Publié il y a 4 mois - Mise à jour le 27.12.2023 - Marie Meunier - 3 min  - vu 849 fois

FAIT DU JOUR "On essaie de faire les choses bien" : le témoignage d'un salarié des travaux publics

Luc Bernardoni (à droite) au côté de son fils, Mathieu, devant le siège de la société, à Domazan.

- photo Marie Meunier

Tags, détériorations, invectives... C'est le lot de plus en plus d'entreprises de travaux publics lorsqu'elles sont sur les chantiers. Pourtant le secteur fait des efforts pour limiter son impact environnemental. Luc Bernardoni, qui travaille dans le terrassement et la démolition, témoigne. 

"On se fait insulter sur les chantiers : "voleurs", "bandits"... Des comités d'accueil nous attendent régulièrement. Parfois, nos engins sont dégradés, là on a tagué notre pelle." Depuis quelques années, les incivilités autour des chantiers se sont intensifiées, comme en témoigne Luc Bernardoni. Il a géré sa propre entreprise à Roquemaure avant de la vendre à un groupe il y a une dizaine d'années. Aujourd'hui, il travaille au sein de l'entreprise de son fils, Mathieu, qui siège dans la zone industrielle de Domazan et emploie 40 salariés.

Parfois, les engins de chantier sont dégradés pendant la nuit. • photo DR

Il a vraiment vu le comportement des riverains changer : "Avant, les gens respectaient ceux qui travaillaient. Après, ils ont été plus attentifs au bruit, à leur tranquillité. Maintenant, se mêlent aussi les questions autour de la nature." Une conscience environnementale tout à fait honorable mais "qui n'est pas prise par le bon bout", aux yeux de Luc Bernardoni.

100% des déblais recyclés

Derrière chaque projet immobilier de résidences et de logements, on trouve souvent un collectif citoyen ou au moins des mécontentements. "On mène une douzaine de gros chantiers par an. Il y a au moins 60% où ça ne démarre pas bien", estime Luc Bernardoni. Même s'il en a vu d'autres, l'employé a du mal face à ces réactions : "Il faut savoir où s'arrête la raison et la déraison. Une crise de l'immobilier sans précédent s'annonce. Il manque 2 millions de logements dans le pays (*). Peut-être que ces mêmes personnes qui manifestent seront celles qui ne trouveront pas de logement pour leurs enfants ?", soulève-t-il.

Il est conscient que les travaux publics ne composent pas le secteur d'activités "le plus vertueux", mais il insiste : "On essaie vraiment de faire les choses bien. Alors on le vit mal à double titre." Son fils, Mathieu Bernardoni, a créé plusieurs entités complémentaires au sein de sa société. D'abord Provence VRD pour le terrassement, la pose de voirie et les réseaux. Puis Provence dépollution a été lancée et compte aujourd'hui 13 salariés spécialisés dans le désamiantage, le déplombage et le curage. En parallèle, existe aussi Provence valorisation qui récupère et valorise les déchets au sein d'un centre de recyclage. "Tous les déblais et déchets de chantier, on les valorise, on s'en sert pour faire d'autres produits. On ne jette rien, on n'achète rien en carrière", assure Luc Bernardoni.

Même lorsque des arbres sont arrachés, ils sont broyés et transformés en plaquettes de chaufferie. Pareil pour les souches. "En plus, le nombre d'arbres que l'on arrache est replanté sur un terrain que l'on a acheté à cet usage à Caderousse (Vaucluse)", poursuit l'employé. 350 arbres ont été plantés cette année et les essences ont été choisies, après la venue d'un ingénieur agronome qui a analysé la terre. 

"On est un des maillons de la chaîne"

Alors difficile pour lui de voir les efforts fournis ternis à la bombe noire sur une pelle de chantier où a été écrit le mot "tueur" : "On est un des maillons de la chaîne avec le promoteur, les entreprises, les municipalités. Mais on prend souvent toute l'agressivité car pour les gens ça devient concret quand on tombe un arbre ou qu'on commence à terrasser." Il aimerait que ces situations conflictuelles laissent place à des échanges plus pacifiés. Il pense qu'à cause de cette fracture, "on est freiné pour faire des choses encore plus intelligentes." 

Le mot "tueur" a été tagué sur une pelle de chantier récemment. • photo DR

Il comprend qu'un projet de 40 ou 50 logements puisse susciter des craintes mais "quand on finit, ce n'est guère plus haut qu'une maison à étage, ça s'incorpore bien et souvent ça ne dévalorise pas le coin. Les promoteurs ne font pas n'importe quoi, il faut aborder plus sereinement les choses." D'autant que les entreprises des travaux publics ne sont "que les exécutants" et pas les donneurs d'ordre, comme le rappelle Mathieu Bernardoni. Bien que cela n'enlève en rien le "souci de l'impact des choses derrière". Provence VRD a d'ailleurs été sacrée en 2018 Meilleure PME française dans la catégorie Travaux publics par le journal spécialisé Le Moniteur.

(*) Selon un rapport de l'Union sociale pour l'habitat, 2,4 millions de ménages sont demandeurs d'un logement social. 

Marie Meunier

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