Publié il y a 1 an - Mise à jour le 15.03.2023 - François Desmeures - 3 min  - vu 744 fois

LES MAGES Pôle médical au tribunal : le devenir d'une parcelle peut-il primer sur son statut juridique actuel ?

Mathieu Cres, pharmacien des Mages, et le maire, Alain Giovinazzo, ce mercredi devant le tribunal administratif de Nîmes

- (photo François Desmeures)

Ce mercredi matin, le tribunal administratif de Nîmes examinait le recours, en référé, de la préfecture contre le permis de construire accordé par la mairie des Mages pour la construction d'un pôle santé (relire ici). Le président s'est intéressé à ce que deviendra la parcelle dans le plan local d'urbanisme, tandis que l'État a fait valoir que celle-ci n'est pas en zone constructible au titre du Réglement national d'urbanisme, qui prévaut actuellement.

Mathieu Cres, pharmacien des Mages, et le maire, Alain Giovinazzo, ce mercredi devant le tribunal administratif de Nîmes • (photo François Desmeures)

Au regard de l'importance de l'affaire, le président de l'audience du tribunal administratif, Jean Antolini, a annoncé, en fin d'audience, qu'il ferait en sorte d'avancer à septembre l'analyse du dossier sur le fond. Mais ce mercredi matin, c'est en urgence que la préfecture demandait la suspension du permis de construire accordée par la commune des Mages, le 9 septembre, à la SCI Pharmages pour la construction d'un pôle médical de 500 m2, sur un terrain de 4 400 m2.

Au nom de la préfecture, le directeur adjoint de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), Jean-Emmanuel Bouchut, a rappelé que la commune avait vu son Plan d'occupation des sols annulé en 2017 et, depuis, "n'est pas régie par un document d'urbanisme". C'est donc le Règlement national d'urbanisme (RNU) qui y prévaut. "La commune a reconnu que le terrain est en dehors de la zone urbanisée (au bord de la départementale, à proximité du cimetière, NDLR), poursuit M. Bouchut, la question est de savoir si elle en a le droit. L'État considère que non, il a donc émis un avis conforme et défavorable à la commune, qui ne l'a pas respecté." 

"La préfète s'est engagée sur le projet de la commune de Saint-Ambroix"

Maître Amélie Greme, avocate de la SCI Pharmages

"J'ai cru comprendre qu'un document d'urbanisme est en cours d'élaboration, a immédiatement interrogé le président, comment se classera ce terrain ?" "Il a pour projet d'être urbanisé", a reconnu Jean-Emmanuel Bouchut. "En urbanisation future", répond le maire, Alain Giovinazzo, présent à l'audience. "La préfète considère que les conditions pour déroger ne sont pas remplies", constate à son tour Maître Amélie Germe, avocate de la SCI Pharmages de Mathieu Cres, pharmacien aux Mages. Selon l'avocate, pour permettre une dérogation, il faudrait trois choses : "une désertification médicale, un intérêt économique et un intérêt social. Ces deux derniers intérêts ne sont pas contestés par la préfecture. On apporte, ensuite, des éléments sur la désertification médicale, même si la préfète ne les considère pas comme valables." (*) Pour l'avocate, il s'agit bien, au contraire, d'un "phénomène avéré, qui contraste avec la position de la préfecture". Une position que dénonce vertement Me Germe, pour qui "la préfète s'est engagée sur le projet de la commune de Saint-Ambroix. Et elle a décidé que le pôle devait se faire sur cette commune-là, et pas sur celle des Mages."

Pour la DDTM, Lolita Arrighi a reconnu que l'accès des véhicules ne posait pas de problèmes dans le projet. "Mais nous n'avons pas d'éléments sur le cheminement piétonnier", le président de l'audience lui faisant ensuite préciser qu'il s'agissait bien du "cheminement de ville à rond-point". "Aménager le chemin entre le rond-point et la ville, ça dépasse le champ du permis", a plaidé Me Germe. 

"Le document d'urbanisme est en cours, pourquoi griller les étapes ?

Le président du tribunal, Jean Antolini

Le président s'est ensuite interrogé sur ce qui donnait un caractère d'urgence à la requête. "Le document d'urbanisme est en cours, pourquoi griller les étapes ?" Un plan local d'urbanisme "à ses prémices", les "locaux médicaux lamentables de Filieris, qui a menacé de quitter le territoire d'ici un an et demi si rien n'était fait", ont servi d'arguments. Pour la commune, Maître Laure Chatron a retracé l'histoire du PLU communal, vraiment débuté en 2017, repris par le maire actuel, Alain Giovinazzo, en 2020. Puis, retardé par les années Covid. "Je ne suis pas optimiste pour le voir sortir dans quelques mois, a ajouté l'avocate, plutôt dans quelques années." En attendant, elle a dénoncé des locaux "inadaptés", que ce soit par la vétusté de ceux de Filieris à Saint-Florent-sur-Auzonnet, qui ont connu l'incendie, ou l'absence d'espace de la pharmacie des Mages. Une commune qui est "la seule de la vallée qui a toutes les commodités", la seule susceptible "d'attirer des spécialistes"

La DDTM a également tenté de contrer un autre argument, celui qui verrait un lien entre départ des médecins et baisse démographique. Apès avoir noté que la population était passée de 1 000 habitants en 1968 à plus de 2 000 en 2011, Lolita Arrighi a insisté : "Dire que le départ des médecins entraînerait un départ de la population, on ne voit pas le lien." Un argument que Jean-Emmanuel Bouchut a traduit en jurisprudence : "On peut empêcher un projet par le Plan d'aménagement et de développement durable (PADD, un préalable au PLU, NDLR), on ne peut pas anticiper sur le PADD pour autoriser un projet". 

Le président a promis une ordonnance de référé pour vendredi. En cas de rejet du recours de l'État, la SCI pourra entamer les travaux.

(*) Selon la cartographie, mise à jour en juillet 2022, qui mesure le déploiement des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) en Occitanie, le CPTS "Entre Cèze et Gardon en Cévennes" est celui qui compte le moins de médecins en Occitanie, avec 3,3 pour 10 000 habitants.

François Desmeures

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