Publié il y a 10 mois - Mise à jour le 26.05.2023 - François Desmeures - 4 min  - vu 794 fois

SAUVE Les traçages ont été injectés dans les affluents du Vidourle

Lorsde la pose des appareils de suivi dans le Grand aven de Sauve

- DR

Mercredi et jeudi, l'étude de l'Établissement public territorial de bassin (EPTB) du Vidourle est entrée dans la phase de terrain, avec l'injection de colorants à trois points stratégiques, dans des affluents du Vidourle, et la mise en place des dispositifs de suivi. Hasard du calendrier, les spéléologues plongeurs avaient choisi la même après-midi pour remonter de la résurgence du Vidourle au Grand aven de Sauve par le karst avec un Navscoot, instrument bourré de technologie qui permet la cartographie des conduits. 

Hasard du jour, les spéléologues Frank Vasseur et Damien Vignoles avaient projeté, le même jour, une exploration du karst, de la résurgence du Vidourle, à Sauve, au Grand aven de la Mer de rochers • François Desmeures

L'EPTB a lancé les marchés, les prestataires sont choisis, les spéléologues ont commencé à partager leurs données... Le travail de terrain peut commencer. Dans le cadre de l'étude que mène le gestionnaire du bassin du Vidourle (relire ici), deux jours de mise en place de suivi et d'injection des traçages ont eu lieu, mercredi et jeudi, entre Sauve et Pompignan. "On injecte une petite coloration pour bien comprendre l'impact sur les prélèvements de l'alimentation en eau potable, explique Marie Savéan, chargée de la ressource en eau à l'EPTB Vidourle. On veut voir comment circule l'eau à partir de trois endroits différents."

Le cabinet d'expertise Cenote a placé ses instruments de suivi à trois endroits, dont le captage de l'alimentation en eau potable de Sauve • François Desmeures

Pour l'instant, il ne s'agit donc que de "micro-traçages, pour caler des traçages plus importants pour comprendre la délimitation entre le bassin du Vidourle et du Lez", détaille Guilhem Mestre, chargé de logistique au cabinet d'expertise Cenote qui posait les instruments de suivi de ces traçages. Trois sites ont été choisis pour l'injection, "l'aven de Bégué-Ponchon, sur la commune de Pompignan, recense Marie Savéan, ainsi que la perte amont et la perte aval du ruisseau d'Artigues". Soit l'entrée dans le Rieumassel, affluent direct du Vidourle, pour ce dernier traçage. "On veut voir comment ça circule à partir de ces trois endroits différents en analysant pendant un mois si les appareils de suivi détectent la coloration", poursuit Marie Savéan. 

Avant la plongée, les équipes ont descendu leur matériel au bord de la résurgence • François Desmeures

Des appareils que Cenote était chargé de poser avant l'injection des produits colorants au captage de Lacan, qui alimente Pompignan en eau potable, dans le Grand aven de Sauve et au captage en eau potable de Sauve, une source prélevée avant qu'elle se jette dans le Vidourle, à l'aval de sa résurgence. "On injecte trois produits", détaille Guilhem Mestre. Le plus connu étant la fluoréscéine, verte, mais aussi un autre colorant rouge et un autre "détectable mais pas visible. Avant, on mettait des charbons actifs dans les révélateurs. Aujourd'hui, les instruments mesurent la concentration de colorants au niveau du milligramme par litre. Ils détectent la fluorescence sur une certaine longueur d'onde." 

"Dans le Grand aven, poursuit Guilhem Mestre, nous avons posé une sonde, reliée à un boîtier, qui enregistre la donnée." Sous la dalle en métal de l'alimentation en eau potable de Sauve, il s'agissait de voir, une fois l'installation faite, si le boîtier réussissait à communiquer avec l'extérieur via sa petite antenne. "On a une lumière qui remarque la fluorescence, qui fait des relevés toutes les quinze minutes, plus un mécanisme qui met de l'eau dans un flacon toutes les 24 heures." Si les équipes craignaient de manquer d'eau à l'une des pertes pour faire partir correctement le traçage, effectuer celui-ci en période d'étiage n'est pas un hasard. "À l'automne, argumente Marie Savéan, on a de trop hautes eaux et les traçages se perdent." "Ici, avec le débit et la concentration, on saura si on a récupéré tout le colorant", enfonce Guilhem Mestre. 

"Presque deux kilomètres jusqu'au Grand aven"

Frank Vasseur, spéléologue et plongeur

Hasard des calendriers et des rendez-vous possibles, une autre équipe s'agitait, mercredi après-midi, à côté de ce petit monde centré sur le point de captage. Les spéléologues Frank Vasseur et Damien Vignoles avaient projeté une remontée de la résurgence du Vidourle jusqu'au Grand aven par voie souterraine, à l'aide du Navscoot (lire encadré). "Il y a presque deux kilomètres jusqu'au Grand aven", explique Frank Vasseur. "Il faut environ trois heures pour faire l'aller retour, anticipe Damien Vignoles, coutumier du trajet. On va re-scanner les parois, d'ici au Grand aven, pour cartographier." "Et que les hydro-géologues puissent aussi utiliser la donnée, poursuit Doriane Morata, spéléologue elle aussi mais restée sur la berge cette fois-ci. Le travail préalable a été de retirer les fils de passage précédents avant le passage du Navscoot."  

Le Navscoot, pour cartographier les fonds karstiques

Il n'en existe que deux dans le monde, dont un développé à Montpellier. "La recherche a été financée par la Région, au sein du LIRMM (laboratoire d'informatique, de robotique et de microélectronique de Montpellier), avec les entreprises Syera et Reeds, explique Benoît Ropars, spécialisé en systèmes microélectroniques chez Reeds. L'objectif est de faire de la cartographie et de la reconstruction 3D." Si la Région s'est montrée intéressée à financer le projet, cela tient "à l'intérêt du développement et aux problématiques de l'eau dans la région". Et au terrain karstique, très répandu en Occitanie, notamment sur ses anciens départements du Languedoc-Roussillon. La machine se compose de "toute une suite de capteurs, poursuit Benoît Ropars. On a un sonar vertical et un autre horizontal, un système pour mesurer la vitesse, un autre qui permet de stocker les paramètres et les mesures du sonar, et une centrale inertielle pour mesurer les angles d'inclinaison." Alors que la Navscoot a subi de nombreuses améliorations depuis sa première mise en eau, il y a plus de cinq ans, une nouvelle version robot "est en cours de développement à Montpellier, afin d'embarquer tous les capteurs du système sur un robot autonome". Et qui pourrait donc réaliser des explorations sans présence humaine. Même si on devrait toujours pouvoir trouver un spéléologue volontaire pour l'accompagner...

Le Navscoot, dernier à êttre mis à l'eau par Doriane Morata • François Desmeures

Toujours bénévole, cette traversée supplémentaire délivrera d'autres informations à l'EPTB Vidourle sur la dynamique souterraine du fleuve, même si l'organisme public n'était pas le commanditaire du jour. Avec un bémol, rapidement rappelé par Damien Vignoles, "la partie du karst, pénétrable par l'homme, reste infime dans les milieux karstiques". Des micro-fissures continueront donc de garder les secrets qu'elles masquent aux regards. Exploration et coloration n'empêcheront donc pas une part de mystère de subsister. 

Le réseau karstique, accessible sous le rocher de la résurgence du Vidourle à Sauve • François Desmeures

Les plongeurs marquent un temps, au retour, avant de sortir, pour respecter un palier de décompression • François Desmeures

Le Navscoot, instrument de haute technologie bardé de capteurs... • François Desmeures

... qu'il est préférable de ramener entier à bon port • François Desmeures

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