alpilles". "Cette nouvelle marque fédère et élargit le champ de production, tout en respectant la diversité des marchés", souligne-t-il, confiant quant à son développement. "Je pense que nous pourrons progresser de 20 % par rapport à notre activité actuelle (25 000 par an, Ndlr)."
Cette saison automnale marque le début des naissances. Dès la fin de l’année, puis en début 2026, la viande d’agneau labellisée sera mise en vente. Le succès dépendra alors de l’accueil des consommateurs.
Une réussite collective
Créée en 2021, la SICA (Société d’intérêt collectif agricole) de Tarascon est née de la volonté des éleveurs de sauver le dernier abattoir départemental, alors menacé de fermeture. "Au départ, nous étions 80 éleveurs à y croire", rappelle Christophe Fano, co-président de la SICA. Grâce au soutien de la Métropole, du Département, de la Chambre d’Agriculture et de l’Agropole, qui a racheté les bâtiments, l’abattoir a pu redémarrer. "Aujourd’hui, plus de 500 agriculteurs y sont adhérents, et la structure abat près de 2000 tonnes de viande par an, contre 1 400 en 2021."